Chapter Text
Le printemps était enfin là, porteur d’une énergie nouvelle qui faisait frémir les feuilles des arbres et vibrer le campement Uchiha d’une effervescence discrète mais tangible. Sakura aurait aimé s'en imprégner pleinement, ressentir cette vitalité, ce renouveau, et s'en servir pour avancer. Mais la réalité était bien plus frustrante.
Elle était bloquée.
Son corps ne lui obéissait pas comme elle l’aurait voulu.
Bien sûr, Sakura comprenait parfaitement qu’être une enfant impliquait certaines limites naturelles. Elle savait aussi que la patience était une vertu essentielle, que le temps était un allié nécessaire pour développer pleinement ses capacités. Pourtant, chaque jour qui passait lui rappelait douloureusement ce qu'elle n'avait plus. Son esprit était mature, aiguisé par des années d'expériences et d'entraînements passés, mais il se heurtait sans cesse aux barrières de son corps encore jeune et fragile.
Ce matin-là, l’entraînement avec son père se déroulait dans une clairière isolée, non loin du centre du camp. Le soleil matinal réchauffait timidement la terre encore fraîche de la nuit. L'herbe humide collait à ses pieds nus, lui rappelant constamment son ancrage dans ce corps trop jeune.
— Encore une fois, ordonna Kaito d'une voix ferme mais douce.
Sakura inspira profondément, raffermissant sa prise sur le kunai dans sa main tremblante. Elle enchaîna la série de mouvements avec détermination, chaque geste étant exécuté avec soin. Mais l’équilibre n’était pas parfait, son corps manquait de coordination, de rapidité. Elle sentait chaque muscle protester sous l'effort, chaque articulation encore trop fragile pour les exigences qu'elle lui imposait.
Une fois encore, elle chuta, ses jambes fléchissant sous la fatigue. La frustration la submergea immédiatement, brûlante comme une lame chauffée au rouge.
— Pourquoi est-ce si difficile ? lâcha-t-elle, les yeux fixés sur le ciel bleu, ses poings serrés crispés par l'impuissance.
Kaito s'accroupit silencieusement près d'elle, ses yeux sombres emplis d'une compréhension patiente mais intransigeante.
— Parce que tu n'as que sept ans, Sakura. Tu ne peux pas ignorer ce fait.
Elle détourna les yeux, ses lèvres pincées en une ligne frustrée. Kaito tendit sa main, un geste doux mais autoritaire auquel elle répondit à contrecœur, saisissant cette aide pour se relever.
— La force véritable, expliqua-t-il doucement tout en l'aidant à se remettre debout, ne s'obtient pas en quelques mois. Elle demande des années. Ton esprit veut aller plus vite que ton corps ne le permet, mais cette impatience risque de te faire commettre des erreurs.
Elle se releva lentement, évitant toujours son regard.
— Que suis-je censée faire alors ? Attendre sans rien faire ?
Kaito posa une main ferme sur son épaule, la forçant à relever la tête vers lui. Son expression sévère s'était adoucie d'une tendresse rare qu'elle n'avait vue qu'à quelques rares occasions depuis la mort d'Hanae.
— Non, Sakura. Tu dois utiliser ce que tu possèdes déjà. Ton intelligence, ta détermination, ton instinct. Le reste viendra naturellement, avec le temps.
Elle le fixa enfin, croisant son regard calme, profond, protecteur. Le poids de sa frustration s'atténua légèrement, remplacé par une étrange douceur. Elle pouvait voir, dans ce regard qu'elle connaissait si bien désormais, toute l'affection silencieuse que son père lui portait depuis la perte de Hanae.
— Je comprends, finit-elle par murmurer, même si l'acceptation serait une autre bataille.
— Bien, répondit-il simplement en lui ébouriffant légèrement les cheveux. Maintenant, reprenons depuis le début. Doucement, cette fois.
Avec un soupir résigné mais déterminé, Sakura se remit en position, ses pieds trouvant lentement leur équilibre. Cette fois, elle fit attention à chacun de ses gestes, à chaque respiration, à chaque mouvement précis mais mesuré.
Et, pour la première fois, elle sentit son corps lui obéir vraiment.
Peut-être que son père avait raison après tout. Peut-être que la vraie force ne venait pas seulement du corps, mais aussi de cette capacité à accepter ses limites et à travailler avec elles plutôt que contre elles.
C'était une leçon qu'elle n'avait pas encore totalement assimilée, mais qui, doucement, commençait à prendre racine dans son esprit.
Peut-être qu'être une enfant n'était pas seulement une contrainte, mais aussi une chance de réapprendre à vivre différemment. Une chance d'apprendre, pas à pas, comment devenir plus forte sans se briser dans le processus.
— Encore, ordonna Kaito avec douceur.
Et cette fois, Sakura sourit presque, laissant sa frustration s’évanouir peu à peu, remplacée par l’espoir ténu que, finalement, le temps était peut-être exactement ce dont elle avait besoin.
Après cette matinée exigeante passée à s'entraîner avec Kaito, Sakura avait été autorisée à rejoindre les autres enfants du campement. L'air, imprégné des parfums printaniers, portait avec lui les rires clairs et joyeux des plus jeunes, lui rappelant, presque douloureusement, son propre âge. Un âge qu'elle oubliait trop souvent dans ses pensées et ses attentes.
Elle trouva rapidement le petit groupe avec lequel elle avait pris l’habitude de passer du temps. Hikari, avec son sourire contagieux, était penchée sur une couronne de fleurs, les doigts habiles tressant soigneusement chaque tige. Daichi, silencieux mais attentif, taillait un morceau de bois avec précision, comme toujours fasciné par les détails les plus minutieux. Renji, le plus turbulent, courait après un papillon, éclatant de rire à chaque fois que l'insecte échappait à ses doigts impatients.
— Sakura ! s’exclama Hikari en levant les yeux. Viens, je vais t’apprendre à faire une couronne !
Elle hésita un instant avant de s’asseoir à ses côtés, observant d'abord avec une curiosité distante le geste fluide de son amie. Ses propres doigts semblaient maladroits, presque trop rigides après les longues heures passées à manier des armes.
— C’est simple, lui assura la petite fille en voyant son hésitation. Laisse juste tes mains faire le travail. Ne réfléchis pas trop !
Ne pas réfléchir. Un concept étrange et presque inconcevable pour Sakura, habituée à analyser chaque situation. Pourtant, elle prit les fleurs que lui tendait son amie et tenta d'imiter ses gestes. Ses premières tentatives furent maladroites, incertaines, mais elle continua malgré tout, sentant étrangement la tension accumulée lors de son entraînement se dissoudre peu à peu.
— Tu vois, c'est bien mieux quand tu ne forces pas les choses, commenta Hikari en hochant la tête avec satisfaction.
Sakura observa la petite couronne imparfaite dans ses mains, un sourire discret étirant enfin ses lèvres.
— Peut-être que oui…
À quelques pas de là, Daichi releva la tête de son ouvrage, l'observant avec son calme habituel.
— Mon père dit que ton entraînement est différent du nôtre. Que tu apprends déjà à te battre comme les grands, murmura-t-il avec une curiosité prudente.
La remarque attira immédiatement l’attention de Renji, qui avait fini par abandonner son papillon pour s’approcher, les joues rosies par l’effort de sa course.
— C’est vrai, Sakura ? Tu apprends vraiment des techniques secrètes ? demanda-t-il avec une fascination non dissimulée.
Elle détourna les yeux, un peu gênée par cette attention soudaine, mais finit par hausser les épaules.
— Je ne sais pas si c’est secret, murmura-t-elle lentement. C’est juste... difficile.
Hikari pencha la tête sur le côté, observant Sakura avec douceur.
— Ça doit être fatigant, non ? De toujours s’entraîner avec les adultes.
Sakura hésita, surprise par cette compassion spontanée.
— Parfois, admit-elle finalement. Mais je veux devenir forte. Assez forte pour protéger ceux qui comptent pour moi.
Renji la fixa un moment, les yeux écarquillés de surprise avant de sourire largement, dévoilant toutes ses dents.
— Alors, quand tu seras forte, tu devras nous protéger aussi, d’accord ? lança-t-il joyeusement.
Les autres enfants éclatèrent de rire, mais Sakura sentit une étrange chaleur se répandre dans sa poitrine. Ce sentiment d’appartenance, cette simplicité, était quelque chose qu’elle n’avait jamais vraiment ressenti auparavant.
— D’accord, murmura-t-elle en hochant doucement la tête. Je vous protégerai aussi.
Elle ne réalisa que lorsqu’elle sentit la main d’Hikari sur son épaule qu’elle souriait vraiment, pour la première fois depuis longtemps. Un sourire simple et sincère, différent de ceux qu'elle avait appris à feindre pour rassurer les adultes.
Ce moment léger et innocent fut toutefois interrompu par l’approche discrète de Naori, dont la silhouette familière attira immédiatement l’attention du petit groupe. La femme sourit doucement aux enfants avant de poser son regard doux et ferme sur Sakura.
— Sakura, pourrais-tu venir m’aider pour préparer les provisions ? demanda-t-elle calmement. Ton père m'a dit que tu avais fini ton entraînement pour aujourd'hui.
Sakura se leva rapidement, inclinant respectueusement la tête.
— Bien sûr, Naori-san.
Les enfants la saluèrent chaleureusement avant de reprendre leurs activités, et Sakura suivit la femme vers la cuisine commune du campement. Le trajet se fit en silence, mais Sakura apprécia cette tranquillité bienveillante, loin des attentes exigeantes qui entouraient souvent ses interactions avec les adultes du clan.
