Chapter 1: Arc de la résurrection - Chapitre 1 - Introduction
Chapter Text
TO KILL MY MAN
.
oOoOo ~ Arc de la résurrection - Chapitre 1 - Introduction ~ oOoOo
Ligne de Vie de Drago
Neville reprit sa respiration avec difficulté. Son souffle était court et irrégulier, ses poumons brûlaient à chaque inspiration. Son dernier sort avait encore glissé sur Celui-Dont-On-Ne-Doit-Pas-Prononcer-Le-Nom sans lui causer le moindre dommage.
Rien.
Le sorcier, en face, restait intact, presque amusé par ses tentatives désespérées.
Pourquoi n’arrivait-il pas à le vaincre ? Était-ce à cause de sa magie ? De sa faible constitution ? De son manque d’expérience, malgré toutes ces années de guerre ? Ou parce qu’il doutait constamment de pouvoir réussir ?
Mais il n'avait déjà plus le temps de réfléchir : il évita, d’un pas sur le côté, un sort de découpe et rangea vivement sa baguette pour agripper l'épée de Gryffondor. Le métal glacé mordit désagréablement ses paumes dès qu’il en serra la garde.
Il leva les yeux vers son adversaire, sentant la panique monter en lui. Il ne pouvait pas échouer. Pas encore. Pas quand tout le monde… comptait sur lui.
Dans un cri de rage (ou peut-être était-ce de l’impuissance), il se jeta en avant, l’épée brandie au-dessus de sa tête, prêt à frapper.
Mais son ennemi ne montra pas le moindre signe d’inquiétude. Il leva la main, lentement, et arrêta l’arme comme s’il ne s’agissait que d’un jouet. Le choc se répercuta dans tout le corps de Neville et la lame s’immobilisa dans les airs, bloquée par la seule force de Celui-Dont-On-Ne-Doit-Pas-Prononcer-Le-Nom.
L’enfant de la prophétie vacilla, puis perdit le peu d’équilibre qu’il lui restait. Avant qu’il ne touche le sol, le mage noir le saisit par le poignet, désinvolte, et le maintint debout, juste assez pour l’empêcher de s’effondrer.
Neville, désorienté, tenta de se dégager, mais la poigne glaciale le clouait sur place.
« Regarde-toi. » Murmura le Seigneur en approchant son visage pâle du sien. « Qu'est-ce que ça te fait de savoir que c’est grâce à toi que je vais gagner cette guerre ? »
Sa voix était basse et douce, mais chaque mot cinglait le jeune homme comme un fouet.
« Toutes ces morts... tout ce sang versé... C'est toi, Neville Longbottom. C'est ta faiblesse qui les a condamnés. En as-tu bien conscience ? »
Le cœur de Neville battait furieusement dans sa poitrine. Il voulait hurler, frapper, mais l’épée, si lourde dans sa main, paraissait soudainement si inutile… Chaque seconde lui échappait et le mage le regardait avec ce même mépris glacé.
Il n’avait pas besoin de parler : Neville savait. Pour lui, il n’était qu’un obstacle insignifiant. Un simple fétu de paille, vaguement agaçant. Rien de plus.
Il serra les dents et sentit ses yeux le brûler. La haine et le désespoir se mêlaient en lui. Il leva à nouveau l'épée, mais le Mage la repoussa paresseusement avant de le projeter brutalement au sol.
Neville vola en arrière avant de s'effondrer lourdement dans la boue. Il n'avait plus ni épée, ni baguette. Désarmé. Et peut-être voulait-il le rester. Peut-être espérait-il, à cet instant, que quelqu’un, n’importe qui, mette un terme définitif à cette humiliation.
Celui-Dont-On-Ne-Doit-Pas-Prononcer-Le-Nom le toisa de haut, une lueur sarcastique dans les yeux, et un sourire cruel étira ses lèvres.
« Je ne te tuerai pas, Neville Longbottom. Pas tout de suite. Plus tu vis et plus les autres perdent espoir... »
Neville resta là, assis dans la boue immobile, muet, le regard vide. Son esprit combatif venait d’être broyé. Il ne tenta même pas de se relever. Le poids de la défaite l’écrasait. L’épée lui avait échappé, sa magie lui échappait… tout semblait lui glisser entre les doigts.
Le mage, méprisant, tourna le dos à Neville, l'ignorant comme si le garçon n'était rien de plus qu'un insecte insignifiant, sans valeur. Sans un regard de plus, il s’éloigna, déjà prêt à se replonger dans le chaos du combat qui grondait autour d’eux.
L’Élu, figé, sentit un vide béant s’ouvrir en lui.
La bataille était perdue.
La honte le submergeait, le rongeait de l’intérieur. Son corps refusait de répondre. Le monde autour de lui semblait flou, distant. L'écho des explosions, les cris, tout se réduisait à un bruit sourd, indistinct.
Un éclair de lumière verte fendit l’air, droit sur lui, et Neville leva les yeux, figé, incapable de du moindre geste.
.
.~oOo~.
.
Drago le tira violemment à lui, l’écartant de justesse de l’Avada qui l’aurait fauché. Il gronda, les yeux rivés sur le champ de bataille en flammes.
« Sois plus attentif, Longbottom ! Tu ne peux pas te permettre de mourir ici ! »
Il dévia brusquement un nouveau sort qui filait dans leur direction.
Neville, les mains tremblantes, essuya la sueur de son front, abattu.
« J’y arrive pas. Tu vois bien que je ne peux pas le tuer ! »
« C’est toi l’Élu. Trouve une solution ou on va tous y passer ! »
« J’ai aucune solution, Malfoy ! Aucune ! »
Drago le saisit par le col et le secoua brutalement, les yeux flamboyants de rage.
« T’as eu Dumbledore comme tuteur toute ta scolarité. Mets en pratique ce que ce vieux fou t’a appris, abruti ! »
« Mais ça marche pas ! Rien ne marche ! » hurla Neville, hors de lui.
Drago le relâcha mollement. Ils étaient foutus.
Si même l’enfant de la prophétie était incapable de détruire le Mage Noir, alors personne ne le pourrait.
« Trouve moi. »
Un étrange murmure éthéré flotta jusqu’à lui.
Drago releva les yeux, les sourcils froncés.
« Quoi ? »
Il dévisagea Neville avec suspicion, mais celui-ci paraissait aussi surpris que lui.
« Quoi, quoi ? »
« Qu’est-ce que tu viens de dire ? »
« Que… rien ne fonctionne ? »
« Non, après. »
« Après ? » Neville semblait perdu. « Je n’ai rien dit. »
Drago scruta les alentours. C’était le chaos le plus total. Presque l’Enfer. Des éclairs de lumière jaillissaient de toutes parts, rythmés par le vacarme assourdissant des explosions qui éventraient la terre. Le sol était jonché de corps et de débris et les cris des blessés se mêlaient au sifflement des sorts. L'air, saturé de poussière et de fumée, devenu presque irrespirable, ondulait étrangement sous la chaleur des combats et du feu.
Il observa, d’un air morne, les derniers arbres de la plaine crépiter dans l’incendie. Devenir plus noir que le charbon.
Puis, du coin de l'œil, il aperçut un petit groupe s'avancer dans leur direction. En tête, marchant avec une assurance tranquille malgré la débâcle, se tenait Albus Dumbledore en personne.
Un rictus aigre étira les lèvres de Drago. Une délégation. Une putain de délégation…
Le vieil homme s’arrêta à leur hauteur et, sans un mot, tira une cape de sous sa robe. Il la jeta sur l’Élu.
Neville disparut aussitôt.
« Une cape d’invisibilité. », pensa Drago avec un certain mépris. Il en avait déjà entendu parler, bien sûr, mais n’avait jamais eu l’occasion d’en voir une à l'œuvre.
« Drago. » Le Directeur le salua poliment, comme s’ils n’étaient pas au beau milieu d’une guerre. Sa voix calme contrastait violemment avec le chaos environnant. « Nous allons nous replier. Je mets Neville en sûreté. Retrouve-nous plus tard, au QG de l’Ordre, d’accord, mon garçon ? »
Drago inclina vaguement la tête en réponse. Son regard suivit distraitement le petit groupe qui s’éloignait, lançant sorts sur sorts pour protéger l’Élu.
Le sauveur… qu’il fallait constamment sauver. Pitoyable.
Le sarcasme brûla en lui avec amertume.
Pour être tout à fait franc, il n’avait jamais vraiment apprécié Longbottom. Ce n'était même pas à cause de son appartenance à Gryffondor ; non, Drago connaissait des Gryffondors qui méritaient son respect. Hermione Granger par exemple.
Mais Neville… Neville manquait de charisme, de curiosité, de détermination. D’ambition. Il était maladroit, hésitant, un peu idiot, et bien trop sentimental.
Drago n’avait jamais compris comment un garçon aussi terne, aussi insignifiant, avait pu hériter d’un tel fardeau.
L’Élu… Ridicule.
Il secoua la tête, exaspéré.
Pas qu’il le déteste non plus, il ne fallait pas exagérer ; il ne l’avait jamais méprisé au point d’en nourrir une haine personnelle. Mais il ne pouvait s’empêcher de penser qu’il manquait en Longbottom ce ‘quelque chose’ qui aurait pu faire de lui un véritable héros. Il n’était pas le leader que l’on attendait. Il était terne. N’avait ni éclat, ni grandeur. Il manquait de flamboyance.
Bref, Neville n’était qu’un garçon frêle, perdu dans des vêtements de héros bien trop grands pour lui.
  Le Seigneur des Ténèbres, lui, en était l’exact opposé : puissant, captivant, orateur hors pair.
  
    
  
  Tous les sorciers avaient été témoins de son ascension, avaient vu son évolution lente mais inéluctable, décennie après décennie.
  
    
  
  Et, même vieil homme, ses troupes l’auraient suivi jusqu’au bout du monde, prêtes à obéir aveuglément, malgré sa violence et la peur qu’il inspirait.
  L’idée qu’il avait peut-être choisi le mauvais camp lui traversa l’esprit.
  
    
  
  Il se secoua aussitôt, comme un chien mouillé, pour chasser ce désagréable sentiment.
Un sortilège rouge entailla soudainement la chair de son bras. La douleur fut fulgurante. Drago étouffa un cri et roula sur le côté, s’abritant derrière un muret effondré. Son souffle, court et précipité, lui brûlait la gorge.
L’Ordre allait perdre cette bataille.
Poudlard serait perdu.
Il le sentait.
C’était un désastre, une déroute totale.
Ses doigts se crispèrent sur sa baguette. Il devait maintenant trouver un moyen de filer d’ici et de rester en vie.
Il risqua un coup d’œil par-dessus le muret et observa à la dérobée le champ de bataille : la plaine n’était plus qu’une mer d’éclairs lumineux.
Il se glissa hors de son abri et se précipita dans la mêlée. Il n’avait parcouru que quelques mètres lorsqu’un sort explosa violemment dans son dos. La douleur irradia dans sa colonne vertébrale et il s’effondra en avant, trébuchant sur les corps inertes.
Sa tête heurta douloureusement le sol et l’impact coupa sa respiration. Sa vision se brouilla et un bourdonnement assourdissant remplaça les bruits du combat, engloutissant tout.
Il grimaça.
Bouger.
Vite.
Il tenta de se relever, mais ses membres tremblants refusaient d’obéir. Son corps lui échappait. Il essaya de pousser sur ses mains, de se redresser : ses bras se dérobèrent sous lui et il roula un peu plus loin, dans la poussière. Un spasme de douleur traversa son dos, lui arrachant un râle de souffrance.
Son nez fut assailli par un désagréable mélange d’odeurs : le feu, le sang... et le pétrichor. Mais c’était impossible, n’est-ce pas ? Car le ciel était d’un bleu azur.
Les premières gouttes de pluie tombèrent sur sa peau et cette sensation inattendue le fit frissonner. Un instant, il crut perdre l’esprit ; le choc qu’il avait reçu avait peut-être déréglé tous ses sens ?
Il releva péniblement les yeux, cherchant à comprendre ce qui lui arrivait.
Autour de lui, les sorciers combattaient toujours avec la même fureur… mais quelque chose avait changé.
Il prit appui sur le sol et ses mains s’enfoncèrent dans une boue épaisse.
Qu’est-ce que… ?
Qu’est-ce qu’il était en train de se passer, bon sang ?
Il se redressa enfin et tituba un instant.
Ses cheveux, plaqués contre son front, ruisselaient sous la pluie battante.
Il sentit le poids d’un regard sur lui. Il leva la tête… et son souffle se coupa net.
  Devant lui se dressait une montagne.
  
    
  
  Une montagne qui, il en était certain, n’avait jamais été là.
Drago esquiva mollement un sort qui ne lui était pas destiné et avança d’un pas, incapable de détacher ses yeux des flancs escarpés de la montagne. Il n’y avait aucune végétation. Rien qu’un amas chaotique de roches tranchantes.
Son cœur manqua un battement.
Tout en haut, au sommet, une silhouette se découpait sur le ciel bleu : un homme, immobile, observait d’un air désintéressé le carnage qui se déroulait en contrebas.
Quelque chose remua en Drago : une sensation obscure, primitive, comme si une créature sauvage grattait à l’intérieur de ses entrailles, cherchant à se libérer.
Il plissa les yeux pour mieux voir et fut pétrifié. L’homme, jeune, avait les cheveux d’un noir plus profond encore que les ténèbres. Drago eut la certitude qu’il était en train de manquer quelque chose de capital. Une information, vitale, qui lui échappait.
Ce sorcier (car cela ne pouvait être qu’un sorcier, n’est-ce pas ?) lui était inconnu… et pourtant, il avait la troublante impression de l’avoir déjà vu, quelque part.
Leurs regards se croisèrent et Drago sentit une décharge traverser son corps. Deux émeraudes glacées, lumineuses, le fixaient désormais avec intensité.
L’homme lui sourit.
C’était un sourire froid.
« C’est lui ! » pensa le blond avec véhémence. « C’est lui qui va sauver le monde ! Pas Longbottom. Pas Dumbledore. Lui. »
Il ignorait d’où lui venait cette certitude, mais elle le submergea, fulgurante.
L'homme, au sommet, écarta lentement les bras, jusqu'à former une croix parfaite. Il resta ainsi une seconde, immobile, théâtral. Puis, sans un cri, sans la moindre hésitation, il bascula en avant et se jeta du haut de la falaise.
Le cœur de Drago s’emballa.
Il se précipita, instinctivement, les mains tendues vers l’avant, pour le rattraper avant qu’il ne s’écrase. Mais ses pieds glissèrent dans la terre meuble et ses doigts ne saisirent que le vide.
.
   
Chapter 2: Introduction - Ligne de Vie d’Harry
Chapter Text
.
oOoOoOo ~ Arc des Enfers - Introduction ~ oOoOoOo
Ligne de Vie d’Harry
.
Les ténèbres.
C’est tout ce qu’il me reste.
Ce n’est pas la nuit. La nuit a ses bruits, ses odeurs et la lune pour guide.
Ici, il n’y a rien de tout ça.
L’obscurité n’a ni fin, ni forme. Elle colle à ma peau, ronge mes pensées.
Au début, j’ai crié pour me prouver que j’existais.
Puis j’ai compté : les secondes, les battements de mon cœur, les souvenirs qu’il me restait.
Mais tout se dilue. Même les noms. Même les visages.
Je me rappelle avoir eu peur.
Mais maintenant que j’ai cessé de bouger, je suis vide et froid.
Je crois que je n’ai plus de corps. Ou qu’il s’est dissout.
Un jour, mes mains ne répondaient plus. Puis mes jambes. Puis mes paupières.
Il n’y a désormais plus rien à fermer. Plus rien à toucher.
Seule la faim est restée.
Sans bouche, sans gorge, elle me dévore. Elle s’étend, gratte, déchire.
Elle exige.
Elle veut remonter, là haut, à la lumière. Retrouver la chaleur de la chair et du monde.
Pour tout engloutir.
Pour les vider jusqu’au silence.
Jusqu’à ce qu’il ne reste plus rien.
.
  
     
  
Chapter 3: Extrait du journal de Severus S. - Entrée 1.
Notes:
(See the end of the chapter for notes.)
Chapter Text
.
oOoOo ~ Extrait du journal de Severus S. - Entrée 1. ~ oOoOo
.
Il paraît que je suis mort.
Ce n’est ni une métaphore, ni une envolée tragique. L’énoncer ainsi tient de l’absurde, puisque je suis, à cet instant précis, parfaitement vivant : mon pouls bat avec la régularité d’un métronome, mon sang frappe mes tempes, mes mains obéissent à chaque ordre. Comment un mort pourrait-il s’en rendre compte ?
Et pourtant… quelque part, dans une version de ce monde que je ne peux ni confirmer ni infirmer, Severus Snape a succombé à la morsure d’un serpent venimeux. Il a agonisé dans son sang, seul, et personne n’a levé le petit doigt pour lui venir en aide.
Dans ce même monde, Neville Longbottom n’est pas l’Élu et Lily Potter est morte avant d’avoir eu le temps de devenir autre chose qu’une jeune mère. Des affirmations qui, si elles sont vraies, réduisent en cendres tout ce que je croyais savoir.
Mais peut-être ne devrais-je pas commencer ce récit ainsi ; après tout, cela ne saurait résumer ma vie.
Je n’ose imaginer ce que vous espérez trouver en ouvrant ce journal, mais je vous en conjure, refermez-le avant de ne provoquer plus de torts encore que ceux qui ont déjà été causés.
Si vous souhaitiez obtenir ici des réponses à vos questions, ou un baume aux tourments de votre esprit torturé, alors laissez-moi vous dire que vous feriez-mieux d’aller piller un autre homme.
Vous persistez ? Fort bien. Mais que ce soit clair : ce que vous lirez ici n’est rien d’autre qu’un assemblage de souvenirs : ce que j’ai vu, ce que j’ai vécu, ce que l’on m’a confié… ou que j’ai arraché par la force.
Il est certain qu’il existe encore des secrets que j’ignore, des vérités qui m’échappent ; des choses qu’ils auront gardées enfouies, jusqu’au bout, et qu’ils n’auront jamais voulu divulguer.
Je n'ai aucunement la prétention de tout savoir.
Libre à vous de railler chaque mot ou de les graver dans votre mémoire. Moi, je parlerai de pardon et de trahison. De sacrifices absurdes. De rage et de haine inextinguibles. Car leur histoire (notre histoire) suinte l’égoïsme et le remords, l’oubli et la renaissance. Elle parle aussi de mort. Et d’amour, évidemment. De celui qu’on ne comprend qu’une fois qu’il est trop tard.
Il n’y a, ici, ni début, ni fin heureuse. Il y a seulement ce qui a été. Ce qui est. Peut-être, parfois, ce que j'aurais souhaité qu’il advienne.
Voyons, comment pourrais-je…
Peut-être devrais-je commencer ainsi : dans un placard, sous un escalier.
Non.
Non, vraiment pas. Cela serait mentir.
Disons plutôt que cette histoire commence par une épée, dégainée sur un champ de bataille et profondément enfoncée dans le torse de celui qui comptait le plus à ses yeux…
S.S.
.
   