La cuisine était déjà animée par plusieurs femmes affairées, dont les mains expertes préparaient les provisions qui permettraient au clan de tenir durant les prochaines semaines. Naori lui tendit une poignée d'herbes médicinales à trier avec un sourire discret.
— Tu sais, dit-elle d’une voix posée alors qu’elles travaillaient côte à côte, il est important que tu passes du temps avec les enfants de ton âge. Ton père pense que ton entraînement physique est essentiel, mais grandir au sein du clan signifie aussi apprendre à vivre ensemble, à tisser des liens avec les tiens.
Sakura hocha la tête, son regard fixé sur les herbes entre ses doigts.
— Parfois, j’ai l’impression de ne pas être comme eux, murmura-t-elle doucement, osant enfin avouer cette pensée qui la tourmentait depuis longtemps.
Naori l'observa avec compassion, posant doucement une main sur son épaule.
— Être différent n’est pas une mauvaise chose, Sakura. Ce sont nos différences qui nous rendent précieux au sein du clan. Mais ce n’est pas parce que tu es spéciale que tu dois t’isoler. Laisse-les t'accepter telle que tu es, pas seulement pour ce que tu peux devenir.
Cette affirmation, simple et douce, résonna profondément en Sakura, apaisant une anxiété qu’elle n’avait pas pleinement réalisée jusqu’ici. Peut-être était-il possible d'être elle-même, avec toutes ses différences, et pourtant d'appartenir entièrement à ce clan, à ces gens qui devenaient peu à peu sa nouvelle famille.
Les heures passèrent rapidement, le travail et les échanges paisibles avec Naori créant une atmosphère presque méditative. Lorsque vint finalement le crépuscule, elle retrouva Kaito qui l'attendait non loin, observant silencieusement le campement plongé dans la lumière dorée du soir.
— As-tu passé une bonne journée ? demanda-t-il simplement alors qu’elle le rejoignait.
Sakura leva les yeux vers lui, se permettant enfin de sourire, pleinement et sincèrement, en hochant lentement la tête.
— Oui, répondit-elle doucement. C’était une bonne journée.
Et pour la première fois depuis longtemps, elle en pensait chaque mot.
Kaito la contempla un instant, son regard sombre s'adoucissant légèrement face au sourire sincère de sa fille. Il semblait hésiter, cherchant les mots justes, avant de finalement détourner le regard vers l’horizon où le soleil disparaissait lentement derrière les montagnes, teintant le ciel d’orangé et de pourpre.
— J'en suis heureux, murmura-t-il doucement, sa voix résonnant d'une émotion contenue mais perceptible. Tu sais, ta mère disait souvent qu'une vie sans sourires n'en était pas vraiment une.
Sakura sentit sa poitrine se serrer doucement au souvenir d’Hanae, mais pour la première fois depuis longtemps, l'évocation de sa mère lui apporta une sensation chaleureuse plutôt qu'un vide douloureux. Elle hocha silencieusement la tête, son regard suivant celui de son père vers l’horizon embrasé.
— Je crois qu'elle avait raison, finit-elle par répondre doucement. Mais parfois, il est difficile de sourire sincèrement.
— Oui, admit Kaito, les bras croisés sur sa poitrine dans une posture à la fois détendue et vigilante. Surtout pour les gens comme nous.
Elle tourna la tête vers lui, intriguée par sa remarque.
— Qu'est-ce que tu veux dire ?
Kaito soupira légèrement, laissant tomber son masque d'impassibilité pour une rare franchise.
— Nous portons beaucoup d'attentes sur nos épaules, Sakura. Toi, plus que la plupart. Le clan entier t'observe, non seulement pour ce que tu es aujourd'hui, mais pour ce que tu pourrais devenir demain. Cela peut parfois te priver de la simplicité du moment présent.
Il la regarda finalement, ses yeux brillants d’une tendresse habituellement voilée par la retenue naturelle d’un guerrier Uchiha.
— Mais il est important que tu apprennes à vivre pour toi-même aussi. Pas seulement pour le clan ou les attentes des autres. Parfois, le plus grand défi est d’être simplement toi.
Sakura sentit une chaleur profonde envahir sa poitrine. Depuis sa renaissance, elle avait instinctivement porté le poids d’un destin qu’elle seule comprenait réellement, mais cette simple vérité énoncée par son père lui rappelait que, malgré tout, elle restait une enfant. Un enfant entouré par un père aimant, par des amis, et par un clan dont elle commençait à saisir pleinement les nuances.
— Je vais essayer, promit-elle d’une voix douce, sincère. Vraiment.
Kaito sourit légèrement, inclinant doucement la tête vers elle en signe d'approbation silencieuse.
— Bien. Et maintenant, rentrons. Il commence à faire frais, et tu as besoin de repos pour ton entraînement avec Madara-sama demain matin.
Ils reprirent lentement le chemin vers leur maison, passant devant les feux qui s’allumaient les uns après les autres dans le campement, chaque lumière douce symbolisant une famille, une histoire, un destin entrelacé au sien. Les murmures et les rires lointains les accompagnaient, soulignant encore davantage cette sensation d'appartenance qui se faisait plus tangible jour après jour.
Lorsqu’ils franchirent enfin le seuil de leur maison, Sakura ressentit une fatigue agréable peser sur ses épaules, une fatigue née non seulement de son entraînement physique, mais aussi des émotions douces et complexes vécues durant cette journée ordinaire mais précieuse. Elle s'installa silencieusement pour manger avec son père, savourant cette routine simple, ce rituel quotidien devenu une ancre rassurante dans le flot tumultueux de ses pensées.
Alors qu'elle allait finalement se coucher, allongée sur son futon, Sakura contempla le plafond obscur, son esprit vagabondant vers les paroles de son père. Être simplement elle-même… c'était à la fois une promesse séduisante et un défi intimidant. Mais dans le silence paisible de la nuit, elle sentit ses doutes s’atténuer doucement, remplacés par une détermination calme, une résolution profonde.
Demain, elle reprendrait l’entraînement. Demain, elle affronterait à nouveau les attentes, les défis, les limites de son corps. Mais ce soir, elle se permettait d'être simplement Sakura, une enfant parmi les siens, sous le regard bienveillant des étoiles silencieuses qui semblaient lui promettre, à leur manière mystérieuse, que tout irait bien.
Le lendemain, Sakura se leva avant même que l’aube ne colore l’horizon de ses premières lueurs.
Le silence du matin lui apportait toujours un sentiment particulier, comme si le monde tout entier retenait son souffle, attendant le commencement d'une nouvelle journée. Elle enfila rapidement sa tenue d'entraînement, observant brièvement le symbole Uchiha cousu soigneusement sur le tissu sombre. Ce simple emblème représentait tant de choses désormais : un héritage, un poids, mais aussi, progressivement, une fierté qu’elle apprenait à accepter.
En sortant de la maison, elle inspira profondément, emplissant ses poumons de l’air frais et piquant du matin. Quelques silhouettes silencieuses se déplaçaient déjà dans le campement, les guerriers du clan prenant leur relève sur les patrouilles nocturnes. Sakura les salua discrètement d’un signe respectueux de la tête, recevant en retour des regards approbateurs teintés de curiosité. Elle savait qu’elle était observée, scrutée même, mais cela ne la dérangeait plus autant qu'avant. Elle commençait à s’y habituer, lentement mais sûrement.
Madara l’attendait déjà dans leur clairière habituelle, debout, le visage tourné vers l’est où le ciel commençait à s’embraser doucement d’orange et de rouge. En s’approchant, Sakura ralentit légèrement le pas pour observer son mentor sans être remarquée. Même de dos, la simple présence de Madara imposait le respect. Il dégageait une aura à la fois intimidante et étrangement rassurante, une force tranquille dont elle comprenait désormais mieux la complexité.
— Tu es ponctuelle, comme toujours, constata-t-il sans se retourner, semblant percevoir sa présence avec une aisance déconcertante.
Sakura s’approcha finalement, venant se placer à ses côtés, son regard suivant le sien vers l'horizon coloré.
— Je ne voudrais pas vous faire attendre, répondit-elle simplement.
Un léger sourire effleura les lèvres de Madara, une expression subtile mais sincère qu’il réservait rarement à d’autres personnes. Il posa sur elle son regard sombre et pénétrant, la détaillant un instant avant de prendre la parole.
— Comment te sens-tu après la journée d’hier ?
La question la surprit légèrement, non par son contenu, mais par l’attention discrète qu’elle révélait. Elle haussa doucement les épaules, s’autorisant un sourire tranquille.
— Bien, admit-elle simplement. J’ai eu l’occasion de me reposer et de passer du temps avec les autres enfants.
— Bien, répéta-t-il en hochant lentement la tête. C’est important. L’équilibre est aussi essentiel pour un shinobi que la maîtrise du chakra ou les techniques de combat. Tu ne dois jamais négliger ces aspects, Sakura.
— C’est aussi ce que m’a dit mon père, répondit-elle avec un sourire doux.
Madara leva légèrement un sourcil, une lueur amusée traversant son regard.
— Ton père est un homme sage. Plus sage qu’il ne l’admet lui-même, je pense.
Sakura acquiesça en silence, touchée par le respect discret que Madara semblait porter à Kaito. Un respect mutuel, elle le savait, même s’ils n’en parlaient jamais ouvertement.
— Aujourd’hui, poursuivit-il d’un ton plus sérieux, je veux travailler davantage sur ton Sharingan. Tes progrès sont bons, mais tu as encore tendance à hésiter lorsque tu dois réellement t’appuyer dessus.
Sakura hocha gravement la tête, comprenant parfaitement ce qu’il voulait dire.
— Je comprends, répondit-elle avec détermination. Je suis prête.
Sans plus attendre, Madara activa son propre Sharingan, les trois tomoe parfaitement formés dans ses yeux. L’intensité de son regard augmenta immédiatement, et Sakura sentit instinctivement la pression familière que dégageait le puissant doujutsu de son mentor. Elle inspira profondément, laissant son chakra affluer naturellement vers ses propres yeux. Le monde autour d'elle devint soudainement plus clair, plus net, plus vivant.
Madara adopta une posture offensive, sa voix calme mais ferme résonnant dans la clairière.
— Anticipe mes mouvements. Ne laisse pas tes pensées te ralentir. Réagis avec ton instinct, fais confiance à tes yeux.
Il se lança vers elle avec une vitesse maîtrisée mais impressionnante. Sakura se concentra pleinement, analysant chaque geste, chaque variation subtile du chakra de Madara, cherchant à prévoir ses actions tout en essayant de répondre en conséquence. Les échanges devinrent rapidement plus intenses, chaque mouvement parfaitement calculé par Madara pour la pousser juste au-delà de ses limites sans jamais la submerger totalement.
Pourtant, malgré ses efforts, Sakura finit par perdre l’équilibre, trébuchant légèrement sous une attaque particulièrement rapide. Elle se retrouva au sol, essoufflée mais étrangement satisfaite de ses progrès.
Madara s’arrêta immédiatement, se penchant légèrement vers elle, son regard analytique détaillant sa posture et sa respiration.
— Mieux, déclara-t-il finalement avec un hochement de tête approbateur. Tes réflexes s’affinent, même si tu doutes encore trop souvent.
— Je sens ce que je dois faire, répondit-elle doucement, encore haletante. Mais mon corps ne suit pas toujours.
Un sourire discret étira à nouveau les lèvres de Madara, une expression presque indulgente qui lui était inhabituelle.
— C’est précisément pour cela que tu es ici, Sakura. Pour apprendre à harmoniser ton esprit et ton corps. La force du Sharingan ne réside pas uniquement dans tes yeux, mais aussi dans ta capacité à utiliser pleinement ce qu'ils te montrent.
Il lui tendit une main pour l'aider à se relever, un geste bref mais significatif venant de lui. Elle accepta silencieusement cette aide, se remettant debout et ressentant à nouveau cette étrange chaleur au creux de la poitrine, une émotion complexe et encore difficile à nommer.
— Merci, murmura-t-elle simplement.
Ils restèrent un instant silencieux, Madara semblant réfléchir à quelque chose d’important. Finalement, il reprit la parole, d’une voix plus basse mais tout aussi claire.
— Ce soir, le cercle de Kagami se réunit à nouveau. J’aimerais que tu sois là. Kagami pense avoir trouvé quelque chose d’important dans les rouleaux anciens, quelque chose qui pourrait te concerner directement.
La curiosité éveillée, Sakura hocha immédiatement la tête.
— J’y serai.
Il l’observa une dernière fois, son regard sombre semblant percer jusqu’à l’âme même.
— Je sais que tu seras à la hauteur, Sakura, murmura-t-il finalement avec une gravité inhabituelle. Ne doute jamais de cela.
Sur ces mots, il fit demi-tour pour rejoindre le campement, la laissant seule dans la clairière, le cœur battant étrangement vite. Ces paroles, si rares et précieuses venant de Madara, avaient un poids qu’elle ne pouvait ignorer.
La journée passa lentement, rythmée par les tâches quotidiennes du clan et ponctuée de moments paisibles que Sakura avait appris à apprécier. Après son entraînement avec Madara, elle retourna aider Naori et les autres femmes du clan aux tâches communautaires. Ces moments simples, loin de la pression des combats et des attentes guerrières, avaient pris une valeur précieuse à ses yeux.
C’était l’occasion d’apprendre autrement, d’observer, d’écouter, de comprendre comment le clan fonctionnait au-delà des champs de bataille.
Ce jour-là, elle participa aux préparatifs des herbes médicinales destinées aux guerriers blessés. Naori, toujours patiente, lui enseignait à distinguer les plantes bénéfiques des nuisibles, ainsi que leurs propriétés respectives.
— Cette plante, expliquait la femme en montrant une feuille verte pâle, apaise la douleur lorsqu’elle est broyée et appliquée sur les plaies. Elle réduit l’inflammation et accélère la guérison.
Sakura hocha la tête, mémorisant attentivement chaque détail, chaque nuance des explications de Naori. Alors qu’elle observait les gestes précis et confiants de la femme, une sensation étrange la traversa : un mélange d’amusement et de frustration, lié au contraste saisissant entre son esprit, qui maîtrisait parfaitement ces notions avancées de médecine, et son corps d’enfant, maladroit et inexpérimenté, qui peinait à les exécuter correctement.
En vérité, elle connaissait parfaitement chacune de ces plantes, leurs propriétés, leurs dangers, ainsi que les méthodes optimales pour les préparer. Ces connaissances provenaient de son ancienne vie.
Mais aujourd’hui, elle devait se montrer prudente, ne jamais révéler trop clairement cette maîtrise médicale inhabituelle chez une enfant de sept ans. Elle se contentait donc de poser des questions discrètes, de montrer juste assez de curiosité pour faire honneur à son esprit vif, tout en dissimulant soigneusement la véritable profondeur de son savoir.
— Cette fleur mauve, continua Naori en soulevant délicatement les pétales violets, apaise efficacement les fièvres, mais il faut doser très précisément. Trop peu, et l'effet sera nul. Trop, et elle devient toxique.
Sakura dut retenir un sourire nostalgique à cette explication familière. Elle connaissait parfaitement cette plante sous le nom d’aconit : elle l'avait utilisée d’innombrables fois pour soigner des shinobi blessés sur les champs de bataille, dans une autre époque. Pourtant, elle hocha simplement la tête, exprimant un intérêt calme mais attentif.
— Comment sais-tu exactement quelle quantité est suffisante ? demanda-t-elle doucement, gardant une innocence maîtrisée dans sa voix.
Naori sourit patiemment en la regardant.
— Par l’expérience, principalement. Et par le savoir que nous avons reçu de ceux qui nous ont précédés. L'art de la médecine est subtil ; il demande autant d’instinct que de connaissances.
Ces mots rappelèrent intensément à Sakura les enseignements de Tsunade. Combien de fois la Cinquième Hokage lui avait-elle répété exactement la même chose ? Que la médecine n’était pas simplement une question de technique, mais aussi d’instinct, d’écoute attentive, et d’expérience accumulée dans la douleur et l’effort.
— Je comprends, murmura-t-elle doucement en reprenant la préparation des herbes avec soin, ses gestes lentement plus assurés, reprenant un rythme presque naturel.
Pendant un court instant, elle laissa glisser une infime partie de son savoir, dosant instinctivement la préparation avec une précision qui impressionna discrètement Naori.
— Très bien, commenta la femme avec une pointe de surprise. Tu apprends vite.
Sakura détourna les yeux en souriant légèrement, consciente d'avoir approché trop près des limites de son secret.
— Tu sais, Sakura, reprit calmement Naori après un court silence, maîtriser ces plantes demande du temps et de la prudence. Mais cela te donne aussi une grande responsabilité : celle de protéger et de soigner. Ce savoir n’est pas moins important que les techniques de combat que tu apprends auprès de Madara-sama.
Sakura releva la tête, intriguée par l’éclat de sagesse tranquille dans les yeux de Naori. Elle acquiesça doucement, reconnaissant silencieusement cette vérité essentielle.
— Les guerriers se battent, poursuivit Naori, mais nous sommes celles qui les maintiennent en vie. Sans nous, le clan perdrait beaucoup plus que des batailles. Il perdrait son cœur.
Ces mots firent profondément écho en Sakura.
Dans sa vie précédente, elle avait combattu sur le front et avait tenu la vie de ses camarades entre ses mains. Aujourd’hui, elle retrouvait ce rôle de guérisseuse sous une forme différente, dans un contexte totalement nouveau. Mais la vérité fondamentale restait inchangée : le cœur du shinobi médecin était de préserver la vie, même au milieu des pires tourments de la guerre.
— Je comprends l'importance de ce que nous faisons ici, répondit-elle finalement d’une voix douce, mais étonnamment mature pour une enfant de son âge. Je ferai tout pour être à la hauteur de cette responsabilité.
Naori lui adressa un sourire chaleureux, chargé de respect et d’affection sincère.
— Je n’en doute pas, Sakura.
Lorsqu’elle quitta finalement la tente, Sakura sentit une paix étrange l’envahir. Même si elle devait cacher ses véritables compétences, ces moments lui permettaient de reconnecter silencieusement avec une partie essentielle d’elle-même : Sakura Haruno, disciple de Tsunade, shinobi médecin de Konoha. Et maintenant, Sakura Uchiha, apprenant à manier ce savoir dans l’ombre prudente des traditions d’un clan guerrier, tout en conservant l'équilibre subtil qui définissait désormais son existence.