Notes:
oOoOo ~ Mot de l’auteur à ses petits lecteurs préférés (oui, vous là) ~ oOoOo
.
Merci de lire To Kill My Man.
.
Il y a plus d’un an, j’avais commencé à la poster… puis j’ai tout jeté (sauf l’idée de base) pour tout recommencer. Rien ne me plaisait. Cette fois-ci, c’est la bonne. Ce sera probablement ma dernière fic avant un bon moment – juste de quoi vous faire patienter avant le reboot de la série Harry Potter.
.
Longueur de la fic
Vous vous êtes plaints que mes fics étaient trop courtes. (Un démon sort la tête d’un sac et commence à ricaner en frottant ses pattes griffues.)
Je vous ai entendus. Le seul problème, c’est que je ne sais pas faire dans la demi-mesure. C’est tout… ou rien. Vous aurez donc tout. Je suis désolée pour ça.
.
Le pitch
Imaginez un monde où Harry tue Drago.
Imaginez maintenant un autre monde où Harry Potter n’a jamais existé et où Neville Longbottom est l’Élu.
Enfin, imaginez qu’une porte s’ouvre entre ces deux mondes, les faisant s’entrechoquer, pour qu’une promesse vieille de mille ans puisse enfin être tenue.
->
TKMM, c’est l’histoire de ces âmes qui se croisent, se défient, se sauvent et se perdent. Une histoire de vengeance, d’aventure et de quête d’amour.
Les lignes temporelles se mélangeront peut-être un peu pour vous… mais pas de panique.
.
Les deux lignes narratives
• La ligne de Drago : POV Drago, dans un univers où Harry Potter n’existe pas. Ici, la guerre dure depuis des années et Tom gagne en puissance chaque jour. Jusqu’à une bataille où Drago croise un homme étrange, aux yeux verts, qui promet de débarrasser l’Angleterre de ses tyrans.
• La ligne d’Harry : plus proche des romans, sauf que Voldemort n’est pas mort aussi vite… et que Drago est devenu son bras droit.
.
Deux parties distinctes :
– La quête d’Harry pour ramener Drago à la vie, quitte à se damner aux Enfers.
– Le rapprochement inattendu entre l’Élu de la Lumière et le Bras droit des Ténèbres.
.
Intro de chapitre préférée :
La toute première fois qu’Harry avait revu Drago, il lui avait mis son poing droit dans la figure, puis il l’avait embrassé et…
Non. Attendez.
Il se mélangeait les pinceaux dans la chronologie. Comment ça s’était passé déjà ? Ils se détestaient, non ? D’ailleurs Drago avait… essayé de le tuer. Oui, c’était ça.
.
Les cycles et arcs narratifs
Pour que vous puissiez vous y retrouver, TKMM est découpée en plusieurs arcs, numérotés dans l’ordre du récit :
- Arc de la Résurrection – Drago
- Arc des Horcruxes – Drago
- Arc de la Reconquête de Poudlard – Drago
- Arc de la Roumanie – Drago
- Arc de la Bataille pour Poudlard – Drago
- Arc des Limbes – Drago
- Arc des Enfers – Harry
- Arc To Kill My Man – Harry
- Extraits du Journal de Severus S. – Severus
.
Le narrateur
Vous trouverez aussi des extraits du journal de Severus Snape, ainsi que des mini-résumés en début de chapitre, synthétisant en une ligne ce qu’il s’est passé précédemment.
.
Mise en garde & TW
• TW/TWS indiqués dans les titres (violence ou maturité).
• Rien de “gore” ou de traumatisant, mais certaines scènes peuvent heurter.
• Fic classée “M”/Explicite : couple principal Drarry. Si vous détestez, d’autres fanfictions vous attendent.
• Destinée aux +18 ans.
.
À propos de l’écriture
Cette fic est un divertissement, écrite sur mon temps libre. Rien de trop sérieux : on est là pour le fun et les émotions.
Vous pouvez l’abandonner en cours de route sans crainte de représailles.
Si je n’ai pas inclus certains personnages de la saga… c’est que je les ai oubliés. Les rajouter maintenant demanderait 200 chapitres supplémentaires, et croyez-moi, vous ne voulez pas ça.
.
Remerciements
Merci pour vos commentaires, likes et favoris. Ça me surprend toujours agréablement que vous lisiez mes vieilles histoires.
L’univers d’origine appartient à J.K. Rowling. Le reste est de Votre Serviteur.
(Je suis bavarde, déso-déso.)
.
Bien. Je crois n’avoir rien oublié. Vous êtes prêts ? Leeeeet’s gooo !
.
Chapter 4: Arc de la résurrection - Chapitre 2 - Drago et Hermione
Notes:
.
Le récap de Sev’
.
Précédemment dans - To Kill My Man -
.
Vous tenez entre vos mains le récit de morts, de mensonges, de décisions lamentables. Si vous cherchez du réconfort, fermez ce journal. Sinon, installez-vous : je vais vous raconter à quel point tout ceci a été… pitoyable.
L’Élu s’est encore fait piétiner par le Seigneur des Ténèbres. Albus Dumbledore l’a ramassé en vitesse pour éviter une nouvelle tragédie.
Sur le champ de bataille, un mystérieux inconnu hante Drago : peut-être trouvera-t-on enfin quelqu’un de compétent pour mettre fin à tout ce bazar ? À moins qu’il ne s'agisse d’une énième commotion cérébrale…
.
Chapter Text
oOoOo ~ Arc de la résurrection - Chapitre 2 - HG&DM ~ oOoOo
.
Ligne de Vie de Drago
.
« Malfoy ! »
Quelqu’un le plaqua violemment au sol et le blond eut à peine le temps d’apercevoir un sort mortel fendre l’air à quelques centimètres de son visage.
« Qu’est-ce que tu fous ? » C’était Hermione. Elle venait de lui sauver la vie. Il releva difficilement la tête vers la montagne, mais elle n’était plus là. Il n’y avait plus que la plaine du champ de bataille.
« La pluie… » maugréa Drago, désorienté. Pourtant, la terre sous lui était sèche, dure, fissurée et le soleil les baignait d’une terrible chaleur.
Il n’arrivait pas à détacher son regard de l’endroit d’où l’homme s’était jeté, mais il n’y avait désormais plus que le ciel vide.
Hermione le saisit fermement et le traîna avec elle à travers la plaine, zigzaguant entre les corps et les éclats lumineux des sortilèges. Elle tentait de le protéger tout autant qu’elle se protégeait elle-même.
« J’ai vu un homme… »
« Un homme, d’accord. » Grogna la jeune femme en érigeant un Protego autour d’eux, déviant de justesse un sort qui aurait pu les pulvériser.
Drago tourna la tête pour regarder derrière eux. Il hésita un instant : peut-être que le choc lui avait fait perdre toute notion de la réalité. Et pourtant… tout cela lui semblait terriblement familier. Il fit machinalement un pas sur le côté pour éviter un sort.
« Il y avait une montagne aussi. »
« Une montagne, oui… » répondit distraitement Hermione. Elle ne l'écoutait qu'à moitié, trop concentrée à arracher d’un coup sec la porte d’une vieille grange délabrée qui se trouvait devant eux.
Une fois ouverte, elle le poussa fermement à l’intérieur.
« Et il pleuvait. »
La jeune femme soupira en balayant la pièce du regard, visiblement à la recherche de quelque chose. Ses yeux se posèrent enfin sur un grand objet recouvert d’un voile grisâtre dans un coin poussiéreux de la grange. Elle s’approcha et tira rapidement sur le tissu, révélant un immense miroir à la surface usée et ternie par le temps.
Drago n’y porta que peu d’intérêt.
« Je connaissais cet homme. »
« Vraiment ? » Maugréa Hermione, d’un ton distant, tout en passant une main hésitante sur le cadre du trumeau pour en retirer la couche de poussière accumulée. Elle tapota méthodiquement les coins du miroir avec ses doigts, comme si elle savait exactement où toucher. La surface miroita un instant avant de retrouver un aspect plus net, plus stable.
   
« Oui… enfin, quand je dis que je le connaissais, je veux plutôt dire que je pense l’avoir déjà rencontré. » Il se parlait presque à lui-même, troublé.
« Ha bon. »
Le bras de la sorcière passa à travers la glace, comme s’il ne s’agissait que d’une fine couche d’eau. Un air satisfait éclaira son visage lorsqu’elle le retira.
« Viens ici. »
Drago la suivit sans y prêter attention et elle saisit fermement sa main, l’entraînant avec elle à travers le miroir. Le paysage autour d’eux se figea un instant, avant de tournoyer brutalement, comme s’il était emporté dans une tornade. Quelques secondes plus tard, tout redevint calme. Le monde se stabilisa à nouveau et la grange délabrée laissa sa place à une pièce sombre et exiguë.
Hermione poussa la porte et ils sortirent du placard dans lequel ils s’étaient retrouvés enfermés.
« C’est lui qui va tuer Tu-sais-qui. » Affirma Drago en dégageant brusquement sa main de celle de la jeune femme.
Elle se retourna vivement vers lui.
« Drago Malfoy. Je sais que tu n’aimes pas Neville. Je sais que vous n’avez jamais eu d’affinité et que vous êtes loin d’être amis. Mais tu sais parfaitement que c’est lui qui est destiné à… à tu sais quoi. C’est la prophétie qui… »
« Qui quoi, Granger ? » L’interrompit Drago d’une voix acide. « La prophétie n’a jamais été d’une grande précision quant à l’identité du Sauveur. Tu as bien vu, comme moi, que Longbottom est incapable de nous débarrasser de Tu-sais-qui. »
Hermione plissa le nez, visiblement contrariée.
« Il est né à la fin du septième mois… »
« Comme beaucoup d’autres ! » répliqua le blond avec un geste désinvolte du bras.
« Ses parents ont défié Tu-sais-qui ! »
« Et alors ? Tu crois que ce sont les seuls ? »
Hermione serra les dents, ses poings tremblaient légèrement. « Ils sont à Sainte Mangouste ! »
« Oui, et j’en suis désolé. Mais la guerre n’a épargné personne, Granger. Tu-sais-qui lui-même ne prête aucun intérêt à Longbottom, tu l’as vu aussi bien que moi, n’est-ce pas ? S’il le considérait comme une menace réelle, il aurait tout fait pour le tuer. Et crois-moi, il en aurait eu l’occasion. Il se contente de répondre aux attaques de Neville mais tu sais parfaitement qu’il n’y met aucune intention meurtrière derrière. »
« Mais… l’épée… »
« Quoi l’épée ? Celle de Gryffondor ? Mais peut-être que n’importe qui de votre maison peut la brandir. Pourquoi tu n’essayes pas ? Écoute, on n’appelle pas Tu-sais-qui le « Seigneur des Ténèbres » pour rien, Granger. C’est le sorcier le plus puissant depuis des décennies. Plus offensif même que Grindelwald. Sois sincère, juste une minute : tu penses sérieusement que Longbottom peut le vaincre ? »
Hermione se mordit les lèvres avec colère. Elle ne pouvait pas aller dans le sens de Drago, car reconnaitre que Neville était incapable de battre Voldemort signifiait les enterrer tous. Et puis quoi ? Malfoy avait aperçu un type mystérieux au sommet d’une montagne. La belle affaire. Pendant ce temps, elle, sur le champ de bataille, n’avait vu que Drago, le nez en l’air, en train de se transformer en une cible parfaite pour tous leurs ennemis. Rien d’autre.
Elle écarta les bras, exaspérée.
« Et donc, Malfoy, il est où, ton fameux sauveur ? Parce que tu vois, j’aimerais bien le rencontrer et lui dire deux mots. Alors si tu pouvais lui dire de ramener ses fesses ici, qu’on lui demande pourquoi il n’a pas pris part au combat, ou pourquoi il a mis 26 ans pour apparaître, ça nous aiderait beaucoup ! Mais en attendant, on va soutenir Neville et on va réfléchir tous ensemble à une stratégie pour récupérer Poudlard. »
Drago laissa échapper un rire méprisant. À force de glorifier Longbottom, de le protéger comme s’il n’était encore qu’un enfant, ils creusaient tous leur propre tombe. Ce garçon avait eu les meilleurs professeurs, l’attention indéfectible de Dumbledore et de l’Ordre, il avait été choyé, protégé, élevé sur un piédestal.
Et tout ça pour quoi ? Pour vingt-six années d’échecs consécutifs. Oh, bien sûr, il n’était pas faible, ses pouvoirs étaient dans la moyenne et personne ne pouvait nier qu’il avait essayé. Mais ça ne fonctionnait juste pas. Et à chaque nouvelle défaite, le monde sorcier s’interrogeait de plus en plus sur sa légitimité. Car Neville, malgré toute la bonne volonté du monde, n’avait jamais eu l’étoffe d’un véritable héros.
Hermione continuait de le fixer, attendant visiblement une réponse de sa part. Drago se braqua et fit un pas en arrière.
« Continue de t’illusionner avec Longbottom, Granger. Moi, je vais trouver cet homme. Et quand je l’aurai fait et qu’on aura sauvé le monde, alors tu pourras revenir en rampant demander mon pardon. »
.
Chapter 5: Extrait du journal de Severus S. - Entrée 7.
Chapter Text
. oOoOo ~ Extrait du journal de Severus S. - Entrée 7. ~ oOoOo .
.
D'aussi loin que je m'en souvienne, Drago n'avait jamais aimé les animaux. Et je dois dire, pour sa défense, que les animaux ne l'affectionnaient pas spécialement non plus. Je ne comptais plus le nombre de fois où, enfant, il était venu à moi en pleurant, griffé, mordu ou même piqué. Il avait beau faire tous les efforts du monde pour se montrer aimable avec eux, la seule chose qu'il récoltait était feulements ou grognements.
Quand l'adolescence l'avait trouvé, il avait fini par comprendre qu'il ne pourrait jamais bénéficier de ce lien privilégié et avait tout simplement laissé tomber. Dès lors, je ne l'avais plus jamais vu en train d'essayer de caresser un chien ou un chat et il avait aussi cessé de parler aux oiseaux et aux hérissons. J'ignore pourquoi il était reçu ainsi car il ne s'était jamais montré brutal ou tyrannique, mais je suppose que l'on doit admettre, parfois, que certaines choses ne s'expliquent pas.
La nature est ainsi faite.
Il avait beau m'affirmer que cela ne le touchait pas, qu'il préférait que tout reste ainsi car cela lui évitait la désolante désillusion de la vie éternelle, (Merlin, que ces bestioles ont la vie courte) il ne pouvait pourtant pas s'empêcher de jeter des regards à la dérobée, le corps toujours très droit, presque rigide, dès que l'un d'entre eux s'approchait.
J'aurai peut-être pu forcer le destin, à l'aide d'un impardonnable, pour enfin permettre à cet enfant de connaître la joie d'un amour inconditionnel, mais je savais que Drago ne me l'aurait jamais pardonné. Il avait peut-être désespérément besoin d'être aimé, mais il voulait l'être sans tricher. Il désirait qu'on l'apprécie pour ce qu'il était vraiment, au fond de lui, et pas à travers une illusion qui ne durerait que le temps d'un sortilège.
Aussi, je l'avais vu grandir, seul, sans attache, sans même qu'il sache ce qu'il avait bien pu faire de mal pour être ainsi rejeté. Et, au fil des années, son cœur d'enfant pourtant si tendre, s'était peu à peu refroidi.
S.S.
.
   
Chapter 6: Arc de la résurrection - Chapitre 3.1
Notes:
.
Le récap de Sev’
Précédemment dans - To Kill My Man -
Granger traîne Malfoy hors du champ de bataille : preuve que le monde est déjà en perdition. Ils débattent de la prophétie autour de Longbottom, Malfoy affirmant qu’un parfait inconnu ferait mieux l’affaire.
Charmante équipe, n’est-ce pas ?
Chapter Text
.
oOoOo ~ Arc de la résurrection - Chapitre 3.1 - DM & Chat ~ oOoOo
.
Drago se laissa tomber sur le lit, les bras en croix, et ce simple geste lui fit repenser à l’homme brun de son illusion. Il avait beau avoir fait le fier avec Granger, il ignorait totalement comment le retrouver et, plus le temps passait, plus il commençait à douter de ce qu’il avait vu.
Après tout, avec le stress du combat, la déconvenue de la défaite, l’incompétence de Longbottom, le sentiment d’urgence et d’inquiétude qui le rongeaient constamment depuis quelques années, il avait tout aussi bien pu rêver la scène.
Il devait peut-être se rendre à l’évidence : il n’y avait ni montagne, ni homme, ni pluie. Juste des sorciers qui s’entre-tuaient. Il était même possible que ça soit sa mémoire toute entière qui avait été altérée.
Peut-être que Granger avait raison et que Neville était le sauveur.
Si c’était vraiment le cas, ils étaient tous foutus.
Il soupira et posa un bras sur ses yeux. Il aurait dû partir quand son père le lui avait proposé. Finalement, la France, ce n’était pas si mal, non ? Ou même l’Italie ? N’importe où sauf ici.
Il soupira de nouveau.
Bon, peut-être pas littéralement n’importe où. Un pays civilisé si possible. C’est-à-dire un endroit tempéré où il pourrait facilement trouver du thé de qualité pour se désaltérer.
Ses pensées se brouillèrent et il sentit que le sommeil l’emportait.
Il fit un rêve étrange.
Un chat le regardait, il en était certain. Depuis combien de temps ? Impossible de savoir. Il ne l’avait pas entendu approcher, mais il sentait sa présence, silencieuse et pesante, comme si l’animal l’épiait depuis un très long moment déjà.
Il s’arrêta un instant, légèrement crispé, et la bête fit de même, quelques pas plus loin, en arrière. Drago se retourna brusquement et le chat détourna la tête, l’air indifférent, pour lécher consciencieusement sa patte et la passer derrière son oreille.
« Je ne suis pas idiot. » grogna le blond en lorgnant méchamment vers son poursuivant. « Vous pouvez arrêter votre petit spectacle. »
Le chat redressa lentement la tête. Ses pupilles fendues, froides, s’accrochèrent au regard acier du jeune homme. Puis il étira sa gueule, dévoilant une rangée de petites dents effilées et Drago frissonna de malaise.
C’était un sourire, n’est-ce pas ?
Ou quelque chose qui y ressemblait. À quoi avait-il donc à faire ? Un animagus ? Il n’en était pas tout à fait certain.
Il se détourna rapidement de l’animal, décidé à l’ignorer, et accéléra le pas, le cœur battant plus vite qu’il ne l’aurait voulu. Mais, quand il baissa les yeux, il vit que la bête trottait désormais à ses côtés.
« J’ai peut-être fait une petite erreur d’appréciation. »
Drago sursauta, marqua un pas de côté. Le chat venait de parler. Littéralement. Les chats ne parlaient pas. Aucun animal ne parlait. Les animagus non plus. Il déglutit et une sensation glacée coula au creux de son estomac.
À quoi diable avait-il affaire ?
Le chat bondit avec agilité sur un muret de pierre. Ses yeux, d’un jaune perçant, étaient braqués sur lui.
« Ne l’écoute pas, Petit. Ça ne ferait que t’attirer des problèmes. »
Drago haussa un sourcil. Il ne comprenait pas : de quoi exactement étaient-ils en train de parler ? Il sentit l’agacement poindre en lui.
« Qu’est ce que vous êtes, au juste ? Et qui est-ce que je ne dois pas écouter ?»
Le chat ne répondit pas, mais sa queue fouetta l’air avec force.
« J’ai été trop laxiste. Aucun vivant ne devrait atteindre le Neuvième Cercle. »
Un chat qui parlait, c’était déjà bien assez. Mais un chat qui lançait des avertissements vagues et cryptiques ? C’était beaucoup trop. Il sentait que la migraine allait bientôt pointer. Il saisit l’arête de son nez entre ses doigts et soupira avec lassitude.
« Stop. Stop, je vous en prie. Si vous voulez vraiment que je comprenne quelque chose, il va falloir être plus précis. C’est quoi, cette histoire de neuvième cercle ? Et c’est qui, cette personne que je ne suis pas censé écouter ? »
L’animal le toisa longuement, en silence. Il resta un moment sans bouger, comme s’il pesait ses mots, ou peut-être ses propres motivations.
« Ce garçon essayera de te contacter. Il va forcément le faire. Pour que tu l’aides. Mais tu ne dois pas l’écouter. Jamais. Il n’apportera ici que le chaos. »
« De qui parlez-vous ? »
Les vibrisses du chat frémirent et Drago eut l’impression que la réponse, à ses yeux, était d’une douloureuse évidence.
« Du garçon. De celui qui a franchi le Neuvième Cercle. »
« Un sorcier ? »
« Il n’est plus tout à fait sorcier. Il n’est plus tout à fait humain. Il est celui qui n’est plus ni vivant, ni mort. »
« Comme un zombie ? »
Le chat se redressa, yeux plissés et oreilles légèrement rabattues en arrière. Manifestement, la remarque l’avait agacé et Drago préféra prudemment changer de sujet.
« Pourquoi essayerait-il de me contacter, moi, et pas un autre ? »
Le chat ne répondit pas immédiatement. Il se contenta d’observer Drago, le regard fixe, sans ciller, comme pour le jauger. Ses yeux renvoyaient un éclat glacé qui n’avait rien d’animal.
« Il ne doit pas traverser. En aucune manière. »
« Et pourquoi vous ne l’en empêchez pas vous-même ? Vous avez l’air de savoir exactement ce que je dois ou ne dois pas faire.»
Le chat poussa un soupir, un son étrange qui ressemblait davantage à un râle las qu’à un véritable soupir humain. Il détourna le regard.
« Nous sommes des observateurs. Nous ne pouvons pas… jouer comme nous le voulons dans le monde des vivants. »
Drago hocha vaguement la tête, pensif. Il n’avait toujours qu’une vague idée de ce dont il était question, mais quelques bribes du puzzle commençaient à s’assembler. Quelque chose… s’était échappé de… quelque part et essayait d’entrer dans leur monde.
Un garçon.
L’image de l’homme au sommet de la montagne fusa dans son esprit. Était-ce lui, celui dont parlait le chat ? Mieux valait ne rien dire de ce qu’il avait vu, plus tôt, sur le champ de bataille.
« Et pourquoi veut-il passer ? »
Le chat leva une patte et la passa lentement derrière son oreille, l’air détaché.
« Parce qu’il est malheureux et qu’il cherche une façon de l’oublier. Mais ne te méprends pas, il n’est pas celui que tu attends. »
L’ombre d’un sourire amer passa sur le visage de Drago.
« Alors qui est-il ? »
Le chat ne répondit pas.
.
.