Marchant lentement sous le soleil désormais haut dans le ciel, Sakura rejoignit Kaito près de la zone d'entraînement des archers, ressentant une douce sérénité née de ces moments ordinaires, mais profondément précieux. Elle savait qu’elle devrait continuer à dissimuler prudemment son passé et ses connaissances, mais désormais, cette nécessité lui paraissait moins lourde, compensée par la satisfaction tranquille de savoir exactement qui elle était, même si personne d'autre ne pouvait encore pleinement le comprendre.
Lorsqu’elle rejoignit Kaito près du terrain d'entraînement des archers, Sakura prit place silencieusement à ses côtés, observant Daichi avec admiration. Le jeune garçon tenait son arc avec une précision impressionnante, chacun de ses mouvements maîtrisés avec un calme qui contrastait avec son jeune âge.
— Daichi possède un don rare, remarqua calmement Kaito en la sentant arriver. Il a l’œil du faucon et la patience d'un sage. Avec le temps, il deviendra sans doute l'un de nos meilleurs tireurs.
Sakura acquiesça doucement, son regard toujours fixé sur Daichi. Elle savait, mieux que quiconque, que la force d'un shinobi ne se résumait pas uniquement aux techniques flamboyantes ou à la maîtrise spectaculaire du chakra. Parfois, la véritable puissance résidait dans la précision subtile, dans le silence d'une flèche bien tirée ou dans les gestes délicats d'un médecin soignant ses compagnons sur le champ de bataille.
— Daichi a aussi l’esprit calme, observa-t-elle finalement. Il ne laisse pas ses émotions prendre le dessus. C'est un atout précieux, surtout sur le champ de bataille.
Son père hocha lentement la tête, pensif.
— Tu as raison. Nous devons tous apprendre à contrôler nos émotions pour survivre. Mais parfois, les émotions peuvent aussi être une arme puissante, si elles sont bien dirigées.
Il tourna légèrement son visage vers elle, son regard pénétrant plongeant directement dans ses yeux.
— C’est quelque chose que tu apprendras avec Madara-sama. Il est l'un des rares à maîtriser parfaitement cette capacité : utiliser ses émotions sans jamais être dominé par elles.
Sakura sentit une étrange chaleur envahir sa poitrine à l’évocation de Madara. Depuis son arrivée dans ce passé lointain, leur relation était devenue plus complexe, évoluant lentement de maître et élève vers quelque chose de plus subtil, plus personnel, même si elle ne savait pas encore précisément comment le définir.
— Je ferai de mon mieux pour apprendre cette maîtrise, murmura-t-elle finalement, le regard tourné vers l’horizon lointain. Je sais combien elle est importante.
Kaito esquissa un léger sourire, une expression rare qui adoucissait subtilement ses traits habituellement sévères.
— Je n’en doute pas un instant, Sakura. Tu portes en toi une maturité qui dépasse de loin ton âge. C’est pourquoi les Anciens du clan te surveillent avec autant d’attention. Ils sentent instinctivement que tu n'es pas comme les autres.
Elle sentit son cœur s’accélérer légèrement à ces paroles, à la fois flattée et anxieuse. Sakura savait que Kaito n'avait aucune idée à quel point il avait raison. Personne ne pouvait imaginer à quel point elle était différente, combien son esprit recelait de connaissances et de souvenirs qu'elle devait constamment réprimer.
— Est-ce... un problème ? demanda-t-elle finalement, incapable de cacher totalement son inquiétude.
Kaito posa une main rassurante sur son épaule, sa prise ferme mais réconfortante.
— Pas du tout, répondit-il doucement mais sérieusement. Cela signifie simplement que tu as une responsabilité supplémentaire, une attente particulière à remplir. Mais tu n’es pas seule dans cette tâche. Ton mentor, tes amis, Naori, et moi-même, nous sommes tous là pour te guider.
Sakura sentit une émotion intense monter en elle face à ces mots simples mais puissants. Cette sensation d’appartenance, cette certitude d’être soutenue et protégée, était quelque chose qu’elle n'avait jamais pleinement ressenti dans sa vie précédente à Konoha. Là-bas, elle s'était souvent sentie en retrait, devant prouver constamment sa valeur aux côtés de Naruto et Sasuke. Ici, elle commençait à réaliser qu’elle pouvait être appréciée et reconnue pour ce qu’elle était déjà, sans avoir à se comparer constamment à quiconque.
Après quelques instants supplémentaires à observer les archers, Sakura sentit une présence familière s’approcher discrètement. Lorsqu’elle tourna la tête, elle vit Izuna s'avancer vers eux, son visage habituellement impassible marqué par une légère inquiétude.
— Kaito-san, Sakura, salua-t-il sobrement avant de s’arrêter à leurs côtés.
— Izuna-sama, répondit Kaito en inclinant légèrement la tête avec respect. Que pouvons-nous faire pour vous ?
Le jeune frère de Madara posa un regard hésitant sur Sakura, semblant choisir soigneusement ses mots avant de parler.
— Mon frère m’a demandé de te rappeler la réunion du cercle de Kagami ce soir, Sakura. Il souhaite vraiment que tu y assistes, précisa-t-il avec un sérieux inhabituel.
— J’y serai, assura-t-elle calmement, intriguée par la gravité qu’elle percevait chez Izuna. Est-ce que tout va bien ?
Il hésita encore, jetant un regard prudent vers Kaito avant de répondre lentement.
— Kagami-san a trouvé quelque chose d’étrange dans les rouleaux anciens. Quelque chose qui pourrait te concerner directement, Sakura. Mon frère estime que tu devrais absolument être présente pour entendre cela toi-même.
Cette révélation éveilla une vive curiosité en elle, mêlée d’une pointe d’appréhension. Elle échangea un rapide regard avec Kaito, percevant dans ses yeux une prudence qui faisait écho à sa propre inquiétude.
— Je comprends, murmura-t-elle finalement, sérieuse et déterminée. Je viendrai.
Izuna sembla soulagé par sa réponse, hochant brièvement la tête avant de tourner les talons pour repartir aussi discrètement qu’il était arrivé.
Lorsque Sakura reporta son attention sur Kaito, elle remarqua la lueur de préoccupation qui avait momentanément traversé son regard.
— Sois prudente, lui recommanda-t-il doucement, presque à voix basse. Les secrets anciens des Uchiha ne sont pas à prendre à la légère. Ils portent parfois des vérités difficiles à entendre.
— Je serai prudente, chichi, promit-elle sérieusement, percevant clairement la gravité de son avertissement.
La journée poursuivit alors son cours, rythmée par ces échanges silencieux et ces interactions ordinaires mais importantes. Sakura passa une grande partie de l’après-midi à jouer avec Hikari et Renji, profitant pleinement de ces moments simples où elle pouvait se comporter naturellement, sans se soucier des attentes ou des responsabilités pesantes.
Ce n'est que lorsque les ombres du soir s’allongèrent finalement sur le campement, plongeant progressivement le monde dans une pénombre douce, qu’elle prit congé de ses amis. Elle se dirigea alors lentement vers la cabane isolée où Kagami organisait discrètement ses réunions. En traversant le campement désormais silencieux, Sakura sentit son cœur s’accélérer légèrement, consciente de l’importance de ce moment.
Lorsqu’elle arriva enfin, elle trouva Kagami et Madara déjà présents, ainsi que quelques membres du cercle qu’elle connaissait bien. Kagami lui adressa un sourire chaleureux, contrastant avec la tension palpable dans l’air.
— Bien, nous sommes au complet, déclara-t-il finalement, invitant tout le monde à s’asseoir. Je suis désolé d'avoir provoqué tant de mystère autour de cette réunion, mais ce que j’ai découvert mérite notre attention la plus sérieuse.
Le silence attentif du petit groupe entourait Sakura, tandis que Kagami déployait lentement le rouleau ancien devant elle. À la lueur tamisée des lanternes, les symboles tracés à l’encre sombre semblaient prendre vie, leur mystère renforcé par la solennité respectueuse du moment.
Kagami prit finalement la parole, sa voix douce mais claire, empreinte d’une gravité sereine :
— Comme vous le savez déjà, la mémoire du sang permet à certains membres du clan de bénéficier d’un héritage subtil venu de leurs ancêtres. Cependant, ce passage apporte une nuance importante que nous n’avions pas encore découverte auparavant.
Un silence intrigué accueillit ses paroles. Sakura sentit les regards attentifs se poser sur elle, mais resta immobile, son visage calme dissimulant habilement son anxiété discrète.
Kagami poursuivit lentement :
— Selon ce texte, les individus dotés de cette mémoire ancestrale possèdent également un contrôle inné particulièrement fin de leur chakra. Ce contrôle naturel, hérité des ancêtres, permet un éveil précoce du Sharingan, sans forcément passer par le traumatisme émotionnel généralement nécessaire. En d'autres termes, l’éveil de leurs pupilles ne dépend pas uniquement de la douleur ou de la perte, mais aussi et surtout d’un équilibre instinctif parfait entre leur chakra et leurs émotions.
Madara écoutait avec une intensité calme, ses yeux sombres ne quittant pas Kagami. Lorsqu'il prit finalement la parole, son ton était posé et analytique :
— Cela expliquerait pourquoi Sakura a éveillé son Sharingan sans événement traumatique. Son contrôle avancé du chakra lui permet de canaliser naturellement ses émotions, créant ainsi les conditions idéales pour l’apparition précoce du doujutsu. Cela reste exceptionnel, mais ce n’est pas illogique.
Il tourna lentement son regard vers Sakura, l'observant avec attention, mesurant soigneusement ses mots :
— Cependant, ce contrôle inné ne signifie pas que ton potentiel soit illimité, Sakura. Il signifie simplement que tu bénéficies d’un avantage initial significatif. Cet avantage devra être cultivé et perfectionné par un entraînement constant. Le fait que tu sois douée naturellement ne t’exempte pas d'efforts. Au contraire, cela augmente les attentes placées en toi.
Sakura acquiesça avec sérieux, soulagée que l’on ne lui attribue pas un pouvoir irréaliste, mais consciente de la responsabilité accrue que cette découverte impliquait.
— Je comprends parfaitement, Madara-sama. Je ferai tout pour rester digne de cette attente.
Madara inclina légèrement la tête, approuvant silencieusement sa réponse. Son visage resta impassible, mais Sakura perçut malgré tout une légère satisfaction discrète dans son regard.
Kagami enroula délicatement le rouleau ancien avant de conclure d’une voix tranquille :
— Il nous reste beaucoup à comprendre sur les subtilités de cette mémoire du sang. Je suggère que Sakura continue à explorer cet aspect avec prudence, tout en gardant en tête que ce don ancestral, aussi précieux soit-il, n'est qu'une base sur laquelle elle devra construire activement ses compétences futures.
Les membres du cercle échangèrent quelques murmures approbateurs avant de se disperser lentement.
Sakura sentit son esprit s’apaiser peu à peu. La précision offerte par ce texte lui permettait désormais de mieux comprendre la particularité de sa situation sans pour autant révéler quoi que ce soit qu’elle préférerait encore garder caché.
Lorsqu’elle sortit finalement, accompagnée silencieusement par Madara, celui-ci ralentit légèrement son pas pour s’adresser à elle sans être entendu des autres :
— Cette découverte est importante, Sakura, mais rappelle-toi toujours que l’excès de confiance est le plus grand danger pour un shinobi talentueux. Ton contrôle naturel du chakra est une force, mais il ne remplace jamais l’expérience ni la discipline.
Elle hocha lentement la tête en réponse, consciente de la sagesse contenue dans ces paroles.
— Je ne l’oublierai pas, Madara-sama.
Sans rien ajouter, il disparut calmement dans la pénombre, la laissant seule face à cette vérité précieuse qu’elle venait de recevoir : son don n’était pas une fin, mais un commencement, un chemin à suivre avec prudence et humilité, sous le regard attentif et discret d’un mentor aussi exigeant qu’intrigué par elle.
Les semaines se succédèrent sans accroc majeur, s’écoulant lentement comme une rivière paisible sous un soleil doux. Après les révélations du rouleau ancien, la vie reprit son cours habituel dans le clan Uchiha, presque étrangement sereine malgré la tension silencieuse toujours présente au-delà des frontières.
Le printemps, puis l'été défilèrent tranquillement, teintant la vallée de couleurs vives, puis l'automne survint, déployant une toile de rouges et d’oranges sur les arbres alentours.
Pour Sakura, ces saisons qui s’écoulaient lentement offraient un précieux répit, un temps propice à la réflexion et au perfectionnement de ses capacités. Chaque matin, elle poursuivait rigoureusement ses entraînements avec son père, Kaito, qui se montrait désormais plus attentif que jamais aux progrès subtils de sa fille.
Leur relation, autrefois empreinte de réserves dues aux blessures du passé, devenait de plus en plus fluide et naturelle. Entre les exercices quotidiens de taijutsu, les leçons minutieuses sur le maniement des armes et les longues séances de méditation silencieuse, Sakura ressentait profondément cette complicité nouvelle, née du temps et du respect mutuel.
Parfois, alors qu'ils prenaient un bref repos, Kaito partageait avec elle ses souvenirs d'Hanae, sa voix calme et grave teintée d'une affection infinie pour sa défunte épouse.
— Ta mère avait toujours ce sourire tranquille, disait-il doucement, ses yeux fixés vers un horizon lointain. Peu importe ce qui arrivait, elle était toujours capable d’apporter de la paix à ceux qui l'entouraient.
Sakura l'écoutait attentivement, ressentant une chaleur discrète dans sa poitrine. Chaque récit, chaque souvenir partagé renforçait le sentiment profond d'appartenir véritablement à cette famille, malgré son secret et son identité d’autrefois. Ces moments intimes étaient précieux, renforçant le lien invisible qui unissait désormais père et fille.
Ses entraînements avec Madara prirent, eux aussi, un nouveau rythme plus subtil et introspectif. La distance rigide qui les séparait initialement devint moins marquée, remplacée peu à peu par une confiance mutuelle discrète mais profonde. Sakura percevait chez son mentor une forme de respect silencieux, teinté d’une curiosité réservée qu’il ne formulait jamais directement, mais qu'elle devinait à travers ses regards rapides et ses rares questions personnelles.
Lorsqu'ils s’entraînaient ensemble dans la clairière à l'écart du campement, elle sentait souvent l'attention silencieuse de Madara posée sur elle, évaluant chaque geste avec une précision presque clinique. Parfois, il interrompait les exercices pour lui prodiguer un conseil pragmatique, toujours prononcé avec son calme distant mais étrangement encourageant.
— Ton contrôle du chakra s'affine, notait-il sobrement, mais tu dois garder tes émotions sous contrôle. Une maîtrise excessive ne suffit pas. La stabilité émotionnelle est tout aussi cruciale.
Sakura accueillait ces conseils avec humilité, consciente de l’importance profonde que Madara accordait à l’équilibre entre force et sérénité. Elle apprenait de lui cette patience stratégique, cette manière subtile d’évaluer chaque situation sans précipitation inutile.
— Sakura, dit-il simplement un soir après une séance d’entraînements. Marche avec moi.
Elle hocha silencieusement la tête et le suivit à travers les allées du campement, la neige fraîche crissant doucement sous leurs pieds. Après quelques pas, il reprit calmement :
— Tajima-sama assistera à notre prochaine réunion diplomatique avec les Hagoromo. Il veut s’assurer personnellement que cette alliance potentielle ne nous expose à aucun danger caché. Cela signifie que ta présence sera également requise.
Sakura releva les yeux vers lui, surprise mais restant attentive, consciente de l’importance de cette décision :
— Tajima-sama autoriserait une enfant à assister à une réunion diplomatique de cette importance ?
Madara répondit d’une voix toujours aussi posée, sans se départir de son sérieux :
— Oui. J'ai plaidé ta cause auprès de lui, non parce que tu es différente, mais parce que tu comprends instinctivement les nuances subtiles des interactions. Tu sais observer, analyser, et retenir l’essentiel. C’est une qualité rare et précieuse, même parmi les adultes. Mon père l’a compris.
Elle hocha lentement la tête, touchée par cette reconnaissance discrète mais réelle.
— Merci, Madara-sama. Je ferai tout pour honorer cette confiance.
Il ralentit légèrement, se tournant vers elle avec une intensité discrète mais tangible :
— Je compte sur toi pour rester attentive, Sakura. Observe bien chaque détail, chaque mot prononcé, chaque geste. Les Hagoromo semblent sincères, mais la diplomatie est une guerre silencieuse où chaque erreur se paie durement.
— Je ferai attention, Madara-sama, promit-elle sérieusement. Je ne vous décevrai pas.
Ils poursuivirent en silence jusqu'à la maison de Sakura. À l’entrée, Madara s’arrêta brièvement :
— Bonne nuit, Sakura. Prépare-toi bien pour demain.
Sans attendre de réponse, il s’éloigna silencieusement, laissant Sakura réfléchir seule à l’importance des responsabilités qui lui incombaient désormais.
Les jours suivants, elle se prépara intensément à cette rencontre diplomatique. Elle passa beaucoup de temps avec Kaito, discutant longuement des traditions diplomatiques, des coutumes à respecter, et de la façon dont elle devait se comporter pour honorer à la fois le clan et l’éventuelle alliance. Kaito se montrait patient et rassurant, répondant calmement à chacune de ses questions, lui offrant une précieuse stabilité émotionnelle au milieu de cette pression grandissante.
Quand enfin la réunion arriva, Sakura ressentit une nervosité subtile mais profonde. Tajima était là, imposant et respecté, assis silencieusement à la tête du groupe Uchiha. À sa droite se tenait Madara, impassible et concentré, et derrière lui, Kaito et elle-même, observateurs silencieux et attentifs.
Les émissaires Hagoromo arrivèrent ponctuellement, s’installant calmement face aux Uchiha, visiblement tendus mais déterminés. Leur chef actuel, un homme au visage jeune mais marqué par les responsabilités récentes, prit lentement la parole :
— Notre clan souhaite remercier les Uchiha pour avoir épargné nos jeunes. Ce geste inattendu nous a montré que même au cœur de la guerre, il est possible de choisir une voie différente.
Tajima hocha lentement la tête, ne laissant transparaître aucune émotion :
— Votre ouverture à une alliance prouve votre bonne volonté. Mais comprenez que cette collaboration doit être solide, durable, et mutuellement profitable.
Madara poursuivit avec prudence :
— Notre geste passé était sincère. Mais une alliance nécessite davantage que de simples paroles. Il faudra établir une confiance solide.
Les échanges se poursuivirent avec calme, ponctués par les interventions précises et courtes de Tajima. Sakura, discrète, observait attentivement chaque réaction, chaque subtilité dans les regards échangés entre les Hagoromo et les Uchiha. Elle percevait clairement le respect profond que les Hagoromo portaient à Madara, dont l'acte d'épargner les enfants avait eu un écho bien plus important que prévu.