Chapter 7: Arc de la résurrection - Chapitre 3.2
Notes:
Le récap de Sev’
Précédemment dans - To Kill My Man -
Malfoy rêve d’un chat bavard qui lui interdit de parler à un certain ‘garçon du Neuvième Cercle’. Je suppose que c’est ce qu’on appelle un avertissement… ou un diagnostic précoce d’instabilité mentale.
Chapter Text
oOoOo ~ Arc de la résurrection - Chapitre 3.2 - DM & Styx ~ oOoOo
.
Un étrange clapotis le tira lentement du sommeil.
Quelque chose gouttait régulièrement dans son appartement. Dans la chambre. Non. Dans SA chambre.
Drago ouvrit brusquement les yeux et sa respiration se suspendit un instant dans sa poitrine. Il tendit l’oreille et n’entendit que le battement rapide de son sang qui résonnait à ses tempes.
Il se redressa lentement, balayant la pièce du regard, et l’ombre d’un malaise serra son estomac.
Personne.
Tout cela lui laissait une curieuse impression : chaque recoin paraissait étrangement assombri, comme si la lumière elle-même s’était retirée des murs et du plafond. Et cette désagréable sensation de froid et d’humidité ne le quittait pas.
Il se demanda un instant s’il n’était pas encore en train de rêver.
Quand ses pieds touchèrent le sol, il sursauta ; le parquet sous lui était détrempé, glacé et une fine pellicule d’eau lui colla aux orteils. Elle s’étalait sous la plante de ses pieds, froide comme une mare gelée.
Il regarda autour, cherchant la source de l’inondation : l’eau venait bien de quelque part et il devait trouver d’où.
Il se mit debout et frissonna désagréablement quand le froid s’enfonça sous sa peau, le traversant jusqu’aux os. Il laissa son regard courir sur les plinthes, remontant lentement le long des murs, à la recherche d’une fissure ou de n’importe quoi qui aurait pu être la source de ce désagrément.
C’était un tableau.
Une vieille peinture à l’huile craquelée suspendue en face de lui. Elle représentait un cours d’eau sombre, avec des vagues grises, un ciel lourd chargé de nuages d’encre. Quelque chose coulait lentement du bas du cadre : une traînée d’eau noirâtre, épaisse, presque gluante, qui glissait le long du mur avant de rejoindre le sol.
Il s’approcha, les sourcils froncés. Il en était certain : le froid intense, qui régnait dans l’air comme une brume glaciale, enveloppait cette peinture-là.
« J’ai l’impression d’être au fond d’une grotte humide et profonde. » Pensa Drago avec perplexité en voyant sa respiration former un nuage de buée devant lui.
Il ne ressentait pas de peur, non. C’était un sentiment plus complexe que cela. Presque comme… une nostalgie lointaine, enfouie, qui ne semblait rattachée à aucun souvenir précis. Une émotion ancienne, comme si quelque chose, venu de quelque recoin oublié de sa mémoire, essayait de remonter à la surface.
Il chassa rapidement cette pensée d’un geste agacé du bras : n’importe quoi. Nostalgique de quoi, d’abord ?
Il soupira, puis laissa une main hésitante passer sur le cadre de bois terni. Ses doigts en frôlèrent la surface humide et il sentit des gouttes s’en échapper, ruisselant contre sa peau. Le bois était désagréablement froid, comme s’il avait été laissé dehors sous la pluie durant des années, absorbant l’humidité jusqu’à devenir poreux, fragile.
C’était impossible.
Il recula d’un pas, l’esprit embrouillé.
Son premier réflexe fut de sortir sa baguette et de lancer un sort pour interrompre cette inondation. Il serra fermement le manche en bois dans sa paume, puis l’agita en marmonnant un sortilège de verrouillage.
Une lueur bleutée s’échappa de la pointe pour se disperser sur la toile en une fine pellicule lumineuse. Il retint son souffle, espérant voir le suintement s’interrompre, mais rien ne se produisit : l’eau noire continuait de couler sinistrement hors du tableau.
Frustré, il fronça les sourcils et intensifia son geste. La lumière se fit plus vive, projetant des reflets irisés sur le sol trempé.
Pourtant, rien ne changea et il observa, impuissant, cette infiltration qui défiait sa magie.
Un bourdonnement indistinct emplit soudain l’air autour de lui. C’était un son étrange, irrégulier, comme le ressac lointain d’une vague qui viendrait s’écraser sur un rocher, ou peut-être le froissement d’un tissu battu par le vent.
« C'est l'eau du Styx. » Murmura une voix grave dans son esprit.
Drago fronça les sourcils, tendant l’oreille. Ses yeux étaient rivés sur le mince filet d’eau qui continuait de s’écouler sans discontinuer. Le timbre était trouble, difficilement audible, comme s’il écoutait les fréquences froissées d’une vieille radio, et il dut se concentrer pour pouvoir tout saisir.
« Récupères-en un peu. Tu en auras besoin plus tard. »
Il se figea. Ses doigts engourdis étaient toujours posés contre le cadre du tableau. Le Styx ? Le fleuve des Enfers, le passage des âmes ? Un nouveau frisson le parcourut. Le Styx n’était qu’un mythe. Rien qui puisse réellement se manifester ici, dans sa chambre.
Et pourtant…
Son cerveau tournait à cent à l’heure. Il repensa à son rêve. Au chat. Au garçon malheureux qui essayait de passer.
Un étrange pressentiment monta en lui, si violent qu’il en eut la nausée : il ne savait pas pourquoi, mais il sentait que tout était lié.
Il fit brusquement demi-tour et se précipita vers ses sacoches de potionniste (un cadeau de Severus). Il les fouilla frénétiquement pour en extraire une petite fiole transparente qu’il inclina précautionneusement contre le tableau. Le filet d’eau, qui glissa le long du goulot, crépita au contact du verre, émettant de minuscules éclats sonores, comme une multitude d’étincelles froides.
Quand il estima en avoir assez, il scella méticuleusement le flacon, pressa fermement le bouchon de son pouce et ajouta un sort supplémentaire, juste pour la sécurité.
« C’est bon. » murmura-t-il d’une voix rauque. « Qu’est-ce que je dois faire maintenant ? »
Mais seul le silence lui répondit.
.
~oOo~
.
« Ça doit venir des tuyaux. C’est un vieux bâtiment. »
Hermione croisa les bras, mais son regard, qui passait de la peinture au plafond, trahissait son scepticisme. Elle fronça les sourcils, scrutant la moindre fissure, cherchant désespérément un point d’origine logique. Pourtant, Drago pouvait deviner qu’elle ne croyait pas un mot de ce qu’elle disait.
Il s’enfonça un peu plus dans son fauteuil. Ses doigts tambourinèrent lentement sur l’accoudoir et il lança un regard morne à la jeune femme.
« Ça ne venait pas des tuyaux, Granger, tu le vois aussi bien que moi. »
Elle pinça les lèvres mais ne répondit pas. Son regard se perdit de nouveau vers le plafond, comme si, en l’observant suffisamment longtemps, le mystère allait se résoudre par lui-même.
Drago détourna le regard : devant eux, un elfe de maison, une vieille serpillière en main, essuyait la mare glacée qui s’étalait en une large flaque argentée sur le parquet. Ses petits pieds nus glissaient sur le bois verni et il épongeait l’eau d’un air concentré, ne se permettant aucun commentaire.
Il l’observa un instant en silence, les mâchoires crispées, avant de laisser échapper un murmure agacé.
« Je peux dire adieu à mon parquet… »
Ses doigts effleurèrent distraitement le bois, comme pour estimer l’étendue des dégâts, puis il croisa les jambes et un pli contrarié barra son front.
Hermione haussa un sourcil, visiblement peu touchée par les préoccupations du jeune Lord. « Tu aurais pu le faire toi-même, Malfoy. »
Drago releva lentement les yeux vers elle et son regard acier se planta dans celui de la jeune femme.
« Quoi ? »
Elle haussa sèchement les épaules.
« Nettoyer tout ça. Tu aurais pu le faire toi-même. »
Un sourire méprisant arqua les lèvres du jeune homme.
« Pour quoi faire ? D’autres s’en chargent très bien à ma place. » Il héla d’une voix traînante l’elfe qui s’activait avec empressement dans sa chambre. « Hé ! Toi ! Tu veux te plaindre de quoi que ce soit ? »
La petite créature se figea instantanément, la serpillière arrêtée à mi-course, et ses yeux s’agrandirent d’inquiétude.
« Oh, non ! Monsieur ! Snagglesnap est très heureux ainsi. Snagglesnap aimerait que, chaque jour, les appartements de Monsieur soient inondés pour qu’il puisse les nettoyer de fond en comble ! » Sa petite voix tremblait légèrement, comme s’il craignait que ses paroles soient mal interprétées.
Hermione roula des yeux, l’air exaspéré, et lâcha un murmure à peine audible.
« N’importe quoi. »
Drago plaça paresseusement son menton sur la paume de sa main, vaguement moqueur.
« Snagglesnap ? Qu’est-ce que c’est que ce nom encore ? Tu as assemblé des lettres au hasard pour le trouver ? »
L’elfe émit un petit grincement qui ressemblait étrangement à un rire, bien que le son soit étrangement aiguë.
« Pas du tout, Monsieur. Ce sont Snigglet et Grumblesnap, les parents de Snagglesnap, qui l'ont nommé ainsi. »
« Ha ? Les elfes de maison ont eux aussi un système parental ? Je croyais qu’ils se formaient dans les amas de moisissures. »
À vrai dire, il se fichait éperdument de la filiation des elfes de Maison, mais Granger, derrière lui, retint un soupir agacé, visiblement en proie à une impatience qu’elle tentait (affreusement mal) de masquer. Aussi, Drago prenait un malin plaisir à la provoquer, sachant pertinemment que chaque mot méprisant l’irriterait davantage.
Snagglesnap, cependant, ne sembla pas le moins du monde affecté par la remarque du sorcier. Il essora la serpillière avec un remarquable professionnalisme et l’eau s’écoula en un fin filet dans le seau.
« Pas du tout, Monsieur. Nous sommes simplement un peu plus liés aux pouvoirs de la Terre que vous autres humains. Cela mis à part, la conception et la naissance des Elfes se déroulent presque comme chez vous. Je peux vous donner plus d’explications, si vous le souhaitez. »
Une image désagréable sembla traverser l’esprit de Drago, car il grimaça violemment avant de renifler avec mépris.
« Est-ce que je t’ai demandé des détails, Snagglemachin ? »
« Ça suffit. » La voix tranchante d’Hermione arrêta subitement le débat. « Est-ce qu’on pourrait revenir au problème qui nous a tous amenés ici ? »
Drago haussa nonchalamment les épaules. D’un geste mou de la main, il désigna la toile accrochée au mur, son regard blasé fixant le tableau.
« L’eau venait de là. » répéta-t-il, comme si l’évidence ne méritait aucune discussion.
Hermione soupira avec exaspération et fronça à nouveau les sourcils.
« Drago, je t’en prie. Oui, les peintures sorcières bougent, mais… ce ne sont que des impressions, des images. Rien ne peut en sortir, rien ne peut y entrer. L’eau… ne peut pas venir de ce cadre. »
Ses yeux se posèrent sur le tableau, toujours déformé et craquelé, comme si l’humidité l’avait rongé de l’intérieur.
L'inondation avait cessé peu de temps après que le sorcier eut récupéré l'eau dans sa fiole. Plus rien ne coulait maintenant, comme si la source de cette anomalie s’était tarie. Ne restaient que le sol suintant et quelques traces encore visibles sur le mur, juste sous la peinture, indiquant précisément d’où le débordement avait commencé.
Hermione observa longuement les coulures et son visage s’assombrit.
« Ou alors… C’est quelqu’un qui te fait une blague ? »
« Une blague ? » Drago leva les yeux au ciel. « Rappelle-moi pourquoi je t’ai fait venir, au juste ? Si c’est pour me sortir des théories de ce genre, je préfère encore être en tête à tête avec cet elfe. » Il lança un coup d’œil en direction de Snagglesnap.
L’Elfe tressauta et un léger rosissement colora ses joues.
Hermione pinça les lèvres et répliqua sèchement :
« Je dis juste que ça pourrait être une illusion, un sortilège destiné à t’effrayer. Quelqu’un pourrait vouloir te faire perdre tes moyens. »
Il lui jeta un regard indifférent. « Oui, bien sûr. Les blagues magiques qui transforment ta chambre en marécage, c’est à la mode. Un vrai délice. Et pour info, Granger, je n’étais pas effrayé. Je ne suis plus un enfant de cinq ans. Ce que je voudrais savoir, par contre, c’est comment c’est arrivé. »
Hermione soupira, agacée, et passa une main sur son front.
« D’accord, admettons que ce n’est pas une blague. Tu es content ? Mais écoute, Malfoy, si ce que tu dis est vrai et que cette peinture… a pris vie, alors je n’ai aucune foutue idée de la manière dont ça a pu se produire. Je peux essayer de me renseigner, mais honnêtement, je n’ai jamais rien lu de tel. »
Drago garda le silence et ses yeux restèrent, un long moment, rivés sur le tableau dont les vagues paraissaient encore onduler légèrement.
.
  
    
       
    
  
Chapter 8: Arc de la résurrection - Chapitre 3.3
Notes:
Le récap de Sev'
Précédemment dans - To Kill My Man -
Malfoy affirme que de l'eau des Enfers a coulé du tableau accroché dans sa chambre. Granger prétend que c'est une fuite de plomberie. Je me demande lequel des deux est le plus irrécupérable.
Chapter Text
.
oOoOo ~ Arc de la résurrection - Chapitre 3.3 - DM & SS ~ oOoOo
.
Severus haussa un sourcil perplexe et fit lentement tourner la fiole entre ses doigts, laissant la lumière de la lampe traverser le liquide cristallin.
« C'est de l'eau dans une fiole. »
Drago renifla avec mépris.
« Oui. Merci. Je le sais déjà. »
Le professeur de potion reporta calmement son attention sur lui.
« Si tu le sais déjà, pourquoi viens-tu me faire perdre mon temps avec tout ça ? »

Drago donna un coup de pied rageur dans le fauteuil à côté de lui et grogna.
« Regarde mieux. C'est toi le spécialiste, non ? »
« Mais regarder quoi, exactement ? Je suis spécialiste en potions et ce que tu viens de m'apporter n'est certainement pas une potion. »
Le jeune Lord grimaça, semblant hésiter sur ce qu'il voulait ou ne voulait pas dire. Il n'avait rien dit de la voix qu'il avait entendu à Granger, se méfiant d'elle par principe, mais, avec Severus, il pouvait se permettre une certaine franchise.
« Quelqu'un m'a dit… que c'était de l'eau qui venait du Styx. »
Severus ne cilla pas, impassible.
« Du Styx. » Répéta-t-il d'une voix plate, presque inaudible. Drago connaissait ce ton et il savait qu'il se trouvait sur une pente glissante. Il déglutit, mal à l'aise.
« Ouais, du Styx. »
Un silence lourd s'abattit sur le bureau. Drago pouvait sentir les yeux du professeur le transpercer comme des lames. Un sourire imperceptible passa sur ses lèvres avant qu'il ne prenne enfin la parole. Son ton dégoulinait de sarcasme.
« Est-ce que Lucius t'a déjà révélé la vérité sur le Père Noël ? Et sur la Petite Souris, aussi ? »
Le teint de Drago, pourtant d'habitude si pâle, pris une furieuse couleur violacée.
« Tu te fous de moi ? »
La voix de Severus devint traînante.
« Absolument pas, mon cher. Je cherche juste à déterminer jusqu'où je peux être honnête avec toi. »
« C'est l'eau du Styx. » Répéta Drago d'un ton plus buté et son vis-à-vis, pour le connaître depuis longtemps, savait déjà qu'il n'en démordrait pas.
Severus l'observa avec un calme glacé. Il pencha légèrement la tête sur le côté, indéchiffrable.
« Fascinant. Nous en sommes donc à croire en des légendes ? Drago, le Styx est un mythe. » Sa voix était cassante.
« Et qui l'a décidé ? Il y a des Loup garous, des licornes, des fantômes… alors pourquoi mon eau ne pourrait pas être celle du Styx ? »
Severus soupira de dépit.
« Bien, Drago, bien. Imaginons, juste un instant, que ce soit bien ce que tu sembles croire. Trois questions me viennent à l'esprit : où as-tu bien pu te procurer une ressource si légendaire ? Qui t'en a parlé ? Et enfin : que comptes-tu en faire, exactement ? »
Un silence pesant s'installa et Drago sentit son assurance faiblir. Il avait horreur que l'on prenne ce ton condescendant avec lui. Face à Severus, il avait l'impression d'être redevenu un adolescent perturbé. Bien entendu, il aurait préféré que le potionniste le croit immédiatement, mais d'un autre côté, il savait qu'il avait raison de poser ces questions, que toute cette histoire relevait d'une folie que lui-même peinait à admettre.
Il prit une inspiration difficile, les doigts crispés autour de la fiole qu'il avait récupérée.
« Écoute… je sais que toi non plus, tu ne crois pas en Longbottom. » Severus pinça les lèvres mais garda le silence face à cette affirmation. « Toi qui as une vision très précise des deux camps, tu le sais, n'est-ce pas, que Tu-Sais-Qui est le plus puissant. Et Dumbledore, aussi… grand qu'il soit, ne fait pas le poids face à une force pareille. »
Drago observa le potionniste entrelacer ses longs doigts sous son nez. Il n'avait jamais été un grand bavard. Si on voulait le comprendre, il ne fallait pas l'écouter, il fallait le lire, le déchiffrer. Et, par ce simple geste, il montrait qu'il doutait, lui aussi, sans l'exprimer ouvertement.
Qu'il doutait et qu'il était prêt à envisager… d'autres possibilités.
« J'ai rencontré un homme, sur le champ de bataille. » Drago se racla la gorge, essayant de mettre de l'ordre dans ses pensées. « Qu'est ce que… qu'est-ce que tu dirais si j'affirmais que Longbottom n'est pas l'Élu ? Que, depuis le début, on s'est trompé ? »
Severus laissa s'écouler quelques secondes avant d'ouvrir la bouche.
« Je dirais qu'il me faut plus de preuves qu'un homme que tu as 'rencontré' quelques secondes pendant une bataille et que… de l'eau dans une bouteille. »
Drago serra la mâchoire, frustré, mais il savait que Severus avait raison.
« D'accord, d'accord. » concéda-t-il en inspirant profondément. « Mais si… si je t'apportais plus de preuves, est-ce que tu m'aiderais ? »
« Cela serait considéré comme de la trahison, Drago. »
Un sourire sombre apparut sur le visage de Drago.
« Sauf si j'ai raison, n'est-ce pas ? »
Severus se recula légèrement pour appuyer son dos contre le dossier de sa chaise et le toisa un long moment de ses yeux noirs.
« Si je comprends bien, tu essayes de me dire que tu penses que cet homme est le véritable Élu. »
« Oui. »
« Son nom. »
Drago baissa les yeux, un brin d'embarras perçant dans sa voix.
« Je ne sais pas. »
Un soupir las échappa à Severus.
« Que veut-il de toi ? »
« Je ne suis pas sûr… »
« Comment entres-tu en contact avec lui ? »
« Je… c'est lui qui me contacte, je crois… »
Le visage de Severus se contracta légèrement, trahissant une pointe de mépris.
« Qu'est ce qui te fait penser que cet homme est celui qu'il nous faut ? »
Drago ouvrit la bouche pour répondre, mais aucun mot ne sortit. Tout ce qu'il ressentait, ce n'était que quelques impressions floues, des certitudes sans fondement solide, quelque chose d'indicible qui lui murmurait que cet inconnu était la clef de tout.
« Je… »
Severus secoua lentement la tête, contrarié.
« Tu crois ? Tu n'es pas sûr ? Tu ne sais pas ? Drago Malfoy, si tu veux renverser le pouvoir en place, il te faudra plus que des certitudes brouillées. Au train où tu vas, tu finiras pendu par ton propre camp si tu n'apportes pas autre chose que tes propres croyances. »
Drago se mordit la lèvre. Le professeur, comme toujours, ne mâchait pas ses mots, mais il avait touché juste.
« Drago, » reprit-il d'une voix plus mesurée, plus douce, « ne fonce pas tête baissée dans un mur. Prends du recul. Réfléchis. Fais-toi discret. Ne te fie à personne et garde tout ce que tu viens de me dire pour toi jusqu'à ce que tu puisses prouver ce que tu avances. »
Le jeune homme sentit une vague de soulagement l'envahir.
« Tu me crois… »
Severus leva vers lui un regard fatigué.
« Y a-t-il déjà eu une seule fois où je ne t'ai pas cru ? »
.
.
Chapter 9: Arc de la résurrection - Chapitre 4
Notes:
Le récap de Sev’
Précédemment dans - To Kill My Man - Ligne de Drago
Malfoy m’a apporté une fiole d’eau qu’il prétend issue du Styx. Je lui ai aimablement rappelé que les mythes ne sont que des mythes. Étrangement, je crois que le plus dangereux n’est pas l’eau, mais sa conviction bornée sur la légitimité de l’Élu.
Chapter Text
.
oOoooOOo ~ Arc de la résurrection - Chapitre 4 - réunion de l’Ordre ~ oOoooOOooo
Albus Dumbledore lissa lentement sa longue barbe blanche.
« Bien. Nous avons concédé cette bataille à Tom, mais cela ne signifie pas que nous ayons perdu la guerre. Il nous appartient de tirer les leçons de nos erreurs et de nous relever, encore plus forts. » Il se tourna vers Neville, qui, assis à l'écart, semblait vouloir se fondre dans les ombres. « Approche mon garçon. »
Drago jeta un regard impassible sur le jeune homme recroquevillé sur lui-même. Il retint un soupir d'exaspération. À ses yeux, cet ‘Élu’ ressemblait davantage à un enfant effrayé qu’à un chef de guerre. Pourquoi tout le monde semblait prêt à suivre un homme qui tremblait comme un lapin pris dans les phares d’une voiture ?
Neville s'avança timidement, évitant les regards des autres membres de l’Ordre. Dumbledore posa une main bienveillante sur son épaule.
« Je sais que cette épreuve a été difficile, mais je crois en toi. Les sorciers ont besoin de leur Élu. Tu es l’espoir de ce Monde. »