La réunion dura longtemps, jusqu’à ce qu’une entente provisoire soit établie. Tajima accepta une alliance prudente, conditionnée par plusieurs rencontres ultérieures, afin de bâtir lentement une confiance mutuelle. Aucun accord précipité, seulement un début prometteur.
Lorsqu’ils rentrèrent finalement au campement après le départ des Hagoromo, Sakura remarqua l’expression songeuse de Madara, qui semblait méditer silencieusement les résultats de cette rencontre.
— Êtes-vous satisfait du déroulement des négociations ? demanda-t-elle doucement alors qu’ils marchaient côte à côte sous un ciel sombre.
Il resta silencieux un instant avant de répondre calmement :
— C’est un début acceptable. Mais l’alliance reste fragile. Elle dépendra beaucoup de notre prudence et de notre capacité à gérer habilement chaque échange futur.
Il tourna légèrement la tête vers elle, son expression à la fois sérieuse et intriguée :
— As-tu remarqué quelque chose en particulier pendant la rencontre ?
Elle réfléchit un instant avant de répondre avec prudence :
— Oui. Ils vous respectent beaucoup, Madara-sama. Je pense que votre geste envers leurs enfants a eu un impact profond, peut-être même plus que ce qu’ils admettent ouvertement.
Madara acquiesça lentement, un léger sourire fugace et subtil apparaissant brièvement sur ses lèvres :
— Tu es observatrice. Ce respect est une arme à double tranchant. Il peut nous aider, mais il peut aussi devenir une faiblesse si nous nous reposons trop sur lui.
Elle hocha la tête en silence, comprenant parfaitement ce qu’il voulait dire. Madara appréciait clairement sa capacité à saisir rapidement ces subtilités diplomatiques, tout en restant prudent et vigilant.
La soirée s'acheva paisiblement. Sakura se glissa dans son lit avec l’esprit empli de réflexions profondes sur ce qu’elle avait vécu, mais également rassurée par cette nouvelle preuve de confiance de Madara envers elle.
Le temps continua ainsi à s’écouler lentement, rythmé par les entraînements quotidiens, les rencontres diplomatiques occasionnelles et les discussions avec son père et Madara. Chaque jour qui passait, Sakura grandissait, évoluait, apprenait un peu plus sur elle-même et sur les autres, consciente que chaque petit choix, chaque interaction discrète contribuait lentement à façonner son avenir et celui de tout le clan.
Et peu à peu, sans que ni elle ni Madara ne s'en rendent vraiment compte, leur relation prenait subtilement une dimension nouvelle : respectueuse, intriguée, mais aussi empreinte d’une affection profonde et réservée qui, lentement, silencieusement, commençait à prendre racine entre eux.
Quelques jours plus tard, Sakura fut à nouveau convoquée par Madara. Cette fois, ce fut Izuna qui vint la chercher alors qu'elle s'entraînait avec Kaito.
— Sakura, mon frère requiert ta présence immédiatement, annonça-t-il, son expression habituellement calme laissant transparaître une légère tension.
Kaito fronça les sourcils, essuyant la sueur qui perlait sur son front.
— Un problème, Izuna-sama ?
Izuna hésita brièvement.
— Rien de grave. Une délégation Hagoromo est arrivée plus tôt que prévu. Mon frère pense que la présence de Sakura serait... utile.
Sakura échangea un regard rapide avec son père, qui hocha imperceptiblement la tête. Sans un mot, elle suivit Izuna à travers le campement. Le jeune homme marchait d'un pas vif, sa posture reflétant une vigilance constante.
— Les Hagoromo semblent agités, murmura-t-il sans ralentir. Quelque chose s'est produit à leur frontière est. Ils parlent de mouvements suspects des Senju.
Cette information fit naître une inquiétude sourde dans l'esprit de Sakura. Si les Senju manœuvraient près du territoire Hagoromo, cela pourrait signifier qu'ils avaient découvert les négociations en cours avec les Uchiha.
Lorsqu'ils arrivèrent à la tente principale où se tenaient les réunions diplomatiques, Sakura perçut immédiatement l'atmosphère tendue qui y régnait. Tajima se tenait debout, imposant et sévère, tandis que Madara était assis face aux trois représentants Hagoromo. Parmi eux, elle reconnut leur chef, Hagoromo Ryusei, dont le visage habituellement composé affichait une inquiétude manifeste.
— Ah, la voici, dit simplement Madara en la voyant entrer. Sakura, viens t'asseoir.
Elle s'avança silencieusement et prit place à côté de lui, consciente des regards curieux que lui lançaient les Hagoromo. Il était inhabituel qu'une enfant soit invitée à participer à de telles discussions, mais personne ne remit en question la décision de Madara.
— Comme je le disais, reprit Ryusei en se tournant vers Tajima, nos éclaireurs ont repéré un groupe important de Senju se déplaçant à moins d'une journée de marche de notre village principal. Ce n'est pas leur route habituelle, et leur nombre est trop important pour une simple patrouille.
— Combien ? demanda Tajima, son visage impassible masquant parfaitement ses pensées.
— Au moins trente guerriers, peut-être plus. Dirigés par Tobirama Senju lui-même.
Sakura sentit un frisson la parcourir à la mention de ce nom. Tobirama, le frère cadet d'Hashirama, futur Second Hokage. Un stratège redoutable et un adversaire implacable des Uchiha.
— Intéressant, murmura Madara, son regard se posant brièvement sur Sakura. Pourquoi pensez-vous qu'ils se dirigent vers votre territoire ?
Ryusei secoua lentement la tête.
— Nous ignorons leurs intentions exactes, mais la coïncidence est troublante. Peu après le début de nos négociations avec vous, les Senju se rapprochent dangereusement de nos terres.
— Vous suggérez qu'ils ont eu vent de nos discussions ? intervint Tajima, sa voix teintée d'une méfiance à peine voilée.
Le chef Hagoromo leva les mains en signe d'apaisement.
— Je ne suggère rien de tel, Tajima-sama. Notre discrétion a été totale. Mais les Senju ont toujours eu des moyens mystérieux d'obtenir des informations.
Un silence tendu s'installa dans la tente. Sakura observait attentivement chaque visage, chaque geste. Elle remarqua que l'un des accompagnateurs de Ryusei, un homme plus âgé aux traits tirés, évitait soigneusement de croiser le regard des Uchiha. Son chakra fluctuait légèrement, signe d'un inconfort ou d'une nervosité qu'il tentait de masquer.
Sans réfléchir, elle activa discrètement son Sharingan pendant une fraction de seconde, juste assez pour percevoir plus clairement les variations subtiles du chakra de l'homme. Ce qu'elle vit confirma ses soupçons : son énergie portait les traces caractéristiques d'une personne ayant récemment subi un genjutsu.
Madara dut percevoir son léger mouvement, car il lui lança un regard interrogateur. Sakura inclina imperceptiblement la tête vers l'homme plus âgé, espérant que Madara comprendrait son message silencieux.
— Avant de discuter de notre réponse à cette situation, dit calmement Madara, j'aimerais m'entretenir brièvement avec mon père et Sakura. Si vous voulez bien nous excuser un instant.
Les Hagoromo acquiescèrent, bien que visiblement surpris par cette interruption. Tajima suivit son fils et Sakura à l'extérieur, son visage n'exprimant rien mais son corps tendu comme un arc.
— Explique-toi, exigea-t-il dès qu'ils furent hors de portée d'oreille.
— L'homme plus âgé, à la droite de Ryusei, a été soumis à un genjutsu récemment, répondit Sakura à voix basse. Son chakra porte encore les marques distinctives d'une manipulation mentale.
Tajima leva un sourcil, visiblement sceptique.
— Et comment peux-tu en être si sûre, enfant ?
— Parce qu'elle l'a vu avec son Sharingan, intervint Madara avant que Sakura ne puisse répondre. Et elle a raison. J'ai perçu la même chose, mais je voulais une confirmation.
Le chef du clan observa Sakura avec une attention nouvelle, comme s'il réévaluait sa valeur.
— Si c'est vrai, alors les Senju ont déjà infiltré les Hagoromo. Ils pourraient connaître chaque détail de nos négociations.
— Pas nécessairement, nuança Madara. Le genjutsu était subtil, probablement destiné à extraire des informations spécifiques sans que la victime ne s'en rende compte. Je doute que cet homme soit un traître conscient.
— Que suggères-tu ? demanda Tajima, son regard oscillant entre son fils et Sakura.
Madara réfléchit un instant avant de répondre.
— Nous devons maintenir l'alliance, mais avec une prudence redoublée. Si nous accusons les Hagoromo d'avoir divulgué des informations, nous perdrons leur confiance juste au moment où nous en avons le plus besoin.
— Et si c'était précisément ce que veulent les Senju ? intervint doucement Sakura. Créer de la méfiance entre nous et les Hagoromo?
Tajima et Madara se tournèrent vers elle, surpris par son intervention.
— Continue, l'encouragea Madara.
— Les Senju savent que vous avez épargné des enfants Hagoromo lors de votre dernière confrontation, expliqua-t-elle. Ce geste a changé la perception qu'ils avaient des Uchiha. Si Tobirama Senju est aussi stratège qu'on le dit, il pourrait chercher à saboter cette alliance naissante en nous faisant douter les uns des autres.
Un silence pensif suivit ses paroles. Tajima l'observait avec une expression indéchiffrable, tandis que Madara semblait méditer profondément sa suggestion.
— Une analyse intéressante, finit par dire Tajima. Que proposes-tu ?
Sakura prit une profonde inspiration, surprise qu'on lui demande son avis mais déterminée à ne pas décevoir cette confiance inattendue.
— Je pense que nous devrions renforcer l'alliance, pas la fragiliser. Proposons aux Hagoromo une protection immédiate contre la menace Senju, tout en envoyant nos propres éclaireurs vérifier leurs informations. Si nous montrons de la méfiance maintenant, nous ferons exactement ce que Tobirama espère.
Tajima et Madara échangèrent un long regard, communiquant silencieusement comme seuls un père et son fils pouvaient le faire. Finalement, Tajima hocha la tête.
— Nous procéderons ainsi. Mais, ajouta-t-il en se tournant vers Sakura, nous resterons vigilants. La naïveté n'a pas sa place dans la diplomatie.
Ils retournèrent auprès des Hagoromo, Tajima prenant les devants avec une assurance renouvelée. Sakura resta légèrement en retrait, aux côtés de Madara.
— Merci, murmura-t-il si bas qu'elle faillit ne pas l'entendre. Tu as vu ce que même mon père n'avait pas remarqué.
Elle inclina légèrement la tête, touchée par ce rare compliment.
— J'ai simplement observé, comme vous me l'avez appris.
Un sourire fugace traversa le visage de Madara.
— Tu apprends bien, Sakura Uchiha. Très bien, même.
La réunion reprit, Tajima proposant aux Hagoromo l'aide immédiate d'une escouade Uchiha pour surveiller les mouvements Senju. L'offre fut acceptée avec gratitude, et des plans concrets commencèrent à se former. Tout au long des discussions, Sakura resta silencieuse, observant attentivement chaque détail, chaque réaction.
Elle réalisait que ce moment marquait un tournant important. Pour la première fois, elle n'était plus seulement une élève ou une curiosité pour le clan. Elle était devenue une voix écoutée, respectée pour sa perspicacité plutôt que simplement tolérée pour son potentiel.
Et tandis que la réunion se poursuivait, elle se surprit à penser que peut-être, juste peut-être, elle commençait vraiment à influencer le cours des événements. Non pas comme une force étrangère imposant sa volonté, mais comme une partie intégrante du clan Uchiha, contribuant à façonner son destin de l'intérieur.
C'était un pas modeste, mais significatif, vers son objectif de changer l'avenir. Un avenir où les Uchiha ne seraient pas définis uniquement par la tragédie et la vengeance, mais peut-être aussi par la sagesse et l'alliance.
Lorsque la réunion prit fin, les émissaires Hagoromo quittèrent le campement Uchiha avec une escorte dirigée par Izuna, chargée de les raccompagner en sécurité et d'établir une première ligne de défense contre d'éventuelles incursions Senju. Sakura observa leur départ depuis l'entrée de la tente, ses pensées tourbillonnant comme des feuilles dans un vent d'automne. Elle sentait que quelque chose d'important venait de se produire, un point d'inflexion subtil dans la trajectoire du clan.
— Tu sembles préoccupée, remarqua Madara en s'approchant silencieusement d'elle.
Elle leva les yeux vers lui, surprise par sa perspicacité.
— Je réfléchissais aux implications de cette alliance, répondit-elle honnêtement. Si les Senju cherchent activement à la saboter, cela signifie qu'ils la considèrent comme une véritable menace.
Madara acquiesça lentement, son regard fixé sur l'horizon où les silhouettes des Hagoromo et de leur escorte disparaissaient progressivement.
— Tobirama Senju n'agit jamais sans calcul précis, dit-il d'une voix basse et grave. S'il se déplace personnellement, c'est qu'il considère cette situation comme prioritaire.
— Le connaissez-vous bien ? osa demander Sakura, curieuse d'en apprendre davantage sur cette relation complexe qui, dans sa ligne temporelle originale, avait tant influencé l'histoire du monde shinobi.
Une ombre passa sur le visage de Madara, trahissant une émotion profonde qu'il maîtrisa presque immédiatement.
— Assez pour savoir qu'il est aussi dangereux que brillant, répondit-il sobrement. Contrairement à son frère, il n'a jamais eu d'illusions romantiques sur la possibilité d'une paix entre nos clans.
Cette dernière remarque attira particulièrement l'attention de Sakura. C'était la première fois que Madara faisait directement allusion à Hashirama et à leur amitié passée devant elle. Elle hésita, puis décida de saisir cette rare ouverture.
— Son frère... Hashirama. On dit qu'il est différent des autres Senju.
Le regard de Madara se durcit légèrement, mais sa voix resta calme.
— Hashirama est... complexe. Un idéaliste au milieu d'un monde pragmatique. Il croit sincèrement que les Senju et les Uchiha pourraient un jour coexister pacifiquement.
— Et vous, qu'en pensez-vous ? demanda doucement Sakura, retenant son souffle après avoir posé cette question audacieuse.
Madara resta silencieux si longtemps qu'elle crut qu'il ne répondrait pas. Puis, avec un soupir presque imperceptible :
— Il fut un temps où je partageais cette vision. Mais la réalité nous a rattrapés tous les deux.
Il se tourna vers elle, son regard soudain perçant et intense.
— Pourquoi ces questions, Sakura ? Qu'est-ce qui t'intéresse tant dans ma relation avec les Senju ?
Elle déglutit, consciente qu'elle devait choisir ses mots avec une extrême prudence.
— Je cherche à comprendre, répondit-elle finalement. Vous m'avez toujours encouragée à observer, à analyser. Et je vois deux clans puissants qui se détruisent mutuellement depuis des générations, alors que séparément, ils sont déjà formidables. Ensemble, ils seraient... invincibles.
Une lueur étrange traversa le regard de Madara : surprise, nostalgie, peut-être même une pointe douloureuse de reconnaissance.
— Tu parles exactement comme lui, murmura-t-il, si bas qu'elle l'entendit à peine.
Il secoua légèrement la tête, comme pour chasser un souvenir importun, et reprit une expression plus neutre.
— La politique du clan est complexe, Sakura. Ce que nous désirons personnellement importe peu face aux siècles de sang versé et de vengeances accumulées. N'oublie jamais cela.
Sur ces paroles énigmatiques, il s'éloigna, la laissant seule avec ses pensées et ses espoirs prudents.
Cette brève conversation avait confirmé ce qu'elle soupçonnait déjà : le Madara qu'elle connaissait maintenant n'était pas encore l'homme amer et torturé qu'elle avait affronté dans sa vie précédente. Il y avait encore en lui cette étincelle qui avait un jour rêvé de paix aux côtés d'Hashirama.
Cette réalisation lui donna un regain d'espoir. Peut-être n'était-il pas trop tard pour influencer le cours des événements, pour empêcher que cette étincelle ne s'éteigne complètement.
***
Les jours qui suivirent furent marqués par une activité intense au sein du clan. Des patrouilles supplémentaires furent organisées, les entraînements s'intensifièrent, et même les enfants furent soumis à des exercices d'évacuation en cas d'attaque surprise. L'atmosphère au campement était électrique.
Un matin, alors qu'elle s'entraînait seule près de la rivière qui bordait le territoire Uchiha, pratiquant son contrôle du chakra en marchant sur l'eau, Sakura perçut une présence familière qui l'observait.
— Tu maîtrises remarquablement cette technique pour ton âge, commenta Kagami en sortant de l'ombre des arbres.
Elle sourit légèrement, continuant à maintenir sa concentration.
— Merci, Kagami-san. C'est un exercice que j'apprécie particulièrement.
Il s'approcha du bord de l'eau, l'observant avec attention.
— J'ai entendu parler de ton intervention lors de la réunion avec les Hagoromo. Repérer un genjutsu aussi subtil... peu d'adultes en auraient été capables.
Sakura haussa modestement les épaules, regagnant la berge d'un pas léger.
— Mon Sharingan m'a aidée, et puis Madara-sama l'avait également remarqué.
Kagami secoua lentement la tête, un sourire énigmatique aux lèvres.
— Madara-sama ne l'avait pas remarqué avant que tu ne le lui signales discrètement. Il me l'a confirmé lui-même.
Cette révélation la surprit. Pourquoi Madara aurait-il prétendu avoir vu le genjutsu avant elle ?
— Je ne comprends pas…
— Il te protège, expliqua simplement Kagami. Au sein du clan, certains Anciens s'inquiètent de tes progrès rapides, de ta perspicacité inhabituelle. En laissant croire qu'il t'a guidée vers cette découverte, Madara-sama apaise leurs craintes tout en reconnaissant ta valeur.
Sakura resta silencieuse, assimilant cette information. La politique interne du clan était encore plus complexe qu'elle ne l'imaginait, et Madara semblait y naviguer avec une subtilité qu'elle n'avait pas pleinement appréciée jusqu'à présent.
— Je viens te chercher pour une raison précise, reprit Kagami. J'ai besoin de toi au cercle d'étude aujourd'hui. J'ai trouvé un nouveau rouleau qui pourrait répondre à certaines de nos questions sur la mémoire du sang.
Sakura acquiesça immédiatement, curieuse de cette découverte.
— Je vais prévenir mon père et je vous rejoins.
— Kaito est déjà informé, sourit Kagami. Il nous rejoindra plus tard. Viens.
Ils traversèrent le campement jusqu'à la cabane de Kagami, où plusieurs membres du cercle étaient déjà rassemblés, dont Naori et l'Ancien Shinoru. Madara, elle le remarqua, était absent.
Kagami déroula précautionneusement un parchemin visiblement très ancien, sa surface jaunâtre craquelée par endroits. Les caractères qui y étaient tracés étaient différents de l'écriture moderne, utilisant un style archaïque que Sakura reconnut comme antérieur même à la fondation des grands clans.