Au fond de la salle, Remus Lupin prit la parole d’une voix grave.
« Albus, j'ai vu Celui-dont-on-ne-doit-pas-prononcer-le-nom se relever après avoir été touché de plein fouet par un impardonnable. Comme si de rien n'était. Comment pouvons-nous lutter contre cela ? Je pense qu’il y a quelque chose à son sujet que nous ne maîtrisons pas encore. Est-il… est-il possible qu’il soit devenu invulnérable ? »
Un murmure inquiet parcourut l'assemblée. Molly Weasley serra avec anxiété la main de son mari.
Dumbledore secoua la tête, refusant d’entretenir l’idée.
« Non, il n'est pas invincible. Il a des faiblesses que nous pouvons exploiter. Neville manque encore de maturité et de concentration. Avec plus d’entraînement, il sera en mesure de se dresser face à lui. N’est-ce pas mon garçon ? »
Neville hocha vaguement la tête, les yeux écarquillés, et Drago se sentit presque désolé pour lui.
Sirius se redressa, le regard flamboyant.
« Nous devrions frapper vite et fort, montrer que nous ne reculons pas. Nous avons perdu Poudlard, ce qui, si je puis dire, est un véritable désastre. Notre priorité est claire : reprendre le château au plus vite ! »
Il frappa du poing sur la table, faisant sursauter Hermione, assise à côté de lui.
Le rire grinçant de Severus retentit dans la salle.
« Et quoi, Black ? Tu veux tous nous conduire à la mort en fonçant tête baissée, comme un chien enragé ? »
« Oh, bien sûr, tu as sans doute déjà prévu un plan, Snivellus. Peut-être t'enfermer dans ton donjon pour concocter des potions, pendant que nous, nous nous battons et mourrons pour de vrai, dehors ? »
Severus, le dos droit, croisa les jambes avec mépris.
« Frapper sans réfléchir ne nous mènera qu'à davantage de pertes inutiles. Peut-être pourrais-tu avoir un peu plus de considération pour ceux qui sont tombés hier au combat ? »
« De la considération ? » Sirius, rouge de colère, se leva brusquement, fit un pas vers le potionniste. Remus le retint d’un bras, mais il continua, la voix vibrante de rage. « Tu crois que je ne connais pas la douleur ? Que j’ai oublié ceux qu’on a perdus ? Ces gens-là, c’étaient mes amis, Snape ! Mes compagnons ! Et toi… toi, tu fais semblant d’être au-dessus de tout, de tout savoir, mais tu sais quoi ? Tu es seul. Et tu veux qu'j'te dise ce que tout le monde pense tout bas ? T’es pas là pour nous, Snape. T’es là pour laver ta putain de conscience. C’est ça la vérité ! »
Le nom (celui qu’on ne prononçait jamais) n’avait même pas été dit. Pourtant, il résonna dans la pièce comme un coup de tonnerre. Sirius n’avait pas besoin d’être plus explicite : tout le monde savait, tout le monde se souvenait : Snape, dans sa jeunesse, avait prêté allégeance au mauvais camp. Il avait suivi Celui-Dont-On-Ne-Doit-Pas-Prononcer-Le-Nom avant de faire brusquement volte-face. Encore aujourd’hui, malgré sa loyauté à l’Ordre, cette ombre-là restait gravée en lui. Indélébile.
Drago jeta un bref regard au Maître des Potions. Il n’avait jamais connu tous les détails (personne ne les connaissait), cependant, il soupçonnait que Lily Potter n’était pas étrangère au revirement de Severus. Ce n’était pas un sujet dont on parlait, mais il y avait des silences, des regards, des absences de démenti... Et c’était largement suffisant.
Severus s’était figé et sa mâchoire se crispa imperceptiblement. Ses doigts, entrelacés sur la table, blêmirent sous la pression. Il ne prononça pas un mot, mais ses yeux sombres devinrent soudain encore plus durs.
Sirius fulminait, jetant des regards furieux sur chaque membre de l’Ordre.
« Combien d’autres ? Combien de sorciers, de familles, de vies devrons-nous sacrifier en attendant ainsi ? »
Severus finit par lever les yeux, dardant sur Sirius un regard glacial.
« Les pertes sont inévitables, Black. Nous le savons tous. Ce que tu ne sembles pas comprendre, c’est que l’émotion et la colère ne nous mèneront nulle part. »
Le ton monta et Sirius fit mine d’armer son poing, mais la voix ferme de Dumbledore le coupa dans son élan.
« Assez. »
Son regard clair se posa tour à tour sur les deux hommes.
« Les divergences de stratégie peuvent être utiles, mais pas dans ces circonstances. Nos forces sont déjà affaiblies. Je préfère voir l’énergie que vous dépensez à vous quereller, mise au service de l’Ordre. »
Hermione, qui était restée silencieuse jusqu'alors, prit la parole.
« Peut-être devrions-nous concentrer nos efforts sur l'amélioration de nos sorts de défense et de protection ? Si nous ne pouvons pas l'attaquer de front, peut-être pourrions-nous au moins protéger ceux qui sont menacés ? »
« Et si nous sollicitions l'aide des créatures magiques ? » proposa Arthur Weasley. « Les centaures, les dryades... Peut-être seraient-ils disposés à nous soutenir. »
Dumbledore secoua la tête.
« J’ai essayé à plusieurs reprises de les rallier à notre cause, mais ils sont bien trop imprévisibles. Leur allégeance est changeante et nous ne pouvons pas nous permettre de compter sur des forces aussi instables. Je ne souhaite pas leur donner plus d’importance que nécessaire. Le soutien des sorciers sera suffisant. »
Lupin intervint à nouveau, plus blême encore qu’à l’accoutumé.
« Pourtant, face à un ennemi aussi puissant, nous aurions besoin de tous les alliés possibles. »
« Il a raison. » ajouta Tonks. « Nous ne pouvons pas nous permettre de rejeter une aide potentielle. »
Dumbledore les regarda tour à tour.
« Je comprends vos préoccupations, mais la sécurité de nos membres prime avant tout. Nous devons avancer avec prudence. »
Drago sentit une pointe d'agacement monter en lui. Cette prudence excessive ne faisait que les ralentir. Et pendant ce temps, Vous-savez-qui renforçait son emprise. Il détourna les yeux et son regard se posa sur Neville, qui fixait le sol, l'air abattu.
« Peut-être que Neville a besoin de plus de soutien ? » lança Ginny, brisant le silence. « Nous pourrions l'aider à s'entraîner, à gagner en puissance ? »
« Une idée louable, Mademoiselle Weasley. » approuva Dumbledore avec un léger sourire. « Nous devons montrer au monde que nous veillons les uns sur les autres. Molly, avez-vous encore des contacts à La Gazette du Sorcier ? Faites donc passer l’information et organisez quelques séances photos. Et Xenophilius, peut-être pourriez-vous relayer cela dans Le Chicaneur ? Je veux que les sorciers voient à quel point Neville s’investit pour eux. »
Severus soupira discrètement, mais suffisamment pour que Drago le remarque. Il était clair que le Maître des Potions partageait certains de ses doutes.
Une immense chape de fatigue sembla soudainement peser sur ses épaules. Il avait besoin d’air. D’un peu de solitude. De sortir de cette foutue salle et de penser à autre chose, juste un instant.
Il se leva, discrètement, et quitta la réunion sans un mot.
.
Chapter 10: Arc de la résurrection - Chapitre 5
Summary:
.
Le récap de Sev’
Précédemment dans - To Kill My Man - Ligne de vie de Drago
L’Ordre a tenu conseil. Albus continue de transformer Longbottom en mascotte médiatique. Sirius aboie sans jamais mordre et personne ne propose rien d’utile. Pendant ce temps, à Poudlard, le Seigneur des Ténèbres doit bien rire.
.
Chapter Text
.
oOoooOOo ~ Arc de la résurrection - Chapitre 5 - DM & miroir ~ oOoooOOooo
.
Drago se pencha au-dessus du lavabo et passa lentement ses mains sous l’eau froide. La température glaciale le fit frissonner et il laissa, un long moment, le filet couler le long de son visage.
Il se redressa enfin, ferma les yeux un instant, puis les rouvrit pour se scruter dans le miroir. Il avait l’air épuisé. Il était toujours beau, bien entendu, mais ses traits étaient tirés et d’affreuses cernes violacées le vieillissaient de bien 10 ans de plus.
C’était comme si chaque jour de cette guerre prenait une nouvelle part de lui-même.
Le reflet dans la glace lui sembla soudain légèrement flou, voilé. Il se frotta les yeux, agacé et battit des paupières. L’image redevint nette.
Il soupira, résigné, et se détourna.
Un mouvement, dans l’angle de son champ de vision, l’arrêta net. Il revint brusquement vers le miroir et retint son souffle. Son reflet… souriait. Pourtant, il en était convaincu, lui ne souriait pas du tout.
Un frisson courut le long de son dos et il passa lentement ses doigts sur les commissures de ses lèvres pour en être certain. Son reflet souriant imita son geste.
Drago fronça les sourcils.
« C’est toi ? » murmura-t-il, effleurant de ses doigts la surface glacée du verre.
Son double inclina doucement la tête sur le côté. Drago, déconcerté, recula d’un pas. Il tenta de rompre l’angoisse qui montait en lui avec un sarcasme.
« T’es vraiment flippant. Tu ne peux pas t’y prendre autrement pour me contacter ? »
Il n’obtint aucune réponse, mais quelque chose dans son reflet changea. Lentement, ses yeux perdirent leur éclat gris pour se teinter d’une couleur profonde de vert émeraude. Intense, hypnotique. Fasciné, Drago se pencha pour mieux s’observer et la pensée que cette couleur lui allait presque mieux que ses propres yeux le traversa un court instant.
« Un chat m’a dit que tu n’étais pas quelqu’un de très fréquentable. Tu as un avis là-dessus ? »
Le reflet haussa les épaules, un demi-sourire méprisant accroché aux lèvres, et Drago ne put s’empêcher de lui sourire en retour.
« Qu’est-ce que tu attends de moi, exactement ? » demanda-t-il, tout bas. Il avait la vague impression d’être un schizophrène en plein délire.
Pour toute réponse, son reflet se pencha légèrement en avant, soufflant sur la surface lisse du miroir jusqu’à ce qu’une fine buée se forme. Du bout du doigt, il y traça un dessin.
Drago plissa les yeux.
Les lignes apparurent progressivement : de petits traits incertains, tremblants, formant les contours d’un bâtiment qu’il connaissait bien. Les tours élancées, les larges fenêtres… cela ressemblait indéniablement au manoir de sa famille.
« C’est… chez moi ? » souffla-t-il.
Son reflet acquiesça légèrement. Comment ce type… pouvait-il connaître leur demeure ?
Drago ouvrit la bouche pour dire quelque chose, mais son double souffla de nouveau sur la glace, traçant cette fois-ci une forme plus simple, rectangulaire. Il fronça les sourcils.
« Qu’est-ce que c’est ? Une brique ? Excuse-moi, mais si tu voulais rejoindre les Beaux-Arts, tu devrais y réfléchir par deux fois. »
Son double haussa les yeux au ciel avant d’ajouter, d’un air agacé, une plume à côté du rectangle.
« Oh… est-ce que c’est un livre ? »
L’autre secoua négativement la tête.
Non. Bon. Il fallait donc jouer au jeu des devinettes.
« Un cahier ? »
Cette fois-ci, c’était une oscillation indécise. Drago grogna, légèrement frustré, sentant qu’il approchait du but.
« Un carnet ? »
Même oscillation.
Il soupira.
« Je ne sais pas… un… un journal intime ? »
La main de son double s’écrasa silencieusement contre le miroir. Drago releva les yeux sur lui : il semblait terriblement excité.
« Je vois, alors… il y a un journal intime que tu veux que je trouve… au… Manoir ? Jamais entendu parler. »
Son double fronça les sourcils et, d’un doigt, dessina un bonhomme bâton. Drago ricana en le voyant ajouter de longs cheveux.
« Ne me dis pas que c’est mon père… Tu veux que je trouve le journal intime de mon père ? »
Cette fois-ci, ce fut le poing de son double qui s’écrasa sur la glace. Il semblait agacé et Drago sentit aussitôt la colère monter en lui.
« Et bien pardon, Monseigneur, mais je n’y peux rien si tes dessins sont merdiques ! Tu m’as déjà parlé, non ? Pourquoi tu n’utilises pas la même méthode ? Tu es juste ridicule ! »
Les deux yeux verts le fixaient, furieux. Il se vit former deux mots silencieux.
« Quoi ? Recommence ! » Il essaya de se concentrer. « Trop… compliqué ? C’est trop compliqué de parler avec moi ? »
Le reflet hocha la tête.
Drago sentit sa colère monter encore d’un cran.
« Et donc ? Est-ce que c’est de MA faute ? Est-ce que tu trouves ça juste de passer tes nerfs sur moi pour quelque chose que TU n’arrives pas à faire ? Je te rappelle que c’est toi qui est venu me chercher, hein ! Moi je ne t’ai rien demandé du tout ! »
Drago s’arrêta, essoufflé, et s’observa, d’un air furibond, dans le miroir. Il se trouva soudain insupportable. L’autre pencha lentement la tête sur le côté, interloqué. Il ne semblait pas habitué à ce qu’on lui tienne tête. Un sourire amusé flotta un instant sur les lèvres de son double et il désigna de nouveau le mini-Lucius dessiné.
Drago soupira. Il voulait en finir avec ces devinettes. Rentrer chez lui.
« Est-ce que le journal appartient à mon père ? »
Oscillation.
« D’accord. Est-ce que mon père est en possession de ce que tu cherches ? »
Un grand sourire naquit sur les lèvres de son double.
Enfin.
Drago laissa échapper un soupir de soulagement. Malheureusement pour lui, son calvaire ne faisait que commencer. Il le sut quand il vit de nouveau ses doigts s’agiter sur la glace. Il leva les yeux au ciel, presque désespéré.
Cette fois-ci, c’était une sorte d’énorme S. Un S auquel il avait ajouté deux petits crocs. Un serpent ? Son double sembla lire dans ses pensées, car il ajouta soudainement deux minuscules personnages au pied de la bête.
Bon.
« Un énorme serpent alors ? »
Le reflet pencha légèrement la tête, comme s’il était en train de lui dire : « Voyons, Drago, je sais que tu es plus intelligent que ça. » Et, même si aucun son ne circula entre eux, le blond finit par en prendre légèrement ombrage.
« Un dragon ? »
Non. Visiblement, ce n’était pas ça non plus.
Il inspira et reprit, hésitant, les yeux plissés.
« C’est un animal, n’est-ce pas ? »
L’autre se pencha soudainement sur le dessin, impatient, avant d’ajouter dans la buée, sur la tête du S, une couronne.
Un souvenir lointain émergea en Drago. Si c’était bien ce à quoi il pensait, alors il s’agissait d’une créature extrêmement rare : le Roi des Serpents… un basilic ?
Le reflet se redressa, un sourire moqueur flottant aux lèvres, et le regard de Drago se troubla. Un basilic… Pourquoi un basilic ? Merlin ! Cette énigme devenait de plus en plus opaque.
Son autre lui traça à nouveau le rectangle tremblant du journal, avant d’y apposer la gueule du basilic, juste au-dessus, comme s’il allait mordre la page.
Drago écarquilla les yeux, incrédule.
« Attends… tu veux que… qu’un basilic morde ce… journal ? »
Son double acquiesça lentement et son sourire s’élargit encore de quelques centimètres, comme s’il savourait le moment où Drago comprenait enfin.
Ce dernier sentit la colère monter en lui.
« Et comment je suis censé faire ça, exactement ? Au cas où tu l’ignorerais, les basilics ne courent pas les rues. Et même si, par miracle, j’arrivais à mettre la main sur du venin, je ne vois pas comment tout ça peut se corréler logiquement ! »
Quelqu’un frappa à la porte et Drago tourna soudainement la tête. Quand il reporta son attention sur le reflet, ses yeux étaient redevenus orageux.
.

Chapter 11: Arc de la résurrection - Chapitre 6
Notes:
.
Le récap de Sev'
Précédemment dans - To Kill My Man - Ligne de vie de Drago
Malfoy discute avec son miroir. Le reflet a des yeux verts, un humour discutable, et lui confie une quête ridicule : trouver un journal intime et le faire mordre par un basilic. Toute cette histoire me fatigue, vous n'imaginez même pas…
.
Chapter Text
.
oOoOo ~ Arc de la résurrection - Chapitre 6 - DM & journal TMR ~ oOoOo
.
Drago soupira, contrarié, et fit tomber, d'un geste de baguette, l'échelle qui menait au grenier du Manoir.
Il avait profité de l'absence de son Père pour s'infiltrer, en toute discrétion, dans la demeure familiale. (Jusqu'à ce qu'un elfe le dénonce, bien entendu. Rien ne restait jamais longtemps secret, ici, de toute façon.)
Leurs relations n'étaient pas vraiment au beau fixe depuis que Drago avait décidé de tourner le dos au Seigneur pour rejoindre l'Ordre.
À vrai dire, ça n'allait pas fort depuis longtemps déjà.
Il se souvenait encore de la froideur avec laquelle Lucius avait réagi lorsqu'il avait, en première année, osé se lier d'amitié avec Ronald Weasley : un Gryffondor issu d'une famille honnie par l'aristocratie.
Drago lui-même n'avait jamais su expliquer ce qui l'avait attiré chez ce garçon roux au pull trop grand. Trop bruyant, un peu idiot, et affreusement pauvre… bref tout ce qu'un Malfoy était censé mépriser. Et pourtant… c'était arrivé. Comme si une force capricieuse l'avait poussé dans cette direction. Pas qu'il ait regretté, non. Mais il y avait dans ce choix quelque chose d'irrationnel qu'il n'arrivait pas à comprendre.
Il essuya, dédaigneusement, la poussière d'une malle, fit sauter la serrure d'un 'Alohomora' puis souleva le couvercle, si lourd qu'il crut que les gonds allaient céder. À l'intérieur, il trouva des vêtements d'un autre siècle soigneusement pliés : soie, brocart, velours noir.
Sans intérêt. Il soupira, balaya le grenier du regard ; partout, des malles identiques. Il allait y passer l'après-midi. Parfait.
Quand il avait choisi de suivre Dumbledore, cela avait scellé ce qui restait de sa relation avec son Père. Étrangement, il n'avait pas été renié, mais ce n'était pas pour autant qu'il lui avait pardonné la trahison.
Drago n'avait jamais vraiment compris Lucius.
Il s'était attendu à un drame familial : cris, menaces, hurlements. Il aurait préféré ça. Mais, à la place, son Père s'était simplement contenté de le fixer, longuement, avec une expression qu'il n'avait jamais su interpréter. Une colère froide ? Du mépris ? Ou autre chose ? Puis Lucius lui avait tourné le dos, sans un mot.
Ils ne s'étaient plus vraiment reparlés depuis.
C'était comme si son Père l'avait effacé. Pas comme on raye un nom sur un arbre généalogique, non. Plutôt comme on referme un livre qu'on n'a absolument pas envie de finir. Sans haine, sans passion. Juste avec ce terrible détachement dont lui seul était capable.
Et c'était peut-être ça, au fond, qui faisait le plus mal.
Il s'agenouilla devant une seconde malle, plus basse, cloutée de ferrures ternies. Celle-ci n'avait pas de serrure : le loquet grinça quand il l'ouvrit. L'intérieur exhalait une odeur de camphre et de parchemin moisi. Il écarta une vieille cape d'apparat brodée d'un M serpentiforme, souleva un éventail de plumes grises. Il trouva, en dessous, un assortiment de livres. Des ouvrages anciens, certains sans titre, d'autres marqués du sceau de la famille : généalogies, grimoires, traités sur la magie de sang. Il en prit un au hasard, le feuilleta distraitement, puis le reposa.
Ce n'était pas ce qu'il cherchait. Il se redressa un peu trop vite et ses genoux craquèrent désagréablement sous lui.
Il avait cru, au début, qu'il ne se remettrait jamais de cette séparation. Après tout, il avait toujours été un enfant choyé et il avait horreur de se retrouver seul. Mais, quand il avait constaté que sa Mère continuait de lui envoyer, avec constance, des lettres et que son Père continuait de renflouer son compte bancaire chaque mois, il s'était dit que, finalement, un peu d'indépendance ne lui ferait aucun mal.
Et puis il lui restait toujours Severus. Bien qu'il n'en fasse pas partie, Drago l'avait toujours considéré comme un membre de sa famille.
… Bon sang !
Combien de foutues malles avait-il ouvertes depuis qu'il était arrivé? Dix? Vingt? Trente? Son cerveau refusait de compter, par instinct de survie. Cette tâche était si affreusement ennuyeuse qu'il en venait à douter de sa propre existence.
Et pourquoi, au juste, n'ordonnait-il pas à un foutu elfe de s'en charger? C'était littéralement leur travail, non? Il donna un coup de pied rageur dans une boîte, dont le couvercle sauta bruyamment.
De toute façon, il ne savait même pas à quoi ressemblait ce qu'il cherchait. Peut-être que tout cela n'était qu'un immense délire. Peut-être qu'il avait juste eu un AVC en regardant son reflet et que son cerveau s'amusait depuis à lui envoyer des hallucinations à la noix.
Bordel.
Il claqua violemment le couvercle d'une énième malle.
Et ce type, là. L'autre beau gosse aux yeux verts. Est-ce qu'il ne s'était pas foutu de sa gueule, franchement? Plutôt que de dessiner dans la buée des trucs imbitables qu'aucun être humain normalement constitué ne pouvait reconnaître, il aurait pu, je sais pas… ÉCRIRE, par exemple?
Il ouvrit une autre malle à la volée. Ses gestes devenaient de plus en plus nerveux.
Le type avait de la chance que Drago ait un faible pour les jolis minois, sinon il aurait déjà lâché l'affaire. Non mais sérieusement! Capable de faire couler littéralement de l'eau des Enfers à travers un tableau, mais pas foutu de venir chercher lui-même un journal?
Drago jura entre ses dents.
Il tomba sur une robe de cérémonie noire, brodée d'or et de runes d'apparat, ainsi que sur une collection complète de masques de bal, en cuir de dragon, qui gisait au fond d'un coffret laqué. Il dénicha une montre à gousset en argent terni, qui vibrait étrangement à chaque fois qu'il en refermait le couvercle. Un carnet de bal jauni listait les conquêtes d'un aïeul, avec des annotations terriblement cruelles sur chacune d'elles.
Plus loin, il découvrit une dague cérémonielle en argent, décorée de serpents entrelacés et enveloppée dans du velours noir, une pile de lettres scellées, jamais envoyées, adressées à des sorciers morts depuis longtemps, une plume de paon, jadis utilisée pour signer des traités de sang, des bons du Trésor du Ministère de la Magie, émis pendant la guerre des Gobelins, ainsi qu'une boîte à musique à double fond… contenant une unique photo de Lucius adolescent.
… Mais toujours pas de journal intime.
Drago se redressa, les jambes engourdies, le dos en compote. Il avait l'impression d'avoir vieilli de dix ans. Ses yeux balayèrent une nouvelle fois le grenier et il sentit le découragement le submerger. Il n'était même plus sûr de ce qu'il cherchait. Et s'il se trompait d'endroit depuis le début ? Rien ne disait que ce foutu journal était là. Rien ne disait qu'il existait, d'ailleurs.
Il rejeta la tête en arrière, les yeux perdus dans l'enchevêtrement poussiéreux des poutres. Un mince filet de lumière filtrait à travers une lucarne sale, rendant l'atmosphère vaguement irréelle.
Sa main se posa machinalement sur la besace. Il sentit, à travers le tissu, le petit flacon et une vague d'inquiétude le troubla un instant. Il en avait bavé pour mettre la main sur ce fichu venin de basilic. Ce truc était introuvable. Dangereux. Illégal. Et Severus l'aurait probablement écorché vif s'il l'avait surpris à fouiller dans ses réserves.
Il serra les dents.
Une seule minuscule goutte pouvait tuer un troll adulte. Et voilà que ce type aux yeux verts voulait en verser sur un vieux journal. Drago baissa le regard vers sa besace, perplexe.
Mais ce n'était que du vieux papier… non ?
Il secoua la tête, rouvrit une malle, sans conviction. Une paire de bottes de chasse, cirées mais jamais portées. Dans la suivante, des piles de linge brodé au fil d'argent, soigneusement empaquetées dans du papier de soie jauni.
Il referma le couvercle un peu plus brutalement que nécessaire.
« J'en ai assez. »
Il se redressa, les mains sur les hanches. Il en avait marre de jouer aux archéologues dans la poussière et l'odeur rance du grenier lui soulevait le cœur. Et si quelqu'un (n'importe qui) osait lui reprocher de ne pas avoir trouvé ce foutu journal, il ferait un scandale. Un vrai. Avec hurlements, menaces et sortie théâtrale.
Il fit un pas vers l'échelle.
Avant de s'immobiliser.
Un picotement venait de lui saisir le bout des doigts. Une sensation si subtile qu'il ne s'en était pas aperçu auparavant. Peut-être la fatigue avait elle fini par éroder ses défenses, par amplifier ses perceptions ?
Il fronça les sourcils, hésita. Quelque chose venait de changer. C'était vague, mais familier. Comme une présence. Discrète, enfouie, poisseuse.
Il porta la main à son nez, plissa légèrement les narines. Maintenant qu'il se concentrait, il y avait une odeur. Comme un relent de feu éteint depuis longtemps, mêlé à un parfum de moisissure, d'herbes sèches et de décomposition. Une puanteur discrète, presque camouflée par la poussière, mais qui lui serra brièvement la gorge.
C'était peut-être idiot, mais quelque chose, dans l'air, lui semblait… corrompu.
Il fit lentement volte-face et balaya du regard l'espace qu'il venait de fouiller.
Des malles. Évidemment.
Mais l'une, à l'écart des autres, attira son regard. Elle n'avait rien de particulier. Même taille, même bois noirci, même serrure banale. Et pourtant… quelque chose l'appelait : une pression sourde, quelque chose… qui n'aurait jamais dû être ici.
À mesure qu'il s'en rapprochait, le malaise s'accentuait. C'était une impression de vide, ou de présence dissoute. Un écho. Le genre de chose que seul un sorcier élevé à reconnaître les restes de magie noire pouvait capter.
Et Drago savait la reconnaître : il avait grandi avec elle, avait été instruit, très jeune, à distinguer les sortilèges anciens, les enchantements illicites, les objets qu'on ne touchait pas (ou du moins pas sans précaution).
Ce qu'il y avait là, n'avait rien d'une simple relique maudite.
Il posa la main sur le couvercle. Il y eut une résistance ténue, comme si le bois refusait de s'ouvrir. Puis il céda enfin.
À l'intérieur, Drago trouva quelques papiers, un flacon vide, un mouchoir brodé et, au milieu de ce fatras, un banal carnet : couverture de cuir noire, coin abîmé, aucune inscription.
Dès que ses doigts effleurèrent la reliure, il sut.
C'était ça. Il ne pouvait pas expliquer pourquoi. Il le savait, simplement.
Et il n'aimait pas ça du tout.
Il déposa précautionneusement le carnet au sol, avant de se redresser d'un bond, le souffle court. Il fouilla fébrilement dans l'une des malles, parmi les objets éparpillés. Ses doigts refermèrent enfin sur la dague cérémonielle. Elle était parfaite pour le job. Le métal tiédit aussitôt contre sa paume.
Sans plus attendre, il tira de sa besace une paire de gants en cuir de dragon (les plus épais qu'il ait pu trouver) et les enfila avec soin. Puis il dévissa lentement la fiole de venin de Basilic. Une odeur âcre s'en échappa, suffocante. Il n'osa pas la respirer.
Il se concentra pour ne pas que ses mains tremblent. Une goutte. Deux. Le liquide verdâtre coula sur la lame d'argent. Aussitôt, un désagréable grésillement se fit entendre. Une fine vapeur s'éleva et le métal frémit légèrement entre ses doigts.
Il devait faire vite.
Sans hésiter davantage, Drago brandit la dague et la planta de toutes ses forces au centre du journal. La lame transperça le cuir dans un craquement quasi organique.
La réaction fut immédiate : un puissant souffle jaillit du carnet, repoussant l'air autour de lui. Les poutres en bois du grenier gémirent. La dague vibra, plus fort encore, sous sa main, brûlante malgré les gants. Un instant, il crut entendre un rire ou un hurlement.
Puis… plus rien.
Il relâcha le manche de l'arme.
Le carnet fumait. La reliure noircie s'était fendue par endroits. Et, au centre, là où la lame avait frappé, la marque du venin s'était propagée en veines sombres, comme si le cuir en avait lui-même été infecté.
Drago recula, haletant.
Il ne savait pas ce qu'il venait de faire.
Mais il savait que ça ne serait pas sans conséquence.

.
.
Chapter 12: Extrait du journal de Severus S. - Entrée 26
Notes:
Le récap de Sev'
Précédemment dans - To Kill My Man - Ligne de vie de Drago
Malfoy passe son après-midi à ouvrir des malles pleines de vieilleries inutiles. Après avoir geint, râlé, et pesté, il finit par trouver un journal et y plante une dague enduite de venin de basilic… Tiens… d'ailleurs… il me semblait pourtant que j'en avais, dans mes réserves ?
Chapter Text
.
OoOoO Extrait du journal de Severus S. - Entrée 26. oOoOoO
.
Je n'ai eu le fin mot de l'histoire que plusieurs jours plus tard, et uniquement parce que j'ai menacé Drago de la pire des façons ; celles qu'il savait parfaitement que je mettrais à exécution.
Le fait est que je n'avais, à l'origine, qu'un minuscule soupçon : un flacon avait disparu de mes réserves personnelles. Pas n'importe lequel, évidemment. L'un de ceux qui n'apparaissent sur aucun inventaire et pour cause : il contenait du venin de Basilic.
Il ne m'a pas fallu longtemps pour identifier le coupable. Drago n'a jamais su se montrer discret. Il rôdait, depuis quelques semaines déjà, devant ma réserve. Trop silencieux, trop soucieux de paraître inoffensif. Une erreur de débutant. (Merlin ! Mais que lui reste-t-il de ses cours d'infiltration ?)
À propos du venin de Basilic.
Cet ingrédient est l'un des poisons les plus puissants et les plus instables du monde magique. Une seule goutte suffit à arrêter un cœur en moins d'une minute. Deux, et c'est un corps entier qui se nécrose de l'intérieur.
Son obtention est un processus aussi délicat que dangereux : d'abord, il faut un Basilic adulte. (Ce qui, en soi, réduit considérablement la liste des fournisseurs potentiels.)
Ensuite, il faut prélever le venin avant que la créature ne frappe. Ce qui suppose d'endormir un serpent de quinze mètres doté d'un regard mortel, de crochets capables de percer une armure de titane et d'un instinct aussi prompt que celui d'un Nundu affamé.
Autant dire que seuls quelques fous, ou quelques Maîtres Potionnistes très bien renseignés, s'y risquent encore.
J'en possédais donc quelques millilitres que je conservais précautionneusement à l'abri de la lumière. Et le flacon avait disparu. Drago aussi, mais seulement par intermittence ; des absences brèves, jamais vraiment dissimulées. J'ai attendu son retour et j'ai posé la question, sans détour.
Il a nié, bien entendu. Puis il a esquivé.
Et enfin, lorsque j'ai précisé le nom exact du sortilège que j'étais prêt à employer pour lui faire cracher la vérité, il a fini par craquer.
Je n'ai, bien évidemment, pas l'intention de me lancer dans une biographie détaillée de M. Malefoy (fils), ni de m'épancher, plus que nécessaire, sur ses déboires récents ; il le fait très bien lui-même, à grands renforts de soupirs, de silences tragiques et de remarques passives-agressives.
Quoiqu'il en soit, Drago, après avoir détruit le journal (nous ignorions alors tous de quoi il s'agissait), ne s'en était pas débarrassé. Il l'avait conservé, par précaution. Par instinct peut-être. Caché, avec une prudence maladive, dans un endroit que lui seul connaissait.
(Il n'a jamais voulu m'en révéler les détails et je doute qu'il le fasse un jour.)
Il m'a avoué avoir observé le journal sous toutes les coutures, l'avoir retourné, palpé, flairé, gratté… à la recherche d'un sens, d'une confirmation. N'importe laquelle.
Il n'a trouvé qu'une marque : un filigrane, à peine visible, pressé dans le cuir, au coin gauche de la deuxième de couverture. Trois lettres : TMR.
Et c'est tout.
Puis il a attendu.
Des jours. Puis des semaines. Il espérait un signe. Un mot. Un indice. Une apparition fugace. Mais cet homme au regard fiévreux, que lui seul prétendait voir et que personne d'autre n'avait jamais rencontré, n'a plus donné signe de vie.
Pas un murmure. Pas une ombre dans un miroir. Rien. Silence absolu.
Évidemment, Drago n'a rien dit. Mais je le connaissais : il doutait. De tout. D'avoir détruit le bon objet, d'avoir mal compris les instructions. Il espérait ne pas s'être trompé, mais n'en était pas certain. Et, surtout, il commençait à craindre pour sa propre santé mentale : de finir comme sa tante et d'être dévoré par des visions ou des illusions déviantes.
La guerre, soudain, nous a rappelés à l'ordre. La chute de Poudlard nous avait déjà laissés exsangues, mais ce n'était que le début. Le château avait toujours été plus qu'un bastion : c'était un symbole. Sa perte a provoqué une onde de choc que nous n'avons jamais vraiment pu contenir.
Les défaites se sont enchaînées (pire encore qu'auparavant) et les positions ont cédé, une à une. Dans les Highlands, le petit hameau de Caerforwyn a été retrouvé vidé de ses habitants, les maisons carbonisées, les toits fondus. L'Épine Blanche, un village frontalier pourtant discret, réputé pour ses potionnistes, a cessé, du jour au lendemain, toute communication avec l'extérieur. À Kirklane, c'est une nuée d'Inferi qui a émergé du loch. Nous n'y avons retrouvé que des os, entassés dans les granges comme du bois mort.
Même les sorciers qui s'étaient terrés en dehors du Royaume-Uni n'étaient plus à l'abri. Il ne restait bientôt que des caches. Et même celles-ci devenaient rares.
Le dernier bastion d'Aurors indépendants a cédé à peine une semaine plus tard. Même la réserve de la Banque Nationale d'Angleterre, dont on disait autrefois qu'elle était imprenable, a été siphonnée sous notre nez.
Certains ont déserté. D'autres ont changé de camp. Et ceux qui sont restés… ont été réduits à se battre pour maintenir une ligne de défense que l'on savait déjà condamnée.
Nos réseaux d'information ont été pulvérisés. Nos soutiens politiques se sont évaporés. La situation géopolitique était catastrophique. Même les factions alliées, à l'étranger, ont cessé de répondre.
Nous n'avions plus le luxe de nous attarder sur des énigmes. J'ai fini par passer à autre chose et le journal que Drago avait ramené du manoir Malfoy est tombé dans l'oubli.
Et, alors que je pensais qu'il était, lui aussi, passé à autre chose, il s'est soudain remis en mouvement. Frénétiquement. Comme un possédé.
Il passait des heures à errer dans la bibliothèque commune, les bras chargés d'ouvrages poussiéreux dont la plupart n'étaient plus consultés depuis des décennies. Il laissait derrière lui des piles de grimoires entrouverts, annotés à la hâte, parfois même déchirés par agacement.
Et quand il n'était pas là, il était ailleurs. Disparu. Des journées entières. Sans prévenir, sans expliquer. J'ai fini par cesser de poser des questions : Drago n'est peut-être pas doué pour le mensonge, mais il est parfaitement capable de se taire quand il le veut vraiment.
Il m'a glissé, un jour, d'un ton presque détaché, qu'il avait été « recontacté ». Il n'a pas dit par qui. Il n'en a pas eu besoin.
Son regard suffisait. J'y ai vu cette lueur étrange, fiévreuse, vacillante ; la même qu'avaient ceux qui suivent un prophète que personne d'autre ne voit.
Il m'a dit qu'il allait « ouvrir une porte ». Je me souviens de la manière dont il a prononcé ces mots : lentement, comme s'il récitait quelque chose de sacré, mais sans y croire complètement. Il avait l'air d'un garçon perdu qui traverse une tempête, prétendant qu'il sait nager.
Cela m'a pris du temps, mais j'ai peu à peu compris ce qu'il cherchait : il rassemblait des objets aux propriétés précises. Des ingrédients que seuls ceux qui s'intéressent de trop près à l'invocation savent nommer.
Il a demandé, à voix basse, comme un voleur, s'il existait encore des Portoloins menant vers les montagnes Polonaises.
Et j'ai compris : il allait tenter un rituel.
Un artefact.
Un maléfice.
Un sacrifice.
L'ancienne trinité. Celle que même les plus endurcis évitent, tant elle exige.
Et croyez-moi, j'ai assez pratiqué la magie noire pour le savoir : aucun sort fondé sur cet équilibre ne mène à quoi que ce soit de bon.
On n'ouvre pas impunément une porte entre les mondes.
Pas sans qu'autre chose n'en profite pour passer.
.