— Ce rouleau, expliqua Kagami, provient d'une époque où le clan Uchiha n'existait pas encore sous sa forme actuelle. Il décrit les origines du Sharingan et certaines manifestations rares liées à ce don.
Il pointa un passage spécifique, les caractères à peine visibles sous la patine du temps.
— Ici, il est fait mention d'enfants nés avec une "âme ancienne" : des individus qui semblent posséder des connaissances qu'ils n'ont jamais apprises, des talents qu'ils n'ont jamais cultivés. Le texte suggère que ces âmes portent en elles l'expérience de vies antérieures, spécifiquement liées au clan.
Sakura sentit son cœur s'accélérer légèrement. Cette description correspondait étrangement à sa situation, bien que la vérité soit bien plus complexe qu'une simple réincarnation.
— Ces enfants, poursuivit l'Ancien Shinoru, étaient considérés comme des guides potentiels pour le clan, des ponts entre le passé et l'avenir. Mais ils étaient aussi vus comme des anomalies dont le destin était souvent... troublé.
— Que voulez-vous dire par "troublé" ? demanda Sakura, incapable de masquer totalement son inquiétude.
Shinoru échangea un regard avec Kagami avant de répondre :
— Le texte mentionne que ces âmes anciennes étaient souvent tourmentées par la dualité de leur existence — tiraillées entre ce qu'elles étaient et ce qu'elles savaient qu'elles devraient être. Cette tension pouvait parfois les mener à des choix... difficiles.
Un frisson parcourut l'échine de Sakura. La description résonnait trop profondément avec ses propres luttes intérieures, avec ce sentiment constant de naviguer entre deux identités, deux loyautés, deux destins.
— Et comment le clan les traitait-il ? demanda-t-elle d'une voix qu'elle s'efforça de garder neutre.
— Avec révérence, mais aussi avec prudence, répondit Kagami. Ils étaient considérés comme des atouts précieux, mais potentiellement imprévisibles. Le texte conseille de leur offrir guidance et protection, tout en surveillant attentivement leur développement.
Naori, qui était restée silencieuse jusqu'alors, intervint d'une voix douce :
— Ce qui nous amène à toi, Sakura. Nous pensons que tu pourrais être l'une de ces âmes anciennes. Ta maîtrise instinctive du chakra, ton éveil précoce du Sharingan, ta compréhension intuitive de concepts que tu n'as jamais étudiés... Tout cela correspond aux descriptions de ce rouleau.
L'atmosphère dans la pièce se densifia, tous les regards convergeant vers elle. Sakura sentit le poids de leurs attentes, de leurs espoirs, mais aussi de leurs inquiétudes. Cette explication — qu'elle était une "âme ancienne" portant les souvenirs d'une vie antérieure — était bien plus proche de la vérité qu'ils ne pouvaient l'imaginer, tout en restant fondamentalement inexacte.
— Je... je ne sais pas, répondit-elle finalement. Je me sens souvent différente, c'est vrai. Comme si je connaissais des choses que je ne devrais pas connaître. Mais je ne me souviens pas avoir vécu une autre vie.
Ce n'était pas techniquement un mensonge. Elle ne se souvenait pas d'une vie antérieure — elle se souvenait d'une vie future, ce qui était conceptuellement très différent.
Kagami sourit avec compassion.
— Nous ne nous attendons pas à ce que tu aies des souvenirs clairs, Sakura. Selon le texte, ces connaissances se manifestent plutôt comme des intuitions, des talents naturels, une sagesse qui semble déplacée chez quelqu'un de si jeune.
— Exactement comme ce que tu nous montres jour après jour, ajouta Naori avec douceur.
L'Ancien Shinoru se pencha vers elle, son regard intense mais bienveillant.
— Si notre théorie est exacte, Sakura, tu portes en toi une partie précieuse de l'héritage des Uchiha.
Une connaissance qui pourrait aider à guider notre clan vers un avenir meilleur.
Ces mots, prononcés avec une solennité respectueuse, touchèrent Sakura plus profondément qu'elle ne l'aurait cru possible. N'était-ce pas précisément ce qu'elle espérait accomplir ? Utiliser sa connaissance du futur pour guider les Uchiha vers un destin différent, moins tragique que celui qu'elle avait connu ?
— Je ferai de mon mieux, murmura-t-elle, sincèrement émue. Si je porte vraiment cette... sagesse en moi, je veux l'utiliser pour aider notre clan.
Kagami posa une main rassurante sur son épaule.
— Nous ne te mettons pas ce fardeau sur les épaules seule, Sakura. Nous sommes là pour t'aider à comprendre et à développer ce don. C'est pourquoi j'ai pensé qu'il était temps d'intensifier ton entraînement dans certains domaines spécifiques.
— Quels domaines ? demanda-t-elle, curieuse.
— Les techniques médicales avancées, pour commencer, répondit Naori. Tu as montré une affinité naturelle pour la guérison et le contrôle précis du chakra. Et puis…
Elle hésita, échangeant un regard avec Kagami qui compléta :
— Et puis les techniques de scellement. Les arts du fūinjutsu sont rares et précieux, même parmi les Uchiha. Mais ils pourraient être particulièrement adaptés à ton type de chakra et à ta... situation unique.
Le fūinjutsu — les techniques de scellement. Sakura connaissait leur puissance et leur complexité. Dans sa vie précédente, elle avait étudié les bases sous la direction de Tsunade, mais n'avait jamais pleinement exploré ce domaine. L'idée d'approfondir cette connaissance était intrigante.
— J'accepte avec gratitude, dit-elle simplement.
Le reste de la journée fut consacré à l'étude approfondie du rouleau ancien et à la planification de son nouveau programme d'entraînement. À mesure que les heures passaient, Sakura sentait grandir en elle un sentiment complexe — un mélange d'espoir, d'appréhension et de détermination renouvelée.
Cette théorie de "l'âme ancienne" lui offrait une couverture parfaite pour les connaissances qu'elle possédait, tout en lui permettant d'accéder à des enseignements qui pourraient véritablement l'aider dans sa mission.
C'était une opportunité inattendue, un cadeau du destin.
Quand elle quitta finalement la cabane de Kagami, le soleil se couchait déjà, peignant le ciel de teintes orangées et pourpres. Sur le chemin du retour, elle croisa Madara qui semblait l'attendre, adossé à un arbre, son expression indéchiffrable comme toujours.
— Kagami m'a informé de votre découverte, dit-il sans préambule. Et de votre décision concernant ton entraînement.
— Cela vous dérange? demanda-t-elle, soudain inquiète d'avoir peut-être outrepassé son autorité.
Madara secoua lentement la tête.
— Au contraire. Je l'ai approuvé. Les techniques médicales et le fūinjutsu correspondent parfaitement à tes aptitudes naturelles.
Il fit quelques pas vers elle, réduisant la distance qui les séparait.
— Mais je tenais à te dire personnellement que cet entraînement supplémentaire ne remplace pas nos sessions. Tu continueras à développer ton Sharingan et tes techniques de combat sous ma supervision.
— Bien sûr, Madara-sama, acquiesça-t-elle immédiatement. Je n'envisageais pas autrement.
Il l'observa un long moment, son regard scrutateur semblant chercher quelque chose dans ses yeux.
— Cette théorie de "l'âme ancienne"... qu'en penses-tu vraiment, Sakura ?
La question la prit au dépourvu par sa franchise directe. Elle choisit ses mots avec soin.
— Je pense qu'elle explique certaines choses que je ressens et que je ne comprends pas totalement moi-même. Cette impression constante d'être... différente. De voir plus loin, ou différemment.
Madara acquiesça lentement.
— J'ai toujours su que tu étais spéciale, Sakura. Dès notre première rencontre. Tu possèdes une sagesse qui dépasse de loin ton âge, une perspective que même certains Anciens n'ont pas.
Il fit une pause, semblant hésiter avant d'ajouter :
— Parfois, quand tu parles, j'ai l'impression d'entendre des échos d'une autre époque. D'un autre monde, peut-être.
Ces paroles firent naître en elle un sentiment étrange, mélange de peur et de profonde connexion. Se pouvait-il que Madara perçoive, même inconsciemment, une part de sa vérité ?
— Quel que soit le nom qu'on lui donne, mémoire du sang, âme ancienne, ou simple talent naturel, ce que tu possèdes est précieux, Sakura. Non seulement pour le clan, mais pour moi également.
Cette dernière admission, prononcée presque à contrecœur, la toucha profondément.
— Merci, Madara-sama, murmura-t-elle, incapable d'en dire plus tant l'émotion serrait sa gorge.
Il esquissa un geste léger, presque hésitant, comme s'il avait voulu poser sa main sur sa tête mais s'était ravisé au dernier moment.
— Va te reposer maintenant. Demain, nous reprendrons l'entraînement à l'aube.
Elle hocha la tête et s'éloigna vers la maison qu'elle partageait avec son père, le cœur étrangement léger malgré la complexité croissante de sa situation. Cette journée avait tissé de nouveaux fils dans la tapisserie de son existence au sein du clan Uchiha : des fils qui la liaient plus étroitement encore à ce passé qui, paradoxalement, représentait son avenir.
Et parmi ces fils, celui qui la reliait à Madara semblait désormais plus solide, plus brillant. Un lien qu'elle n'avait jamais anticipé, mais qui devenait progressivement central dans sa quête pour changer le destin.