.
Chapter 13: Arc de la résurrection - Chapitre 7
Notes:
.
Le récap de Sev'
Précédemment dans - To Kill My Man - Ligne de Drago
Malefoy a volé du venin de basilic, a transpercé avec une dague un vieux journal, puis l'a gardé comme un rat cache son pain. Des semaines plus tard, il affirme qu'on l'a 'recontacté' et se met à assembler de quoi réaliser un rituel interdit.
.
Chapter Text
oOoOo ~ Arc de la résurrection - Chapitre 7 - DM & le rituel ~ oOoOo
.
Le lac frémissait légèrement sous le vent. Sa surface sombre trahissait une eau glaciale. Les chênes centenaires encerclaient la rive et leurs troncs massifs semblaient s'étirer à l'infini jusqu'à une canopée si dense que le soleil lui-même ne s'y risquait pas.
La lumière manquait et l'imposante falaise de la montagne qui le surplombait n'aidait certainement pas.
Tout semblait baigner dans une pénombre constante et humide.
L'air, chargé d'odeurs de mousse et de bois en décomposition, semblait se bloquer dans la gorge de Drago sans vouloir en ressortir. Il avait la désagréable impression de suffoquer dans l'épais silence, interrompu uniquement par le bruissement distant des feuilles.
Le vent glissa sournoisement entre les arbres pour s'insinuer jusqu'à lui et il frissonna en resserrant instinctivement sa besace contre lui, les doigts crispés sur la sangle de cuir.
Arriver jusqu'ici avait été un calvaire : il avait pataugé dans des tourbières, glissé sur des racines visqueuses et trébuché plus de fois qu'il ne voudrait bien l'admettre. Ses chaussures de ville, élégantes mais parfaitement inadaptées à une randonnée mortelle en forêt, étaient trempées et couvertes d'une boue épaisse et collante. Le bas de son pantalon était dans un état lamentable et il n'osait même pas penser à ce que diraient les Elfes de Maison en voyant l'état général de sa tenue.
Il ferma les yeux et inspira profondément, la tête levée vers le ciel. L'air glacé s'engouffra dans ses poumons comme une lame et lui arracha un gémissement étouffé. Sa poitrine se contracta douloureusement et il toussa, le souffle court.
Ses doigts se crispèrent un peu plus sur son sac. Putain. Il y avait intérêt à ce que ça en vaille la peine.
Le tronc de l'épicéa, couché en travers de son chemin, était glissant sous l'épaisse couche de mousse verte qui le recouvrait. Drago y posa une main pour s'équilibrer et passa péniblement par-dessus. Ses chaussures s'enfoncèrent dans le tapis humide de feuilles mortes de l'autre côté et il grimaça avec dégoût. Il avança de quelques pas, jusqu'à ce que ses pieds touchent presque la rive du lac.
L'eau noire miroitait faiblement sous la lumière grise qui perçait à travers la canopée. Le lac tout entier semblait respirer, silencieusement, comme une créature endormie. Il resta immobile un long moment, les yeux rivés sur sa surface lisse.
Il avait longuement hésité à venir ici. Pour être tout à fait honnête, il n'était pas certain de vouloir savoir si ses visions étaient réelles ou juste le fruit d'une violente commotion cérébrale. La simple idée qu'il obéissait peut-être à une défaillance de son esprit, une qui lui faisait entendre et voir des choses qui n'existaient peut-être pas, le fit frissonner.
Drago soupira profondément et jeta un regard accablé à ses mocassins boueux. Quelle idée stupide d'être venu crapahuter dans une forêt millénaire avec des chaussures si peu adaptées. Il les retira avec précaution, pinçant les lèvres de dégoût lorsqu'un filet d'eau trouble s'échappa de l'une d'elles.
Ses chaussettes étaient détrempées, collées à sa peau comme une seconde chair froide. Affreusement désagréable.
Il fit demi-tour, enjambant maladroitement une racine noueuse pour revenir jusqu'au tronc moussu. Là, il les étendit précautionneusement sur l'écorce humide. Il fixa un instant les morceaux de tissu qui pendouillaient misérablement et pria intérieurement pour qu'aucun insecte bizarre ne vienne y élire domicile.
Quand il eut remonté son pantalon à hauteur de ses genoux, il s'agenouilla au bord du lac et fouilla dans son sac en cuir usé. Ses doigts rencontrèrent d'abord une petite fiole et Drago la sortit avec précaution, la tenant du bout des doigts comme si le verre risquait de se dissoudre à son contact.
L'eau du Styx.
Enfin, prétendument du Styx, se reprit-il intérieurement avec un petit reniflement méprisant.
Un artefact.
Il reposa, avec soin, la fiole sur une pierre plate, puis extirpa de son sac une petite boîte en bois sombre, nouée par une ficelle grossière. Il l'observa un instant, le nez froncé, avant de la poser à son tour. Il n'avait pas pu se résoudre à tuer un animal. Il n'en avait eu ni le cœur, ni le courage.
Alors, lorsqu'il était tombé sur ce cadavre, au détour d'un sentier, il y avait vu une porte de sortie. Un compromis. Un sacrifice sans culpabilité. Il espérait simplement que cela serait… suffisant.
Un sacrifice.
Il déposa sa besace un peu plus loin, à l'abri de l'humidité rampante du rivage, avant de prendre une longue inspiration. Finalement, il s'avança, un pied après l'autre, jusqu'à ce que ses orteils touchent l'eau.
Il ravala un hoquet de surprise. Il s'attendait à ce qu'elle soit froide, bien sûr, mais pas à ce point. Ce n'était plus de l'eau, c'était de la glace liquide, une entité vivante et malveillante qui se faufilait sous sa peau et se lovait sournoisement autour de ses os.
Son cœur manqua un battement, un souffle rauque s'échappa de sa gorge et il recula d'un pas, pris d'un réflexe animal.
« Si ça continue comme ça, je vais mourir d'hypothermie avant même d'avoir commencé… »
Il hésita. Tout son corps lui hurlait de faire demi-tour pour fuir cette eau noire. Il voulait rentrer chez lui. Se glisser sous une couette et ne plus en ressortir avant trois ans.
Ses pieds s'enfoncèrent dans l'épaisse vase visqueuse et il se força à faire un nouveau pas vers le centre du lac. Ses jambes, déjà engourdies, protestaient à chaque mouvement supplémentaire.
Il trébucha soudainement sur une pierre dissimulée sous un amas d'algues. Il perdit l'équilibre et, dans un réflexe maladroit pour se rattraper, ses doigts engourdis lâchèrent la boîte qu'il serrait contre lui.
« Non ! »
Elle oscilla un instant à la surface, portée par une bulle d'air emprisonnée, puis lentement, elle bascula sur le côté. Le couvercle s'entrouvrit sous la pression de l'eau et le cadavre du lièvre glissa mollement hors de son petit cercueil. L'eau ondula doucement autour du corps inerte, dessinant des cercles concentriques qui s'éloignaient de lui en frémissant.
Les yeux vitreux de l'animal fixaient le ciel gris avec indifférence. Sa fourrure blanche, souillée de taches sombres, s'imbiba d'eau, et le sang qui maculait son pelage s'y dilua lentement, formant de fines traînées rougeâtres à la surface du lac.
Drago resta figé, les jambes tremblantes, incapable de détourner le regard.
Une sensation froide et poisseuse s'agrippa à son ventre.
C'était immonde.
Une brise légère frôla sa nuque et il frissonna violemment.
Bien.
Il tira sa baguette. Ses lèvres, bleues de froid, articulèrent péniblement le sort.
« Imitatio Vitae »
Le corps du lièvre tressaillit, agité par de petits spasmes nerveux, et sa tête se redressa d'un coup sec avant de retomber mollement. Pendant un bref instant, ses pattes bougèrent maladroitement sous la surface de l'eau, comme s'il tentait de nager.
Drago retint son souffle. Il savait que ce n'était pas vraiment de la vie, (juste une illusion, une copie grossière) mais il espérait que cela serait suffisant.
Voir l'animal mort se débattre dans l'eau noire lui retourna l'estomac et il sentit une bile amère remonter dans sa gorge. Il était sur le point de détourner les yeux lorsqu'un bruit sourd, venu du fond du lac, résonna dans ses os.
Quelque chose vibra dans l'air.
Le corps du lièvre fut soudain happé vers le fond : une force invisible l'entraîna brusquement dans les profondeurs, dans une gerbe d'eau glaciale. Les cercles concentriques se multiplièrent, affolés, avant de s'évanouir et une série de petites bulles creva la surface.
Puis l'eau redevint parfaitement lisse.
Drago resta immobile, figé dans l'eau jusqu'aux genoux, les yeux rivés sur l'endroit où le cadavre avait disparu.
Il attendit.
Une seconde. Deux. Dix.
Rien.
Une vague d'appréhension serra sa poitrine. Tout était redevenu étrangement calme. La nature entière semblait s'être arrêtée. Son souffle forma un nuage blanchâtre dans l'air glacial alors qu'il baissait lentement les yeux vers la fiole qu'il tenait toujours dans sa main tremblante. Le verre était froid, presque brûlant contre sa peau glacée.
Il déboucha brusquement le flacon. Un léger 'pop' retentit quand le bouchon sauta et une odeur métallique, âcre et stagnante qui lui piqua les narines. Il l'inclina au-dessus du lac et y versa lentement son contenu. Les gouttes tombèrent une à une, formant de petits cercles éphémères avant de disparaître, comme si elles n'avaient jamais existé.
Drago secoua le petit récipient de verre pour en extraire la dernière goutte, puis il le laissa tomber. Il s'enfonça doucement dans l'eau, tournoyant lentement avant de disparaître sans bruit sous la surface sombre.
Le vent s'engouffra entre les arbres, faisant frissonner les feuilles humides et agitant légèrement le lac. L'écho lointain d'une branche qui craquait, quelque part dans la forêt, lui parvint. Mais rien d'autre ne se produisit. Pas d'odeur, pas de vapeur inquiétante. Aucune lumière spectrale, aucune secousse sous ses pieds, aucun grondement venu des entrailles du lac.
Rien.
L'eau resta parfaitement immobile, comme si elle venait d'avaler son offrande avec indifférence.
Elle arrivait désormais au milieu du ventre de Drago, engourdissant chaque parcelle de sa peau sous le tissu détrempé de son pantalon et de sa chemise. Il n'avait même pas remarqué qu'il s'était avancé un peu plus loin. Il sentit quelque chose se nouer dans son ventre, une pointe d'angoisse, un doute sournois, qui rampa jusqu'à ses tempes.
Il fouilla nerveusement dans la poche intérieure de sa veste pour agripper un morceau de parchemin froissé et humide. Il le déplia avec précaution et ses yeux parcoururent l'encre presque entièrement effacée.
Un maléfice.
Heureusement que l'homme l'avait aidé. Sans lui, traduire ces lignes aurait été impossible. Il relut lentement le sort qu'il connaissait désormais par cœur : du latin, du grec et... et une autre langue, plus ancienne encore, qu'il ne connaissait pas. Il avait pu en traduire une partie et cela ressemblait à quelque chose comme : « Viens à moi en traversant les ombres. Vaincre la mort et ramener ton âme. »
Rien de bien engageant… Il inspira profondément pour se donner du courage.
« Ad me transire per umbras. Mortem vincere, animam redire. »
Le cri rauque d'un corbeau déchira le silence, suivi par le battement lourd de ses ailes. L'écho résonna longuement le long des flancs de la montagne et Drago ne s'aperçut que lorsque le silence retomba qu'il avait retenu son souffle tout ce temps.
L'eau, toujours glaciale, frôlait presque sa poitrine désormais. Il déglutit difficilement et sa voix trembla légèrement lorsqu'il poursuivit.
« Pros emè dià tōn skiôn badíze. Tòn thánaton nikân, tèn psychèn anakaleîn. »
Le vent s'engouffra violemment entre les branches des chênes et leurs troncs craquèrent sinistrement sous la pression.
Une sensation poisseuse et froide enveloppait ses chevilles, le tirant doucement, mais inexorablement, vers le fond. Drago tenta de reculer d'un pas, de se dégager, mais la boue gluante maintenait ses pieds fermement ancrés au sol.
Il mit plus de force dans ses mouvements, mais chaque effort l'enfonçait un peu plus. L'eau lui arrivait maintenant aux épaules. Merlin ! Il avait pied lorsqu'il était entré dans ce lac. Comment… ?
Il leva son bras un peu plus haut, pour ne pas mouiller le parchemin. La main tremblante, il prononça la dernière partie du sort.
« Vereu lha'a serann taul'ombra. Morthen quaal, animar drereth. »
Et le soleil s'éteignit.
Cela ne dura qu'un dixième de seconde, mais l'obscurité s'abattit sur la forêt avec une soudaineté terrifiante, comme si une main gigantesque avait recouvert le ciel, écrasant toute lumière sous une chape de ténèbres.
Les ombres s'étirèrent entre les troncs noueux, avalant chaque recoin, chaque fissure, chaque reflet sur la surface du lac. Le vent se tut brutalement et la forêt tout entière sembla mourir en un instant.
L'eau autour de Drago s'assombrit, devenant plus noire que l'encre, et une froideur nouvelle s'insinua en lui. Les vaguelettes qui léchaient son cou s'étaient immobilisées, devenues aussi lisses qu'une plaque de verre poli.
Puis, aussi soudainement qu'elle avait disparu, la lumière revint.
Mais ce n'était plus tout à fait la même.
Le soleil était toujours là, pâle et blafard, comme filtré à travers une épaisse couche de brume huileuse.
Drago n'osa pas bouger. Il n'osa même pas respirer.
Et, quelque part dans les profondeurs insondables du lac, quelque chose répondit à son appel.
.

.
Chapter 14: Arc de la résurrection - Chapitre 8
Notes:
.
Le récap de Sev'Précédemment dans - To Kill My Man - Ligne de vie de Drago
Malefoy s'est enfoncé dans un lac glacial, y a noyé un lièvre déjà mort, marmonné trois langues mortes et, ce faisant, a eu la brillante idée de convoquer quelque chose venu tout droit des abysses. Il est fascinant de voir à quel point l'instinct de survie lui fait toujours défaut.
Chapter Text
.
oOoOo ~ Arc de la résurrection - Chapitre 8 - DM & la porte du lac ~ oOoOo
.
Une vaguelette froide gifla son visage, laissant une traînée glacée le long de sa joue. Drago inspira brusquement une goulée d'air brûlante et douloureuse, et tenta de dégager la vase qui emprisonnait ses jambes. Mais ses pieds semblaient comme aspirés par une gueule affamée et chaque mouvement l'enfonçaient un peu plus dans l'eau.
Il pensa au lièvre.
À son petit corps sans vie, englouti dans les ténèbres du lac.
Une terreur pure le traversa.
Il ne voulait pas mourir ici.
Drago prit une profonde inspiration et plongea. Ses doigts tâtonnèrent à l'aveugle autour de ses chevilles, cherchant à les déloger de la bourbe qui les comprimait. Ses ongles s'enfoncèrent dans la boue visqueuse, tirant, grattant, mais rien ne bougea.
Il força davantage.
Il sentait le souffle prisonnier de ses poumons s'amenuir dangereusement. Finalement, il lâcha prise et se hissa difficilement vers la surface. Il toussa violemment. Il avait l'impression qu'un couteau déchirait sa poitrine. Il chercha l'air avec avidité. Ses épaules étaient secouées de spasmes. Une eau trouble collait ses cheveux à son front, ruisselait le long de ses joues.
Immonde.
Il était désormais immergé jusqu'au menton. Il releva la tête aussi haut que possible. Ses lèvres entrouvertes cherchaient désespérément un peu d'oxygène. Une nouvelle vague, plus forte cette fois, s'écrasa contre son visage et le submergea entièrement.
L'obscurité avala tout. Le silence se fit écrasant.
Il lâcha le parchemin. Le morceau de papier flotta un instant devant ses yeux avant de disparaître dans le néant liquide.
Ses bras s'agitèrent frénétiquement alors qu'il tentait de remonter, mais chaque geste l'entraînait toujours plus profondément.
Il baissa les yeux et ce qu'il vit le figea d'effroi : là où aurait dû se trouver le fond du lac, il aperçut le ciel. Non. Pas le ciel. La canopée. Elle s'étendait sous lui, comme un miroir déformé de la surface.
C'était comme si le lac avait renversé le monde, le repliant sur lui-même : le haut était devenu le bas, et le bas, le haut. L'effet était vertigineux et Drago sentit un terrible frisson remonter le long de sa colonne vertébrale.
Il leva les yeux : la surface du lac, au-dessus de lui, n'était plus qu'une ombre diffuse, loin, très loin.
Un hurlement muet déchira sa gorge et l'eau s'engouffra dans sa bouche. Elle était épaisse, poisseuse, et remplissait ses poumons comme du ciment liquide. Il suffoqua. Son corps se tordit convulsivement alors qu'il se débattait.
Quelque chose le frôla. Une ombre glissa près de son visage.
Il écarquilla les yeux, mais ne vit rien de plus.
Ses forces s'amenuisèrent. Ses gestes ralentirent : ses membres, lourds et engourdis, refusaient désormais de lui obéir.
Le froid arrêta soudainement de le mordre.
Il ne sentait plus rien.
Plus d'angoisse. Plus de douleur.
Juste une fatigue immense, écrasante.
Il cessa de se débattre.
Son corps flotta mollement, porté par le courant.
Il crut apercevoir une silhouette, une forme floue, qui glissait lentement, silencieusement, devant ses yeux mi-clos. Mais il n'avait plus la force de s'en inquiéter.
Il se laissa dériver. Ses paupières s'alourdirent.
Son esprit sombra doucement dans une obscurité confortable.
Drago ferma les yeux.
Et il laissa le néant l'engloutir.
.
~oOo~
.

.
~oOo~
.
Une poigne glacée se referma soudain autour de son poignet et une force surhumaine le tira vers le haut.
Drago sursauta. Un spasme nerveux secoua son corps engourdi. Ses poumons hurlaient désormais, ses oreilles bourdonnaient, tout son être se réduisait à cette traction brutale qui l'extirpait des entrailles du lac.
L'eau céda dans un grand bruit de succion et sa tête émergea enfin à l'air libre.
Le monde explosa.
Un chaos sonore assourdissant le frappa de plein fouet, si brutal, si violent après le silence épais d'où il venait d'être tiré. Chaque son semblait se fracasser contre ses tympans avec une intensité démesurée.
Les cris stridents des oiseaux perchés sur les branches des arbres. Le bruissement frénétique des feuilles agitées par le vent. Le bourdonnement nerveux des insectes. Le clapotis des vaguelettes contre la rive rocailleuse.
Une branche craqua sèchement, quelque part au loin, et ce son résonna jusqu'au fond de son crâne.
Tout était là, partout, en même temps.
Un bras solide et ferme était enroulé autour de sa taille et il s'y agrippa désespérément. Ses doigts crispés s'enfoncèrent profondément dans la chair de son sauveur et ses ongles griffèrent sa peau, mais l'homme ne broncha pas.
La tête de Drago tournait, ses yeux le brûlaient, sa vision était floue, striée d'éclats lumineux. Il pouvait vaguement distinguer des mèches sombres, noires, collées contre un visage qu'il ne parvenait pas à discerner.
Son cœur affolé battait à tout rompre dans sa poitrine.
Mais une chose était sûre : cet homme (car c'était bien un homme, il pouvait le sentir à la solidité du torse contre lequel il était pressé, à la fermeté des muscles sous ses doigts glacés) le tenait fermement, sans la moindre hésitation, comme s'il ne pesait rien.
Drago sentit ses jambes pendre mollement sous l'eau. Ses lèvres tremblaient, sa mâchoire était verrouillée par le froid.
Une voix grave, familière, rompit enfin le silence.
« Respire. »
Ce simple mot, presque un ordre, résonna en lui avec la force d'un coup de marteau. Drago obéit, plus par réflexe que par volonté, et l'air glacé s'engouffra dans ses poumons en une goulée brûlante, douloureuse.
Il toussa violemment, rejetant des filets d'eau sombres, tandis que ses épaules se secouaient sous l'effort.
Il était… vivant.
Les doigts du brun se resserrèrent un peu plus autour de lui, ramenant doucement sa tête contre son épaule.
Drago ferma les yeux, incapable de lutter davantage contre l'épuisement qui s'abattait sur lui.
Les vagues léchaient toujours son corps engourdi, mais pour la première fois depuis ce qui lui semblait être une éternité, il n'avait plus peur de sombrer.
.
~oOo~
.
La première chose qu'il entendit fut le battement assourdissant de son sang dans ses tempes. Puis, lentement, le monde prit forme autour de lui. Le bruissement du vent à travers les arbres, le crépitement d'un feu proche, l'écho lointain d'un corbeau.
Une chaleur hésitante caressa sa joue, probablement un rayon de soleil filtrant à travers la canopée.
On l'avait allongé à même le sol. Il sentait ses doigts s'enfoncer dans un tapis humide d'herbe et de feuilles mortes. L'odeur de mousse et de terre saturait l'air.
« Eh bien… j'ai cru que j'allais encore te perdre. »
La voix était grave, posée, avec une pointe d'ironie tranquille. Drago ouvrit brusquement les yeux et il tenta de se redresser. Mais le monde tourbillonnait autour de lui et il retomba lourdement contre le sol. Ses bras, tremblants, étaient encore incapable de soutenir son poids.
« C'est bon. Prends ton temps. Je ne suis pas pressé. »
Le blond tourna difficilement la tête. Là, assis près d'un feu de camp, se tenait un homme qui fixait paresseusement les flammes qui y dansaient. Ses cheveux noirs retombaient en mèches humides autour de son visage et… et Drago le reconnut.
« C'est toi… » voulut-t-il murmurer, mais sa voix se brisa en un gargouillement inintelligible.
L'homme tourna lentement la tête vers lui et leurs regards se croisèrent enfin. Deux yeux verts, si intenses qu'ils semblaient presque phosphorescents dans la pénombre, se posèrent sur lui. Drago sentit un frisson lui parcourir l'échine.
« Ne parle pas. Laisse ta gorge se reposer un peu. »
C'était bien lui. Celui qu'il avait vu à travers le miroir, cette vision, si proche de la folie, avec laquelle il avait communiqué si longtemps...
C'était pour lui qu'il avait failli mourir.
Cela voulait aussi dire qu'il avait réussi sa mission. De... le faire... venir jusqu'ici.
Une vague de soulagement le submergea aussitôt.
« C'était idiot d'entrer dans le lac, Drago. Je te pensais pourtant plus futé que ça. Je t'avais bien dit, non, que cet endroit était millénaire? La forêt de Białowieża est primaire et l'eau ici provient d'un ancien glacier. À quel moment t'es-tu dit que ce serait une bonne idée de réaliser un rituel aussi dangereux sans aucune précaution? »
Le ton de l'homme était léger, un peu moqueur. Drago sentit la vive piqûre de l'injustice éclater dans sa poitrine. Cet homme se permettait de le réprimander, comme il l'aurait fait avec un enfant, après qu'il ait risqué sa vie pour lui ?
Il attrapa maladroitement un petit caillou à sa portée et le lança en direction du brun, mais la pierre retomba pitoyablement à quelques centimètres de lui.
L'homme haussa un sourcil et un coin de ses lèvres s'étira en un sourire narquois.
« Qu'est-ce que tu espérais accomplir, exactement ? Est-ce que tu tentais de me lapider ? Sois sérieux, tu n'arrives même pas à te lever. »
« Je t'ai sorti de ton trou de merde ! » s'emporta Drago. L'indignation semblait l'avoir revigoré, même si sa voix était encore brisée.
Le brun rit. Un rire grave et vibrant, qui ricocha contre la paroi rocheuse voisine. C'était un son chaud, enveloppant, qui contrastait violemment avec la froideur environnante. Puis, avec une souplesse féline, le type se redressa pour glisser jusqu'à lui. Ses mains se placèrent fermement de chaque côté de sa tête alors qu'il se penchait au-dessus de lui.
Le souffle de Drago se bloqua dans sa poitrine. À cette distance, il pouvait voir chaque détail : la mâchoire carrée, les pommettes saillantes, les mèches de cheveux humides collées à son front. Mais surtout, ses yeux. Deux abysses vertes, comme des pierres précieuses rongées par un feu spectral, divin. Quelque chose d'inhumain y brûlait, une lueur qui semblait vouloir dévorer le monde.
Il sentit sa gorge se serrer sous ce regard et détourna brièvement les yeux, mais ses prunelles revinrent presque aussitôt glisser le long des lignes acérées de son cou, de ses épaules larges, jusqu'à longer l'os de sa clavicule.
L'homme le laissa faire, immobile, un sourire amusé sur les lèvres.
« Ça fait des mois que tu connais mon nom. Mais je ne t'ai toujours pas demandé le tien. » Maugréa difficilement Drago.
Le brun inclina légèrement la tête et son sourire s'élargit, dévoilant une rangée de dents blanches, bien trop parfaites.
« Non, tu te trompes : ça fait des siècles que je connais ton nom. »
« Des siècles ? Qu'est-ce que ça veut dire ? »
Le brun esquissa un sourire narquois.
« Un siècle, c'est cent ans, Drago. Donc je suppose que 'des siècles'… hé bien… »
« Ce n'est pas ce que je demande ! »
Merlin ! Ce type allait le rendre fou ; et il se délectait visiblement de son irritation. Drago le fusilla d'un regard courroucé, mais l'homme conserva un calme imperturbable. Un silence passa entre eux, comme s'il jaugeait s'il devait en dire plus. Enfin, après de longues secondes, il estima qu'il pouvait lâcher quelques informations supplémentaires.
« Quand je dis 'des siècles', je parle de souvenirs qui n'existent pas ici. Parce que je ne viens pas de ta ligne de vie. »
Drago plissa les yeux. « Pas de ma ligne de vie ? Qu'est-ce que ça veut dire encore ? »
« Imagine un pays étranger… »
« Comme l'Italie ? »
Un rire bref.
« Non. Pas l'Italie. Plutôt une autre Angleterre. »
« Une autre… Angleterre ? »
« Une autre version, oui. Comme un miroir qui refléterait le tien… mais déformé. Dans le mien, les visages sont les mêmes, mais les rôles, eux, changent. »
Drago cligna des yeux, déstabilisé.
« Une Angleterre parallèle ? »
« Si tu veux. Un monde où les choix ont mené ailleurs. Où l'Histoire ne s'est pas écrite de la même façon. »
Le blond plissa légèrement les paupières, incrédule. Ce n'était pas une idée à laquelle il avait déjà songé. Ce n'était même pas une idée qui lui paraissait concevable.
« Attends… Personne n'a jamais entendu parler d'un truc pareil. »
L'homme se pencha doucement vers lui.
« Je parie qu'il y a beaucoup de choses dont tu n'as jamais entendu parler… Drago. »
Il avait fait roulé son prénom au fond de la gorge, comme une caresse, un murmure qui vibrait directement dans sa poitrine. C'était beaucoup trop… intime.
Drago sentit une rougeur sournoise envahir ses joues. Il tenta de reprendre contenance en envoyant une pichenette dans le bras de l'homme.
« Ton nom. »
« Harry. Harry Potter. »
Jamais entendu parler. Le nom flotta un instant entre eux, dans l'air glacé. Il y avait comme une fierté tranquille dans la voix du type, comme s'il souhaitait défier le monde entier rien qu'avec ces deux mots.
« Potter ? » Drago fronça les sourcils. « Comme James et Lily Potter ? »
Maintenant qu'il le disait, la ressemblance était troublante. Harry semblait être une version plus jeune et peut-être plus… aiguisée de James. Une copie aux contours plus nets, à la présence plus écrasante.
Le sourire de l'homme se fana légèrement.
« Oui. Un peu comme eux. Sans être tout à fait ça. »
Drago aurait adoré creuser le sujet, mais une chape d'anxiété s'abattit soudainement sur lui quand il sentit le genou du brun frôler sa jambe. Il se rendit compte qu'il était piégé. L'autre était trop proche : son visage penché vers le sien, ses bras tendus de chaque côté de sa tête, bloquant toute échappatoire...
Si chaque respiration soulevait légèrement son torse, Drago, malgré leur proximité, ne sentait aucune chaleur émaner de l'homme. C'était comme si l'air lui-même refusait de se réchauffer autour de lui. Ou comme si ce type ne faisait pas vraiment partie du monde des vivants.
Un doute absurde traversa son esprit : et si ce n'était pas un sorcier qu'il avait devant lui, mais quelque chose d'autre ? Une créature remontée des profondeurs, vêtue de la peau d'un homme, venue achever ce que les flots n'avaient pas réussi à faire ?
Ou peut-être… peut-être n'était-il jamais ressorti du lac. Peut-être que tout ce qu'il percevait à cet instant n'était qu'un délire, une hallucination fabriquée par un cerveau mourant ?
C'était… trop pour lui.
Un grondement de frustration s'échappa de sa gorge alors qu'il tentait de repousser Harry du plat de la main. Sa paume rencontra la clavicule de l'homme. Sa peau était froide et ferme sous ses doigts. Il réalisa que, malgré sa posture détendue, l'homme ne bougeait pas d'un millimètre.
« Dégage de là. »
Le brun l'observa encore un instant, puis il se redressa enfin, avec une aisance désinvolte. Ses doigts glissèrent brièvement contre le sol, tout près de l'épaule de Drago, avant qu'il ne recule de quelques petits mètres pour retrouver sa place près du feu.
Un lourd silence s'installa entre eux. Il ne restait que le crépitement des flammes et le bruissement du vent dans les feuilles.
Drago reprit lentement son souffle, tentant de calmer les battements affolés de son cœur. Il voulut rassembler ses pensées, mais n'y parvint pas. Ce foutu type ! Ils venaient à peine de se rencontrer et il le rendait déjà fou.
Un courant d'air glacé s'infiltra sous sa chemise et il ne réalisa qu'à cet instant qu'il portait encore ses vêtements détrempés. Il grimaça. Il allait attraper la mort, à cette allure.
Il serra les mâchoires et rampa maladroitement jusqu'au feu. Ses doigts tremblants cherchaient désespérément la chaleur des flammes : il tendit les mains, presque jusqu'à les plonger dans les braises, et la brûlure mordante qui accueillit sa peau engourdie lui arracha un soupir rauque.
Enfin, il se décida, la mort dans l'âme, à retirer son haut. C'était la meilleure solution pour combattre le froid. Il se débattit un instant, maladroitement, avec ses manches, puis, une fois libre, il secoua le tissu détrempé et essaya de l'étendre près du feu.
De l'autre côté des flammes, Harry l'observait en silence. Son visage était éclairé par les reflets orangés de l'âtre, et ses yeux… Merlin… ses yeux verts brillaient d'une lueur indéchiffrable, comme s'il évaluait chacun des gestes du blond avec une évidente curiosité.
« Tu aurais dû enlever tes vêtements mouillés plus tôt. » remarqua-t-il enfin avec une pointe de sarcasme.
Drago grinça des dents. Ce sale petit… Il prit sa voix la plus douce, la plus mielleuse :
« Je ne sais pas si tu avais remarqué, Potter, mais plus tôt, j'étais dans les vapes. C'est peut-être ça, la raison ? Tout ça parce que j'ai voulu aider Sa Seigneurie. Si j'avais su, je ne serais pas venu du tout. Ça aurait résolu bien des problèmes. »
Harry pencha légèrement la tête et un sourire malicieux effleura de nouveau ses lèvres.
« Si je comprends bien ce que tu es en train de dire, la prochaine fois, tu voudrais que ça soit moi qui te déshabille ? C'est noté. »
La fureur piqua Drago comme un aiguillon. Il s'empara de sa chemise et la jeta, sans réfléchir, au visage du brun. Mais au dernier moment, le tissu dévia de sa trajectoire et disparut dans les flammes dans un froissement désespéré.
« Non ! »
Drago tendit la main pour la rattraper, mais il était déjà trop tard.
Harry haussa un sourcil, faussement consterné.
« Je ne comprends pas trop… pourquoi répètes-tu constamment les mêmes erreurs ? »
C'en était trop.
Drago se releva d'un bond, vacillant légèrement sur ses jambes encore faibles. Il refusait de rester une minute de plus avec ce type. Il jeta un regard fébrile autour de lui, aperçut enfin sa besace, s'en empara, récupéra ses chaussettes et ses chaussures toujours étendues sur le tronc moussu et marcha du mieux qu'il put en direction de la forêt.
La voix d'Harry retentit derrière lui, posée.
« Où tu vas ? »
« Je rentre chez moi ! »
« Ce n'est pas la bonne direction… »
Drago s'arrêta net et pivota sur ses talons, à bout de nerfs. Harry s'était levé et l'avait rejoint, aussi silencieux qu'un prédateur à l'affût.
« J'en ai rien à foutre, putain ! J'en ai marre. J'ai froid. J'ai failli mourir. J'ai mal partout et j'ai aucune envie d'être ici avec toi ! Je veux juste me barrer d'ici ! »
Harry inclina légèrement la tête sur le côté.
« Tu n'as aucune envie d'être avec moi ? »
Drago ouvrit la bouche pour répondre, la referma, la rouvrit, puis secoua la tête avec agacement.
« Oui. Non. J'en sais rien putain. »
Harry hocha gravement la tête, solennel.
« D'accord. Je te raccompagne. »
Et, avant que le blond ne puisse protester, il s'avança et le souleva dans ses bras avec une aisance déconcertante.
« Qu…Quoi? Mais repose-moi tout de suite! » s'écria Drago en battant des bras.
Harry ne répondit pas. Au lieu de cela, il s'engagea calmement entre les ombres de la forêt.
.
.
Chapter 15: Arc de la résurrection - Chapitre 9
Notes:
.
Le récap de Sev'Précédemment dans - To Kill My Man - Ligne de vie de Drago
Drago a presque réussi à se noyer dans un lac avant d'être tiré de là par un inconnu aux cheveux noir et aux yeux émeraudes. Il s'est présenté comme étant Harry Potter. Depuis, l'un tremble de froid, l'autre d'arrogance et, ensemble, ils inaugurent une relation fondée sur l'irritation mutuelle et une fascination à peine contenue.
.
Chapter Text
oOoOo ~ Arc de la résurrection - Chapitre 9 - DM & HP forêt ~ oOoOo
.
« Arrête de t'agiter. »
La voix grave d'Harry roula comme une avalanche, s'écrasant contre les nerfs déjà à vif de Drago qui cessa immédiatement ses invectives et replia instinctivement ses bras contre lui, pétrifié.
L'homme avançait d'un pas sûr, souple et silencieux, comme s'il connaissait chaque pierre, chaque racine sous ses pieds. Il ne trébuchait pas, ne glissait pas et se déplaçait avec une surprenante facilité.
Drago se souvint du chemin chaotique qu'il avait lui-même emprunté pour arriver jusqu'au lac : il avait perdu l'équilibre, chuté, râlé contre chaque branche. Et il n'avait même pas eu à porter un autre homme.
La vie pouvait parfois se montrer d'une monstrueuse injustice.
Ses yeux gris glissèrent le long des épaules du brun. Il pouvait deviner les muscles rouler sous le pull sombre, tendus par l'effort mais stables, solides. Il portait son poids avec une insultante aisance.
Drago soupira doucement et passa un bras autour du cou de son porteur. C'était bien plus confortable ainsi. Ses doigts s'accrochèrent timidement à l'encolure de son pull. C'était ce que l'on pouvait appeler : rendre les armes. Il laissa sa tête basculer en arrière, exposant sa gorge pâle à l'air glacé de la nuit. Il était épuisé. Son regard dériva vers les branches épaisses qui s'étendaient au-dessus d'eux. Avec la vitesse quasi-constante d'Harry, les feuillages semblaient se déployer, s'enrouler et se dérouler sur eux-mêmes, comme une mer d'écume verte et brune.
Il cligna paresseusement des yeux et ses pensées s'égarèrent quelque part entre le bruissement des feuilles et la régularité des pas de l'homme.
Il réalisa soudain qu'il était… détendu. Sa respiration s'était apaisée, son cœur avait ralenti, et, pour la première fois depuis ce qui semblait être une éternité, il ne ressentait plus le poids du danger imminent. Son regard retomba sur le visage d'Harry, partiellement éclairé par la pâle lueur de la lune qui perçait parfois à travers une trouée dans la canopée.
« Nous allons à l'hôtel Zamek, ou tu veux que je te dépose ailleurs ? »
La voix de son porteur roula tranquillement dans l'air, sortant Drago de son étrange léthargie. Il redressa légèrement sa tête, les sourcils froncés.
« Comment sais-tu où je loge ? »
« Je t'ai observé. » Répondit Potter sans le moindre remord. « À travers les miroirs. »
Drago cligna des yeux. Sa bouche s'ouvrit légèrement avant de se refermer. Il semblait chercher ses mots.
« ... À travers les… Ok. Tu sais que ça ressemble vachement à un truc de serial killer, ça ? » Il leva les yeux au ciel avec exaspération avant de soupirer. « Tu peux marcher encore combien de temps ? »
« Dis-moi juste où tu veux aller. »
Drago hésita une seconde.
« Bon. Tu n'as qu'à nous emmener à Białystok. J'y ai un Portoloin pour Berlin. Puis on filera sur Londres. » Il marqua une pause, avant de continuer d'un air légèrement agacé. « En fait, à l'aller, je suis passé par Bagdad. Mais franchir les frontières, c'était la croix et la bannière. Des papiers, des interrogatoires… une vraie galère. Du coup, je me suis dit : pourquoi pas Grozny ? »
Harry hocha légèrement la tête, mais Drago continua sans attendre de réaction.
« Mais je me suis souvenu que, lors de mes dernières vacances là-bas, un vieil escroc avait essayé de m'arnaquer en me vendant à prix d'or des haggis. » Il leva les yeux au ciel avec un petit grognement. « Alors je préférerais éviter de passer par là cette fois-ci. »
Harry finit par demander :
« C'est quoi, des haggis ? »
Drago se figea.
« Pardon ? Tu ne sais pas ce que sont les haggis ? »
Pas de réponse.
Il cligna lentement des yeux avant de lever la tête vers les branches noueuses au-dessus d'eux, comme s'il s'adressait directement à la forêt elle-même.
« Vous avez entendu ? Il ne SAIT pas ce que c'est ! »
Harry soupira longuement, comme si sa patience venait d'être usée jusqu'à la corde. II n'avait décidément aucune résistance.
« Donc, on va à Białystok ? »
« Oui, Potter. On va à Białystok. Et pour ta gouverne, les haggis, c'est de la panse de brebis farcie. Une tuerie en Écosse. »
« Je suppose que je devrais remercier Merlin que le destin ne m'ait pas envoyé là-bas alors. »
« On sent bien que tu n'as jamais eu affaire à une mère écossaise en colère. Tu serais déjà en train de demander une deuxième portion. »
Les arbres cédèrent soudainement la place à une minuscule clairière. Au centre, serpentait tranquillement un ruisseau dont les eaux clapotaient contre des pierres moussues qui émergeaient de ça et là.
Il était clair et peu profond… mais Drago sentit son estomac se nouer à sa simple vue. Une part de son esprit lui murmurait que cette eau, aussi inoffensive semblait-elle, pouvait à tout instant se refermer sur lui, l'engloutir, le tirer vers le fond.
Il détourna les yeux, incapable de fixer trop longtemps la surface miroitante du ruisseau, et la froide morsure du lac lui revint en mémoire avec une précision glaçante.
Harry s'arrêta au bord, évaluant d'un coup d'œil la largeur et la stabilité de l'autre rive.
« Accroche-toi bien. »
Drago grogna et ses bras se nouèrent un peu plus fort autour du cou du brun.
« Potter, si tu me lâches et que je meurs ici, sache que je te hanterais jusqu'à la fin de tes jours. »
Un nouveau sourire effleura les lèvres de Potter. Il observa le cours d'eau un instant de plus, avant de s'élancer avec aisance. Ses bottes frappèrent brièvement la surface des pierres humides, mais pas une seule goutte ne l'atteignit. Son équilibre était tout simplement parfait. Ils atterrirent de l'autre côté en souplesse et l'homme tourna légèrement la tête pour croiser le regard acier de Drago.
« La Mort ne posera pas ses doigts sur toi. »
Il n'avait jamais eu l'air aussi sérieux, aussi grave. Ses yeux verts, d'ordinaire si vifs, semblaient maintenant aussi sombres que deux abysses profondes.
.
.~oOo~.
.
Ils ne s'étaient pas parlé depuis plusieurs minutes déjà, mais Drago ne prêtait plus vraiment attention à leur progression. Ses pensées dérivaient erratiquement, passant sans repos des ténèbres du lac glacé, à cette allusion sur la Mort que venait de faire Potter.
Une étrange chaleur s'était installée quelque part dans sa poitrine, mêlée à une inquiétude sourde qu'il ne parvenait pas à réprimer. Il secoua mentalement la tête, chassant de son esprit ces images obsédantes. Il avait besoin de se concentrer sur autre chose. N'importe quoi, sauf ça.
« Tes yeux sont vraiment verts. »
Il cherchait désespérément une échappatoire à ses foutues pensées.
Harry ne répondit pas. Il semblait concentré sur le chemin, les lèvres pressées en une ligne ferme, le regard rivé droit devant lui. Drago hésita un instant, puis ses doigts glissèrent distraitement jusqu'à une mèche de cheveux noirs, humide et emmêlée, qui retombait sur son front. Il la fit tourner doucement entre ses doigts, d'un geste absent.
« Ils ont toujours été verts ? »
Cette fois, Harry tourna légèrement la tête pour croiser son regard et ses lèvres s'étirèrent en un sourire fugace.
« Non. Je change régulièrement leur couleur. Une fois jaune. Une fois bleu. Une fois rose. Et toi, tes yeux ont toujours été gris ? »
Drago plissa le nez, contrarié. (Une expression typique, héritée d'années d'éducation aristocratique).
« Ha. Ha. Très drôle, Potter. Pour ta gouverne, tous les Malfoy ont les yeux gris. »
Harry lui lança un nouveau coup d'œil avant de demander, d'une voix plus posée :
« Ton père aussi ? »
Les sourcils de Drago se froncèrent imperceptiblement et ses doigts retombèrent faiblement sur sa poitrine.
« Je n'aime pas parler de mon père. » finit-il par dire.
L'autre ne détourna pas le regard.
« Pourquoi ? »
Les yeux du blond se perdirent quelque part au loin et son visage se ferma légèrement.
« Il a fait… des mauvais choix de vie. »
Harry hocha la tête. Une ombre glissa brièvement dans ses yeux.
« Tout le monde fait des erreurs. »
Drago hésita et un souffle franchit ses lèvres :
« Il y en a des plus pardonnables que d'autres. »
Le silence s'étira entre eux. Drago aurait voulu dire quelque chose, briser ce calme pesant, mais aucun mot ne venait.
.
.~oOo~.
.
Après plusieurs minutes de marche, Harry s'arrêta net. Les muscles de son corps se raidirent alors qu'il redressait légèrement la tête, tous ses sens aux aguets, comme un animal traqué. Il balaya rapidement les environs du regard.
« On nous suit. »
Drago tressaillit.
« Quoi ? Qui ? »
Potter ferma les yeux une fraction de seconde, comme s'il écoutait quelque chose que personne d'autre ne pouvait entendre. Puis, il déposa délicatement son précieux colis au sol.
« Reste ici. Ne bouge pas. »
Drago s'accroupit instinctivement, une main crispée autour de sa besace. Son cœur battait violemment contre ses côtes alors qu'il observait Harry s'éloigner de quelques pas, les épaules tendues.
« Qui est-ce ? » souffla-t-il, incapable de retenir sa question.
Son compagnon tourna légèrement la tête. Son regard brillait dans la pénombre. Il avança encore de quelques pas et ses bottes s'enfoncèrent légèrement dans le tapis humide de feuilles mortes.
Un bruit déchira soudain le silence : un craquement sec, suivi d'une série de bruissements rapides, comme si quelque chose ou quelqu'un se déplaçait entre les arbres à une vitesse inquiétante.
Le souffle de Drago se fit douloureux.
« Potter ! »
Mais Harry ne répondit pas. Il avait déjà disparu dans les ombres, avalé par la forêt.
Drago serra les dents et fouilla frénétiquement dans sa besace. Ses doigts rencontrèrent le bois tiède de sa baguette et il la serra fermement dans sa main.
Un autre bruit, plus proche cette fois, fit bondir son cœur dans sa poitrine. Quelque chose… une silhouette informe sombre, passa brièvement entre deux arbres, à quelques mètres seulement de lui.
Le silence revint.
Puis, une main glacée se posa sur son épaule.
Drago fit brusquement volte-face, baguette levée, prêt à en découdre. Mais avant qu'il ne puisse prononcer un mot, il fut tiré en avant et trébucha contre son poursuivant.
« C'est moi. » Souffla Harry. « Ils sont partis. Pour l'instant. »
Drago sentit ses jambes céder sous lui et les bras fermes du brun se refermèrent sur lui.
« Tu pourrais prévenir avant de faire ce genre de trucs ! » cracha-t-il, venimeux.
Harry semblait toujours à l'affût et son regard scrutait l'obscurité autour d'eux.
« Il faut qu'on parte d'ici. » Murmura-t-il soudain. « Maintenant. » Il se détourna enfin des ténèbres pour planter son regard dans celui de Drago. Pendant une seconde, le blond oublia presque de respirer.
« Merlin, mais tu es gelé ! » Une ombre d'agacement passa sur le visage d'Harry. Sans attendre de réponse, il attrapa le bas de son propre pull, le retira rapidement et le tendit à son compagnon. Le vêtement était frais et l'odeur légèrement boisée et métallique qui s'en dégageait était troublante. « Mets ça. »
Drago, surpris, enfila maladroitement le pull, sans vraiment réfléchir. Il était trop grand pour lui : les manches retombaient presque jusqu'à ses doigts, mais il s'en moquait. La chaleur qui l'enveloppait désormais était si réconfortante ! Il eut l'impression de revivre.
Harry s'accroupit légèrement devant lui et tendit une main ouverte.
« Monte. »
« Quoi ? Encore ? »
« Je suis plus rapide. Plus endurant. Monte. Maintenant. »
Le ton ne laissait aucune place à la discussion. Drago attrapa la main tendue avec un soupir résigné et se hissa contre le dos solide du brun pour s'accrocher fermement à son cou.
« Qu'est-ce que c'était ? »
Harry garda le silence.
« Réponds-moi, Potter. Je sais que tu m'as entendu. »
Un soupir discret lui répondit, mais Drago sentit ses épaules se contracter. Après une brève hésitation, il répondit, désinvolte :
« Je suis un homme très demandé. Et disons que… je suis parti un peu trop précipitamment de là d'où je viens. D'ordinaire, ça ne serait pas un souci pour moi. Mais tu es avec moi… alors… »
Drago fronça les sourcils. Ce n'était pas exactement la réponse qu'il espérait. C'était terrible de s'entendre dire que sa simple présence compliquait les choses. Il ravala une remarque acide, puis laissa sa tête retomber contre l'épaule du brun, un peu trop brusquement pour que ce soit complètement innocent. Ses cheveux effleurèrent la mâchoire tendue d'Harry et il garda les yeux rivés droit devant lui, mâchoires serrées.
.~oOo~.
Ils continuaient d'avancer dans la forêt. Les pas de l'homme restaient étonnamment sûrs, réguliers, mécaniques, malgré les racines, les creux boueux et les pentes traîtresses. Drago, accroché à son dos, sentait chaque déplacement se réverbérer sur son torse : les muscles qui se contractaient à chaque effort, la précision et l'équilibre d'un corps taillé pour survivre et ce rythme infernal qui absorbait les chocs sans jamais faiblir.
La forêt se refermait sur eux comme une mâchoire végétale, inextricable. L'air, complètement saturé d'humidité, était épais au point de coller à leur gorge, lourd de mousse détrempée, d'écorce en décomposition et de champignons. Chaque inspiration ressemblait à une bouffée viciée, tiède et moite. Et, s'ils ne sortaient pas bientôt d'ici, ils allaient probablement mourir sous la touffeur orageuse, avalés par cette horrible forêt qui semblait digérer tout ce qui s'y attardait trop longtemps.
Drago ne savait pas ce qui les avait suivis, un peu plus tôt. Il ne savait pas non plus quand ça avait commencé, exactement. Le bruit avait été vague, suffisamment flou pour qu'on doute l'avoir vraiment entendu, mais assez dérangeant pour qu'il en garde un frisson dans la nuque. Depuis, il n'avait pas cessé de tendre l'oreille.
Il essayait de ne pas trop y penser, mais un doute l'avait assailli : et si autre chose était sorti du lac en même temps qu'Harry ?
Il resserra légèrement sa prise avant de murmurer, à mi-voix :
« C'était vraiment de l'eau du Styx ? »
« Oui. »
« Je vois. »
Un nouveau silence inconfortable s'étira entre eux. Drago sentait l'étrange fraîcheur du dos d'Harry se diffuser à travers son pull. Ce n'était pas désagréable, juste légèrement incongru : une sensation apaisante, qui contrastait avec la moiteur de la forêt. Il ne savait pas si c'était dû à l'altitude, au froid résiduel de l'eau ou à autre chose.
Il préféra ne pas s'y attarder.
Sans trop y réfléchir, ses doigts vinrent jouer avec le col du t-shirt de Potter, pour s'occuper ou se rassurer, il ne savait plus très bien.
« Alors, si c'était l'eau du Styx… ça veut dire que la porte que j'ai ouverte… était celle des Enfers ? »
Harry ne répondit pas et son silence devint une confirmation. Drago se redressa légèrement.
« N'est-ce pas ? » insista-t-il.
« Oui. »
Il n'y avait eut aucune hésitation dans la réponse. Drago frissonna et il resserra inconsciemment son bras autour du cou d'Harry.
« Alors… tu étais aux Enfers ? »
« Oui. »
« Pourquoi ? »
Aucun son ne franchit les lèvres de Potter. Son visage restait impassible, son regard toujours rivé droit devant lui. Il était clair qu'il n'avait aucune envie de répondre aux questions. Mais Drago était tenace, et bien loin d'en avoir fini.
« Parce que tu étais… quelqu'un de mauvais ? »
Harry tourna légèrement la tête et ses yeux verts rencontrèrent brièvement ceux gris du blond.
« Tu confonds avec les Enfers de la version biblique. »
« Oh. Donc il n'y a pas de feu éternel et les âmes n'y brûlent pas à tout jamais ? » C'était un sarcasme, mais Potter sembla le prendre au premier degré.
« Non. »
Nouvelle réponse sèche, un peu trop tranchante au goût de Drago.
« Alors… dans ce cas… ça veut dire que tu es mort ? »
Sans prévenir, Harry changea brusquement de direction. Le blond lâcha un cri étranglé et s'agrippa plus fermement à lui.
« Heeey ! Doucement, merde ! »
Harry ralentit légèrement, mais son expression restait fermée.
« Je ne suis pas mort. Les morts sont morts. Ils ne peuvent pas revenir. »
La voix avait claqué comme un fouet, mais elle ne portait pourtant pas de colère en elle, juste une affirmation dure et sans appel.
Drago mordit sa lèvre, scrutant les moindres détails du visage d'Harry.
« Alors… qu'est-ce que tu es, exactement ? »
Les mâchoires du brun se contractèrent et, pendant un instant, il crut apercevoir une ombre passer dans ses yeux verts. Il sut qu'il n'aurait pas de réponse. Il laissa sa tête retomber contre l'une des larges épaules devant lui et murmura :
« Tu es effrayant, tu sais. »
Les coins des lèvres de Potter tressaillirent.
« Et toi, tu es épuisant. »
.

Chapter 16: Arc de la résurrection - Chapitre 10
Notes:
.
Le récap de Sev'
Précédemment dans - To Kill My Man - Ligne de Drago
Entre trois réflexions sur la gastronomie écossaise, les Enfers et les mauvais choix paternels, Harry et Drago, en route pour Białystok, ont réussi à attirer l'attention d'ennemis non identifiés.
.
Chapter Text
.
oOoOo ~ Arc de la résurrection - Chapitre 10 - DM & HP : Taxi ~ oOoOo
.
À leur grand soulagement, la forêt dense laissa finalement place à une route secondaire mal entretenue, bordée de poteaux électriques, de vieux lampadaires fatigués et de champs noyés dans une brume épaisse.
Harry avait déposé Drago à terre et ce dernier marchait désormais derrière lui, toujours enveloppé dans son pull trop large, les chaussettes à moitié remontées sur ses mollets et son sac en bandoulière négligemment jeté sur son épaule. De toute sa vie, il n'avait jamais été si peu… aristocratique. Il remercia le ciel que personne de sa connaissance ne le voit en cet instant.
Au loin, des phares percèrent l'obscurité et une voiture solitaire s'approcha d'eux en ronronnant doucement. Harry s'arrêta au bord de la route et leva une main, paume ouverte, vers le véhicule. Les pneus crissèrent sur le bitume humide alors qu'il s'arrêtait à leur hauteur.
« Reste ici. » Ordonna calmement le brun avant de s'avancer vers la fenêtre côté conducteur.
Drago croisa les bras, agacé. Il regarda son compagnon échanger quelques mots avec le chauffeur : il était nonchalamment appuyé contre la portière, penché à travers la vitre baissée. Ils parlaient à voix basse. Le visage d'Harry était noyé dans l'obscurité et les mèches sombres de ses cheveux tombaient autour de ses pommettes, presque comme un rideau. Sa silhouette paraissait étrangement longue et déliée dans la lueur tremblotante des lampadaires.
Drago plissa les yeux, cherchant à capter une bribe de leur conversation, mais les mots lui échappaient. Quelque chose grésilla un peu plus haut et il leva la tête. Le réverbère clignota un instant, projetant des ombres nerveuses autour de lui, avant de s'éteindre complètement dans un soupir électrique.
La section de route sur laquelle ils se trouvaient fut soudainement plongée dans un voile de ténèbres épaisses. Seuls les phares jaunâtres de la voiture éclairaient encore les environs. Drago fronça les sourcils et son regard se perdit au loin, là où les autres lampadaires continuaient de briller paisiblement.
« Quel vieux truc miteux. » Pensa-t-il avec une pointe de mépris.
Quand il baissa de nouveau les yeux vers la voiture, Harry se redressait et ses mains quittaient lentement le bord de la fenêtre. Il tourna la tête vers Drago et lui fit un signe du menton.
« Il nous emmène. »
Drago n'hésita qu'une fraction de seconde avant de monter à l'arrière. L'habitacle sentait le plastique chauffé et le tabac froid. Il s'installa sur l'inconfortable banquette, jetant un regard curieux au chauffeur, un homme d'âge mûr, dont les traits disparaissaient dans la pénombre.
« Merci. »
Le chauffeur ne répondit pas. Il ne tourna même pas la tête. Ses mains restaient mollement posées sur le volant et ses yeux refusaient de quitter le bitume qui s'étirait devant eux en une longue langue morne et grise.
Drago lança un regard interrogatif à Harry qui, installé à côté du conducteur, semblait parfaitement détendu.
« Il… il ne parle pas anglais ? »
Harry haussa vaguement les épaules. Son regard était aussi perdu au loin, bien au-delà du pare-brise embué.
« Non. »
La voiture démarra dans un ronronnement fatigué de moteur. Drago fronça les sourcils et se cala un peu plus profondément dans son siège.
Le silence s'installa entre les passagers.
Pour passer le temps, il observa le profil de son sauveur, éclairé par les halos intermittents des réverbères. Ses traits étaient fins mais acérés et ses yeux, même dans la pénombre, semblaient briller d'un éclat émeraude intense, surnaturel. Il avait une présence… écrasante, magnétique.
Ce type… Oui... C'était peu dire que ce type ressemblait à un héros. À un véritable héros. Pas à Neville Longbottom qui peinait à lancer correctement un sortilège de bouclier sous pression. Non, c'était cet homme qui avait le profil. Et ce héros semblait (et Drago le réalisait avec une pointe d'orgueil mal placé) plus intéressé par lui que par le reste du monde.
Une part de lui savait qu'il aurait dû être furieux que Potter l'ait observé, tout ce temps, à travers les miroirs. Que cela aurait dû le terrifier, même. Mais au lieu de ça… il en ressentait une satisfaction presque coupable.
Il savait aussi que tout cela risquait de changer une fois qu'il aurait présenté Harry à l'Ordre. Une fois qu'Albus Dumbledore aurait posé ses yeux perçants sur lui, ou que Longbottom, avec sa maladresse et ses airs de chiot abandonné, essaierait de se hisser à sa hauteur.
Mais pour l'instant, Harry Potter était là. Et il était à lui. C'était déjà amplement suffisant.
Drago finit par détourner le regard. Ses doigts jouaient distraitement avec une couture de son pantalon.
« Je vais te présenter à l'Ordre. On ira au QG. »
Harry détourna légèrement le regard vers la vitre, sans se retourner.
« J'aimerais dormir, avant. » Répondit-il simplement.
Il ne semblait pas pressé de les rencontrer. Drago ne se laissa pas abattre.
« Il faudra que tu fasses bonne impression à Albus Dumbledore. C'est un peu lui qui… préside le groupe. Mais… tu l'as peut-être déjà vu, lui aussi, à travers les miroirs ? »
Harry esquissa un sourire fugace.
« Il ne m'intéresse pas vraiment. »
Drago se redressa légèrement et une pointe de vanité gonfla sa poitrine. Savoir qu'Harry semblait plus intéressé par lui que par Dumbledore flattait étrangement son ego. C'était troublant.
« Tu sais que tout le monde va te poser des questions, une fois là-bas. »
« J'essayerai de leur apporter les réponses qu'ils veulent entendre. »
Drago ouvrit la bouche, prêt à répliquer, mais il s'interrompit et les mots moururent dans sa gorge. Qu'avait-il voulu dire, exactement, par 'ce qu'ils veulent entendre' ? Il reprit, plus hésitant :
« Nous avons perdu notre dernière bataille contre… contre Celui-Dont-On-Ne-Doit-Pas-Prononcer-Le-Nom. C'est un mage noir. Il est… »
« Je sais qui est Voldemort. » Coupa Harry, désintéressé.
Le nom résonna dans l'habitacle comme une cloche de bronze. Drago se crispa et ses doigts se refermèrent nerveusement sur la sangle de sa besace. Personne n'osait prononcer ce nom. Il leva les yeux vers Harry et observa la lumière des réverbères jouer sur les courbes de son visage.
« L'Élu… » souffla-t-il presque malgré lui.
Harry braqua ses yeux verts vers lui. Pendant un instant, Drago crut y voir une lueur plus vive, fiévreuse.
Une bouffée de colère incontrôlée monta en lui.
« Enfin, ça non plus, ça ne doit pas t'intéresser ! » Lança-t-il avec aigreur.
Harry se pencha légèrement vers lui.
« Ça m'intéresse. »
Drago renifla avec mépris, détournant les yeux pour fixer la route grise à travers la vitre embuée.
« Longbottom est incapable de vaincre Tu-Sais-Qui. »
Harry haussa un sourcil et un sourire en coin, peut-être un peu moqueur, étira ses lèvres.
« Je vois. Alors Neville a récupéré le rôle de l'Élu. »
« Il n'a aucun intérêt. » Grogna Drago, crispé.
« C'est parce qu'il est entouré de personnes incapables de révéler son véritable potentiel. Je trouve qu'il fait un bon sauveur. »
Drago fusilla Harry du regard.
« Il est incompétent. Des années que ça dure ! N'importe qui d'autre pourrait mieux y arriver que lui ! »
« Ce n'est pas Neville le problème, c'est ce qu'on attend de lui. Et ce qu'on lui donne pour réussir. »
« C'est ridicule. »
Harry se tourna complètement vers lui. Cette fois-ci, un véritable sourire narquois éclairait ses traits.
« Est-ce… une crise de jalousie que tu es en train de me faire ? »
Le rouge monta instantanément aux joues de Drago. Ses lèvres s'entrouvrirent pour protester, mais aucun son n'en sortit. Il s'empara désespérément de sa besace et tenta de frapper Harry avec, mais ce dernier arrêta le sac d'une main et ses doigts se refermèrent fermement sur la lanière.
« Il va vraiment falloir que tu arrêtes cette manie de vouloir me frapper avec tout ce qui te tombe sous la main. » murmura-t-il.
Son visage était dangereusement proche de celui de Drago.
Les joues du blond prirent une teinte encore plus vive. Il balbutia quelque chose d'incompréhensible, repoussa Potter du plat de la main et détourna brusquement la tête vers la vitre. Le silence retomba dans l'habitacle. Il pouvait encore sentir le regard d'Harry posé sur lui, lourd, insistant, avant qu'il ne reporte enfin son attention sur la chaussée.
Drago écouta longuement le ronronnement des pneus sur l'asphalte humide. Les phares découpaient difficilement la nuit, projetant des ombres fugaces sur les arbres qui bordaient la chaussée. Il les observa pensivement défiler à travers la fenêtre et l'impression d'être en plein cauchemar le submergea. Par moments, une branche fouettait sèchement la carrosserie et il se surprenait à retenir son souffle, comme s'il craignait que quelque chose cherche à entrer.
Il y avait aussi, dans le paysage, dans la brume qui rampait sur les champs comme de longues langues de serpents, dans ce ciel noir, voilé, et dans les teintes nocturnes de la campagne polonaise, un je-ne-sais-quoi qui le mettait mal à l'aise. Il n'aurait pas su dire ce qu'il redoutait, seulement que tout paraissait figé dans une même étrange attente.
Et puis il y avait le chauffeur. Son mutisme. Cette façon qu'il avait de fixer la route, impassible, absent, vidé de l'intérieur. Drago sentait son estomac se contracter chaque fois qu'il scrutait son profil dans le rétroviseur. Il doutait maintenant que Potter se soit contenté de lui parler, mais il n'avait aucune preuve pour étayer ses suppositions. Rien d'autre qu'une sensation froide et poisseuse qui glissait au creux de sa nuque.
La buée s'épaississait sur la vitre ; il y traça machinalement une ligne du bout du doigt, sans trop savoir pourquoi.
Il était distrait.
Son regard revint se poser sur Potter. Il aurait voulu le regarder autrement (comme un inconnu par exemple, ou n'importe quoi d'un peu plus neutre...), mais il n'y arrivait pas. Il y avait chez cet homme une force tranquille qui effaçait tout le reste. En sa présence, le monde semblait se rétrécir, se concentrer autour de lui, comme si rien d'autre n'existait.
Drago aurait voulu s'en méfier. Il savait reconnaître le danger : il l'avait respiré de bien trop près pour s'y tromper, et Potter en portait définitivement l'odeur. Pas celle du sang ou de la peur, mais quelque chose de plus dense, qui tenait à la fois de la lumière et de l'ombre. C'était peut-être cela qui le troublait le plus : cette impression que l'homme assis à pas même quelques mètres de lui pouvait aussi bien le sauver que le brûler.
Il se surprit à se dire qu'avec lui, il allait devoir apprendre à marcher sur un fil. Et qu'il allait probablement aimer ça. Cela ne serait surement pas la même sensation que sur un champ de bataille. Non. Ici, le danger avait un visage séduisant, une voix qui troublait les sens et un calme qui donnait envie de s'approcher plutôt que de fuir.
Il repensa, avec amertume, à Dumbledore. À cette façon qu'avait le vieil homme de tendre les doigts vers tout ce qui brillait. Il ne voulait pas que Potter entre sous sa coupe. Pas après tout ce qu'il avait fallu faire pour le tirer des... des 'Enfers'.
Et surtout, il ne voulait pas voir le brun devenir un autre Longbottom : peureux, docile, fidèle, refait à l'image d'un maître. Harry méritait mieux. Ou peut-être que Drago avait simplement besoin de croire qu'il méritait mieux.
Et puis, il y avait ce lien qu'il sentait entre eux depuis cette nuit. (Peut-être même depuis bien avant.) C'était lui qui avait ouvert la porte, lui qui l'avait laissé 'entrer'. Alors, il ferait tout en son pouvoir pour que ce fil qui les reliait ne se brise ou ne s'élime pas. Quitte à le re-tisser, à l'épaissir un peu plus chaque jour.
Ce qui était certain, c'est qu'il ne laisserait personne, ni Dumbledore, ni l'Ordre, décider à sa place du moment où ce fil se romprait.
Et Malfoy trouvait cela très juste.
Quelque chose jaillit des fourrés et un éclair roux traversa la route en un éclair. Le renard fila droit sous leurs pneus.
Il y eut un craquement humide répugnant.
Drago sursauta et laissa échapper un cri étranglé. Il se cramponna au siège avant, enfonçant ses ongles dans le cuir usé. Les roues dévièrent légèrement, mais la voiture ne ralentit pas. Le chauffeur, les mains mollement posées sur le volant, ne cilla pas.
« Il… il n'a même pas freiné ! »
Harry haussa vaguement les épaules. Il regardait le paysage monotone défiler et ne semblait même pas avoir remarqué le choc.
Au loin, les lumières d'une petite ville commencèrent à percer l'obscurité et Drago sut que son calvaire allait bientôt se terminer.
.

.

Marilyn D. (Guest) on Chapter 7 Wed 03 Sep 2025 11:11AM UTC
Comment Actions
Sombre_Songe on Chapter 7 Mon 08 Sep 2025 11:17AM UTC
Last Edited Mon 08 Sep 2025 11:19AM UTC
Comment Actions